Assassinat au Chiapas du Père amérindien Marcelo Perez, défenseur de la paix
Un prêtre jésuite, maya tsotsil du Chiapas, au Mexique, a été assassiné le 20 octobre 2024. Le Père Marcelo Perez était connu pour son travail en faveur de la justice sociale et de médiation dans les conflits violents qui secouent la région. Il avait été nominé en 2020 pour le prix suédois «Per Anger 2020», qui récompense les personnes et les organisations œuvrant pour les droits de l’homme et la démocratie.
Une voix prophétique s’est tue au Mexique, celle du Père Marcelo Perez. Curé du district de Cuxtitali, à San Cristobal de las Casas, le prêtre a été victime d’une embuscade alors qu’il rentrait chez lui après avoir célébré une messe. Selon l’enquête en cours, deux hommes armés à moto ont atteint la voiture dans laquelle il se trouvait et l’ont abattu.
«Le Chiapas, une bombe à retardement»
Le Père Marcelo Perez était connu pour son travail en faveur de la justice et de la paix dans les communautés indigènes de la région. Il agissait comme médiateur lors des conflits récurrents qui secouent la région, où la violence et l’insécurité ont considérablement augmenté, rappelle l’agence Fides. «Le Chiapas est une bombe à retardement, il y a beaucoup de personnes disparues, kidnappées, tuées par le crime organisé», avait-il déclaré lors d’une interview le 13 septembre 2024, au cours d’un rassemblement pour la paix auquel participaient des paroissiens des trois diocèses du Chiapas.
Ce prêtre amérindien était victime depuis plusieurs années de campagne de diffamation en raison de ses dénonciations des actions des groupes armés qui luttent pour le contrôle de la région, comme à Pantelhó. Il avait reçu plusieurs menaces de mort. Sa tête avait même été mise à prix pour un million de pesos (environ 50’000 francs suisses). Le diocèse de San Cristóbal de las Casas avait alors décidé de le transférer de la paroisse de Simojovel à celle de Nuestra Señora de Guadalupe. Le prêtre avait néanmoins déclaré qu’il poursuivrait son travail pour la paix.
Un sacerdoce vécu auprès des plus vulnérables
Fils de parents paysans, Marcelo Perez est né dans la communauté de Chichelalhó, dans le Chiapas. Ordonné prêtre en 2002, il est a été d’abord curé de la paroisse de Chenalhó, où il a été en contact avec les survivants du massacre d’Acteal de 1997. Militant des droits de humains, il est resté en poste à Simojovel pendant plus de 10 ans.
Il a alors coordonné la pastorale sociale de la province du Chiapas et a soutenu des organisations et des groupes religieux indigènes, tout en organisant des pèlerinages et des activités sur la santé, la pauvreté et la violence à Simojovel.
Un des premiers indigènes tsotsils ordonnés par le cardinal Esquivel
Le cardinal Felipe Arizmendi Esquivel, évêque émérite de San Cristóbal de las Casas, a exprimé sa profonde tristesse. Le Père Marcelo Perez avait été un des premiers prêtres indigènes tsotsil qu’il avait ordonné, a-t-il rappelé. Selon le cardinal, le prêtre ne s’est jamais engagé dans la politique partisane, mais a toujours défendu le respect et la justice entre les communautés. «Il a lutté pour que les valeurs du Royaume de Dieu soient vivantes dans les communautés.»
Dans un communiqué, «a Compagnie de Jésus au Mexique a exprimé «sa plus ferme condamnation pour l’assassinat du Père Marcelo Perez, curé de l’église de Guadalupe à San Cristobal de Las Casas. (…) Le Père Marcelo est depuis des décennies un symbole de résistance et d’accompagnement pour les communautés du Chiapas, défendant la dignité, les droits du peuple et la construction d’une vraie paix. Son engagement pour la justice et la solidarité a fait de lui une référence pour ceux qui aspirent à un avenir sans violence ni oppression.»
Son assassinat «ne prive pas seulement la communauté d’un pasteur dévoué à son peuple, mais réduit également au silence une voix prophétique qui a lutté sans relâche pour la paix, la vérité et la justice dans la région du Chiapas» a souligné pour sa part la Conférence épiscopale mexicaine (CEM).
Les évêques demandent une enquête au gouvernement
Les évêques ont demandé aux autorités de mener «une enquête exhaustive et transparente pour élucider ce crime et rendre justice au Père Marcelo Perez», de mettre en œuvre «des mesures efficaces pour garantir la sécurité des prêtres et des agents pastoraux», et de redoubler «d’efforts pour combattre la violence et l’impunité qui sévissent dans la région du Chiapas» et dans le pays en général.
Les jésuites rejettent eux aussi «toute tentative de minimiser ces événements comme des cas isolés. Le crime organisé sème la peur et la douleur dans diverses régions du pays, et le Chiapas ne fait pas exception. La violence dans cette région reflète un problème structurel qui exige une réponse globale et urgente de la part de l’État.» (cath.ch/fides/com/lb)