Rome: Décès du cardinal Agostino Casaroli à l’âge de 83 ans
Ancien numéro 2 du Vatican et artisan de «l’Ostpolitik» romaine
Rome, 9 juin 1998 (APIC) Le cardinal Agostino Casaroli, numéro 2 du Vatican de 1979 à 1990, est décédé mardi à Rome à l’âge de 83 ans. Mgr Casaroli a été un des principaux artisans de «l’Ostpolitik» du Vatican dès les années 60 et jusqu’à la chute du communisme à la fin des années 80. Politicien réaliste, habile négociateur et diplomate, Agostino Casaroli avait néanmoins toujours su garder une âme de pasteur.
Le cardinal est mort un peu après minuit dans la nuit du 8 au 9 juin, des suites d’une infection ayant entraîné des «complications cardiaques et respiratoires», a indiqué la clinique romaine Columbus au correspondant de l’APIC à Rome. Le cardinal avait été hospitalisé au milieu de la semaine dernière.
Le pape Jean-Paul II a immédiatement rendu un hommage appuyé au défunt, comme à un «authentique témoin de l’Evangile», un «tisseur passionné de relations de paix entre les individus et les nations», qui a su faire «des pas courageux et significatifs en particulier pour améliorer la situation de l’Eglise dans l’est de l’Europe». Jean-Paul II évoque la «longue mission pastorale» du cardinal, son travail «fécond et infatigable» et en particulier comme son «étroit collaborateur» et celui de ses prédécesseurs Jean XXIII, Paul VI, et Jean-Paul Ier.
La mort du cardinal Casaroli tourne en effet une page importante dans la vie du Vatican. Avec lui disparaît l’homme de l’»Ostpolitik» du Saint-Siège, une politique qui a permis à Rome, préoccupée du sort des catholiques derrière le rideau de fer, de maintenir le lien avec les pays communistes de l’Est. Cette politique des petits pas et du compromis qui semblait s’accomoder du maintien à long terme des dictatures communistes a parfois été vertement critiqué.
Agostino Casaroli, que Jean Paul II a qualifié de «collaborateur sage et expérimenté», est né le 24 novembre 1914 à Castel San Giovanni, près de Plaisance, dans le nord de l’Italie. Ordonné prêtre en 1937, il entre dès 1940 aux archives de la secrétairie d’Etat dont le subsitut est alors Mgr Jean Baptiste Montini, futur Paul VI. En 1950, il est affecté à la section pour l’Amérique latine. En 1961, Jean XXIII le nomme sous-secrétaire de la Congrégation pour les Affaires ecclésiastiques extraordinaires – c’était alors le nom de la Secrétairerie d’Etat – pour les rapports avec les Etats.
A. Casaroli fait ses premiers pas dans l’»Ostpolitik» en avril 1963 lorsque le pape l’envoie en mission à Budapest et à Prague, en un temps de persécution pour l’Eglise catholique à l’Est dominé par la figure militante du cardinal Joseph Mindszenty, archevêque d’Esztergom et primat de Hongrie. En 1964, il obtient un premier succès avec la signature d’un accord avec la Hongrie; deux ans plus tard, un accord est passé avec la Yougoslavie, accord qui conduit à l’établissement de relations diplomatiques entières entre l’Etat de Tito et le Saint-Siège. Paul VI le nomme secrétaire de la Congrégation pour les Affaires ecclésiastiques extraordinaires et en 1967 «ministre des Affaires étrangères» du Vatican. Le diplomate nord-italien a effectué de très nombreuses visites dans les pays de l’Est. En 1971, notamment, il est au Kremlin pour signer le traité sur la non-prolifération des armes nucléaires. Il représente plus tard le Vatican à la Conférence pour sa sécurité et la coopération en Europe qui a aboutil aux accords d’Helsinki en 1975.
Jean Paul II le choisit le 28 avril 1979 comme son premier collaborateur en le nommant pro-secrétaire d’Etat (pro-, parce que Mgr Casaroli n’était pas encore cardinal). Le 1er juillet, après avoir été créé cardinal par Jean Paul II, il est nommé secrétaire d’Etat du Vatican, charge qu’il exercera durant plus de onze ans, un an au-delà de l’âge de la retraite fixé à 75 ans. Mgr Casaroli a été honoré de multiples récompense internationales, il était docteur honoris causa de nombreuses universités dans le monde entier.
Une présence sur tous les fronts
Durant son activité de Secrétaire d’Etat, Agustino Casaroli a été présent sur tous les fronts. Il a continué sur le chemin de l’ouverture à l’Est où ses efforts ont été couronnés de succès le 1er décembre 1989 par la rencontre au Vatican entre le chef du Kremlin Mikhaïl Gorbatchev et le pape Jean Paul II. Un année auparavant, en juin 1988, Mgr Casaroli avait été reçu au Kremlin par le chef de l’Etat soviétique. Mgr Casaroli a été également au premier rang lors de la guerre du Golfe. Resté actif au-delà de la retraite, Mgr Casaroli a été églament impliqué dans le processus qui a conduit a l’établissement de relations diplomatiques entre Israel et le Vatican.
Patient, souriant et impertubable, et excellent ployglotte, Mgr Casaroli connaissait pratiquement toutes les capitales du monde, il a églament pris à plusieurs reprises la parole l’assemblée générale des Nations Unies.
Sa vie, son œuvre et sa pensée ont été évoquées en 1993 dans un livre du journaliste italien Alceste Santini vaticaniste de l’Unita, le journal du parti communiste italien. En 1996, encore il avait choisi le moyen de la video pour raconter ses mémoires d’un demi-siècle de diplomatie vaticane. Il avait lui-même encore évoqué publiquement ces années d’activité diplomatique, le 22 novembre 1997, au Vatican, lors d’une cérémonie commémorative des 100 ans de la naissance de Paul VI: une de ses dernières grandes apparitions en public.
La dépouille mortelle du cardinal a été déposé dans l’église St-Etienne des Abyssiniens au Vatican. Ses funérailles sont prévues pour le vendredi 12 juin à 11h30, dans la basilique St-Pierre. (apic/mp)