Jean-Paul Aloysius, servant de messe à l'église St-Joseph, Genève | © Lucienne Bittar
Dossier

Bénévolat: Jean-Paul Aloysius, enfant de chœur et de cœur à Genève

6 décembre 2024 | 17:00
par Lucienne Bittar
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Qui sont les bénévoles en Église, qu’est-ce qui les motive? A l’occasion de la Journée internationale des volontaires du 5 décembre 2024, cath.ch part à la rencontre de quelques-uns d’entre eux. Depuis plus d’une décennie, soit la moitié de sa vie, Jean-Paul Aloysius est servant de messe à Genève. Une manière pour lui de «rendre à la société» ce qu’il a reçu et de faire communauté.

La famille, la foi catholique, les liens sociaux et communautaires sont les piliers sur lesquels Jean-Paul Aloysius, 21 ans, s’appuie pour construire sa vie. Et ce sont eux qui l’ont conduit à s’engager comme enfant de chœur, à la paroisse anglophone St-Nicolas de Flüe d’abord, pendant 10 ans, puis à la paroisse St-Joseph, dans le quartier des Eaux-Vives. Depuis deux ans, il y assure fidèlement ce service tous les samedis soirs, avec un groupe d’une dizaine d’autres bénévoles, dont son frère James, 14 ans.

Être enfant de chœur demande de la constance, et le jeune homme ne paraît pas en manquer. Ce bénévolat structuré, bien cadré, est compatible avec ses autres activités, explique-t-il, en particulier ses études de médecine qu’il vient de débuter. Ce qui ne l’empêche pas de donner un petit coup de main supplémentaire lors d’événements ponctuels, comme des messes de confirmation ou des ventes de pâtisserie en vue de récoltes de fonds.

L’apprentissage de la solidarité

Né en Grande-Bretagne, d’une mère originaire de Singapour, «où le catholicisme est bien ancré dans la société», et d’un père d’origine indienne, Jean-Paul rejoint la Suisse avec ses parents en 2006. «Mes parents sont très croyants. La religion tient la place centrale dans notre foyer. Mon prénom d’ailleurs est lié en partie au pape Jean Paul II, qui s’est rendu à Singapour et avec qui ma mère a eu l’occasion d’échanger quelques mots.»

La famille s’établit à Veyrier, une commune genevoise située aux pieds du Salève, où Jean-Paul fréquente l’école primaire ›La Salesienne’ – un institut catholique longtemps dirigé par les sœurs de Don Bosco.

Veyrier, Genève: les frères Jean-Paul et James Aloysius, servants de messe | © Paul Aloysius

«Ce n’est pas une grande école, tout le monde se connaît. Il y règne aussi un esprit de solidarité. Les sœurs étaient très attentives, toujours prêtes à discuter avec chacun d’entre nous. Elles nous ont appris à aider ceux qui vivent des temps plus durs. J’avais un ami qui avait des difficultés scolaires, avec un léger syndrome d’autisme, un problème cardiaque et des parents en train de divorcer. Elles m’ont enseigné à être là pour lui, à me tenir à ses côtés, moi qui avais la chance d’avoir la santé et un foyer stable.»

Aujourd’hui, Jean-Paul est toujours encore en contact avec les sœurs de la communauté salésienne de Veyrier. Il participe parfois à la messe là-bas, mais pas en tant qu’enfant de chœur, car elles ont assez de volontaires pour cela, précise-t-il. «Par contre, elles m’appellent quand elles ont un problème ›technique’, avec l’un de leurs téléphones par exemple. Elles ne sont pas très habiles avec ce qui est technologique et c’est normal car c’est aussi une question de génération», souligne-t-il avec un petit rire.

Des cailloux et des anges sur le chemin

Pour ce jeune homme sociable, la vie communautaire est source de bien-être et toute mise à l’écart d’autant plus mal vécue. Il en fait la cruelle expérience à 13 ans, quand il intègre le Collège de Genève avec deux ans d’avance. Le décalage d’intérêt avec ses camarades est trop grand. «Ça a été un gros choc et je n’ai pas réussi à me faire beaucoup d’amis. J’étais isolé et c’était difficile.» L’échec scolaire s’en suit.

L’adolescent intègre alors l’École de culture générale, passe sa maturité en option santé, fait des stages dans le domaine hospitalier auprès d’un cardiologue… «C’est à travers mes échecs et deux années ›sabbatiques’ forcées que j’ai découvert que je voulais devenir médecin. J’y vois un signe de Dieu. Le chemin a pris un sens», déclare Jean-Paul. Ce sont aussi, du reste, deux rencontres effectuées durant de ce parcours scolaire un brin chaotique qui le mènent à s’engager à St-Joseph.

Marlène et Jérôme

«Marlène et Jérôme ont été les portes d’entrée de ma famille ici. Marlène est une prof d’anglais que j’ai eu à la Salésienne. Elle fréquentait l’église St-Joseph et elle a invité ma famille à découvrir la paroisse. Nous avons aimé la façon dont l’abbé Thierry Schelling (le curé modérateur de l’UP Eaux-Vives et Champel, et le répondant de Saint-Joseph: ndlr) exprime la foi. Il se rapporte toujours dans son homélie à des choses de la vie de tous les jours, faciles à comprendre et parlantes pour chacun. En plus, il y a une vraie communauté paroissiale ici. Les gens sont toujours prêts à s’entraider et il y a beaucoup de jeunes.»

Ce sentiment de former une communauté, Jean-Paul dit l’avoir aussi trouvé dans le groupe des enfants de chœur – ›Les ados du cœur’ – de la paroisse. Ils se retrouvent parfois en dehors des messes pour des activités de loisirs, en compagnie de l’abbé Schelling. «J’avais eu des cours de santé avec Jérôme, le plus vieux et expérimenté des enfants de chœur de St-Joseph. Il m’a repéré sur les bancs durant la messe. C’est grâce à lui que j’ai rejoint le groupe des servants de messe des Eaux-Vives. Cela me permet d’être actif durant la messe, de retrouver le samedi des visages connus et de prier avec la communauté.»

Pentecôte 2024: le sacristain de la paroisse St-Joseph de Genève (en haut) et les servants de messe de la paroisse, en habits traditionnels de leur pays, entourent l’abbé Thierry Schelling sur le parvis de l’Église. Ces bénévoles venus d’Inde, de Philippines, de Côte d’Ivoire, de Madagascar et du Cameroun reflètent la multiculturalité genevoise. | © Paroisse St-Joseph

Jean-Paul souligne encore, avec bonne humeur, comment ce service varie selon l’abbé auprès de qui il est effectué. «Nous servons l’abbé Thierry Schelling mais aussi l’abbé Karol Garbiec, qui fait les messes en polonais. Chaque prêtre a sa manière de faire, avec ses petites subtilités.» Quand c’est l’abbé Thierry, explique-t-il, les servants de messe portent par exemple l’Évangile lors de la procession d’entrée, ce qui n’est pas le cas avec l’abbé Karol. Ils sont aussi appelés à donner la communion, alors que l’abbé Karol ne recourt à eux que s’il n’y a pas assez de monde pour la donner.

Une marque de reconnaissance

Mais pourquoi donner de son temps à l’Église plutôt qu’à une association laïque? «Nous avons de la chance, nous vivons dans un pays stable, sans guerre. Faire du bénévolat, c’est une façon pour moi de rendre un peu tout ce que j’ai reçu de la société. Mes parents m’ont toujours enseigné que c’était important. Et si le fais en tant qu’enfant de chœur, c’est pour marquer ce que la foi me donne.»

«La foi m’a aidé pendant mes périodes plus difficiles, quand j’ai raté le collège par exemple, poursuit le jeune homme. Elle habite aussi de manière heureuse mon quotidien. Chaque soir, je fais une prière avant de dormir, et le matin, quand je me lève, je remercie Dieu de m’avoir donné cette journée.»

Un service rendu avec conviction

Combien de temps encore Jean-Paul image-t-il continuer à servir la messe ici, lui qui a déjà été dix ans enfant de chœur à la paroisse St-Nicolas de Flüe? «C’était long», glisse-t-il, avant d’enchaîner, «mais je remplissais ce rôle par tradition quand j’étais enfant. Aux Eaux-Vives, je le fais par conviction. Et il n’y a pas d’âge pour cette fonction. Pour l’instant, je continue, jusqu’à ce que la relève soit assurée en tout cas.» (cath.ch/lb)

Le bénévolat en Suisse a la cote
L’Observatoire du bénévolat en Suisse a été créé en 2002 à l’initiative de la Société suisse d’utilité publique. Il dresse régulièrement un état des lieux de l’engagement bénévole en Suisse, basé sur une large enquête. La dernière enquête date de 2020 et la prochaine aura lieu en 2025.
Le travail bénévole pris en compte comprend les activités non rémunérées en faveur d’une organisation, d’une association ou d’une institution publique (travail bénévole organisé) et les prestations non rémunérées fournies à titre volontaire à des personnes qui ne vivent pas dans le même ménage (travail bénévole informel).
Selon les chiffres relatifs à l’année 2020, et publiés par l’Office fédéral de la statistique, 41% de la population résidente permanente du pays de 15 ans et plus déclare avoir effectué du travail bénévole (organisé et/ou informel) au cours des 4 dernières semaines, à savoir près de 3 millions de personnes. En moyenne, elles ont accompli 4,1 heures de bénévolat par semaine.
Le travail bénévole organisé est plus souvent l’affaire des hommes, et l’informel celui des femmes, âgées de 55 à 74 ans en particulier. Le bénévolat est aussi plus pratiqué par les diplômés de degré tertiaire et par les habitants de Suisse alémanique.
Le bénévolat dans des institutions religieuses vient en 4e position, après les associations sportives, de loisirs et culturelles. Il est prioritairement l’apanage des femmes (près de 2 volontaires sur 3). LB

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Jean-Paul Aloysius, servant de messe à l'église St-Joseph, Genève | © Lucienne Bittar
6 décembre 2024 | 17:00
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