Décès du cardinal allemand Paul Josef Cordes, un initiateur des JMJ
Le cardinal Paul Josef Cordes, président émérite du Conseil pontifical Cor Unum – l’organe qui supervisait l’action humanitaire de l’Église catholique jusqu’à sa dissolution en 2016 – est décédé le 15 mars 2024 à Rome, à 89 ans, indique la page allemande de Vatican News. Créé cardinal en 2007, il avait contribué au lancement des Journées mondiales de la jeunesse en 1984.
Né dans le diocèse de Paderborn le 5 septembre 1934, Paul Josef Cordes a étudié la médecine avant de rejoindre le séminaire de son diocèse. Durant sa formation, il a été détaché durant un an au séminaire universitaire de Lyon, en France, avant de recevoir l’ordination sacerdotale en 1961 pour le diocèse de Paderborn.
Après huit ans de service en paroisse, il a repris ses études de théologie dogmatique à l’université de Mayence, soutenant en 1971 une thèse sur Presbytorum Ordinis, le décret du Concile Vatican II sur les prêtres. L’année suivante, le cardinal Julius Döpfner, alors président de la conférence épiscopale allemande, l’a nommé président de la commission pastorale de l’épiscopat. Il fut ainsi de 1972 à 1975 l’un des acteurs clés du Synode des diocèses de l’Allemagne de l’Ouest (la République fédérale d’Allemagne étant alors séparée de l’Est, sous régime communiste), qui suscita le scepticisme d’un ami théologien qu’il retrouvera quelques années plus tard à Rome, l’abbé Joseph Ratzinger.
30 ans de service au Vatican
En octobre 1975, le pape Paul VI a nommé Mgr Cordes évêque auxiliaire de Paderborn. Il a reçu la consécration épiscopale le 1er février 1976. En 1980, Jean-Paul II l’a appelé à Rome comme vice-président du conseil pontifical pour les Laïcs. Il restera 15 ans à ce poste, auprès du cardinal italien Opilio Rossi jusqu’en 1984 puis du cardinal argentin Eduardo Pironio, qui a été béatifié en 2023.
Particulièrement chargé du suivi des communautés charismatiques, Mgr Cordes sera le promoteur du Centre international des jeunes San Lorenzo, inauguré en 1983, d’où naîtra l’organisation d’un rassemblement international des jeunes à l’occasion du dimanche des Rameaux 1984. Cette rencontre servira de «test» avant le lancement des Journées mondiales de la jeunesse.
Le 2 décembre 1995, Mgr Cordes a été promu archevêque, devenant président du Conseil pontifical Cor Unum. Durant ses 15 ans de mandat, jusqu’en 2010, il effectuera de nombreux déplacements internationaux pour accompagner l’action humanitaire de l’Église, notamment avec le réseau des Caritas. Il fut créé cardinal par son compatriote allemand Benoît XVI lors du consistoire du 24 novembre 2007.
Lié par une amitié profonde avec le pape allemand, il collabora avec lui pour la rédaction des encycliques Deus Caritas est (2006) et Caritas in Veritate (2009), un texte sur la justice sociale élaboré dans le contexte de la crise économique mondiale. Signe de la complicité étonnante entre les deux hommes, Benoît XVI lui prêta ses lunettes lors du discours d’ouverture de l’assemblée plénière du conseil pontifical Cor Unum en 2008, en constatant que le cardinal Cordes avait oublié les siennes.
En mars 2013, il avait participé au conclave ayant mené à l’élection du pape François.
Très forte opposition aux orientations libérales du Synode allemand
Relativement effacé au début du pontificat de François, le cardinal Cordes était sorti de son silence pour dénoncer les positions libérales prises par le Chemin synodal allemand, y voyant un risque de «schisme». En 2021, dans un courrier adressé au site conservateur La Nuova Bussola Quotidiana, il avait pris la défense du document de l’alors congrégation pour la Doctrine de la foi interdisant les bénédictions de couples homosexuels, le présentant comme un signe de contradiction adressé aux théologiens libéraux allemands.
Revenant sur les écrits de saint Paul sur l’homosexualité, le cardinal écrivait que «seuls les flatteurs tentent d’adapter l’analyse et le verdict de condamnation de l’apôtre au courant contemporain». Il ajoutait que «l’exégèse catholique et protestante à la mode» ne fait que «jeter du sable dans les yeux». Contrairement à certaines organisations laïques catholiques allemandes, il estimait que l’Église devait assumer le «devoir urgent de ne pas nommer et proclamer la permissivité, mais les droits de Dieu».
Dans une lettre qu’il lui avait adressée en décembre 2021 à l’occasion de ses 60 ans de sacerdoce, Benoît XVI avait écrit que «le cardinal Cordes est connu de tous ceux qui participent à la vie de l’Église, surtout pour ses commentaires clairs dans les moments de confusion, avec lesquels il corrige ce qui est confus ou faux». Il le décrivait comme un «homme de décision définitive» qui «ne cherche pas la popularité» et ne renonce pas à «la clarté dans la lutte contre les opinions majoritaires», car «son critère de mesure n’est pas l’applaudissement du plus grand nombre, mais la foi de l’Église».
Dans son dernier entretien, publié le 8 janvier 2024 par ce même site, il a dénoncé «l’aveuglement criminel» des responsables de l’Église en Allemagne qui avaient esquivé la lettre de Benoit XVI sur les abus publié en 2019. Les acteurs du Chemin synodal allemand se sont contentés de réagir au «déclin» de l’Église avec, selon lui, une «superficialité qui ne pouvait absolument pas convaincre et encore moins satisfaire Joseph Ratzinger». (cath.ch/imedia/cv/gr)