Les évêques pro-Trump ignorent le danger pour la démocratie

Le soutien de nombreux évêques catholiques américains à Donald Trump, qui brigue un nouveau mandat à la présidence des Etats-Unis inquiète le théologien Massimo Faggioli. Trop focalisés sur la question de l’avortement, ils ignorent le danger pour la démocratie, déplore-t-il.

Donald Trump pourrait bientôt redevenir président des Etats-Unis. Cette éventualité représente un énorme danger pour la démocratie, estime Massimo Faggioli. Pour le le professeur de théologie à l’université Villanova (Pennsylvanie), de nombreux évêques n’ont d’yeux que pour l’avortement. Il leur manque la capacité de comprendre et d’analyser ce qui se passe dans le monde et à quel point la démocratie est menacée aux Etats-Unis, a-t-il expliqué, le 28 février 2024 aux journaux du groupe allemand Bistumspresse.

Le soutien à Donald Trump «malgré ses mensonges et son agitation» surprend le professeur américain. L’Eglise catholique américaine est divisée. «Environ la moitié vote démocrate, environ la moitié républicain. Les catholiques blancs votent plutôt républicain, les catholiques non-blancs plutôt démocrate».

Parti anti-avortement

Le fait que la conférence épiscopale américaine a placé la question de l’avortement comme thème prioritaire est «évidemment un message interprété comme un soutien aux républicains, considérés comme un parti anti-avortement.»

En nommant trois juges conservateurs à la Cour suprême, lors de sa première présidence le baptiste Donald Trump y a également contribué. La Cour a invalidé, en 2022, l’arrêt Roe vs Wade autorisant l’interruption de grossesse dans l’ensemble des Etats-Unis. Depuis lors, la décision concernant le droit à l’avortement revient à chaque Etat. Plusieurs Etats ont réduit ou interdit l’avortement, tandis que d’autres ont totalement libéralisé sa pratique sans délais ni conditions.

En face Joe Biden, bien que catholique, a fait du droit fédéral à l’avortement un des ses chevaux de bataille. Les catholiques et les évêques qui considèrent l’avortement comme le sujet numéro un sont donc favorables à Trump, explique M. Faggioli. «Une minorité d’évêques, en revanche, voit d’un œil sceptique la focalisation sur ce seul sujet et se demande aussi si les avortements ne pourraient pas être beaucoup mieux évités par une meilleure politique sociale et familiale».

Un danger pour la démocratie

Lors de l’élection de 2016 et pendant la présidence de Trump, les catholiques ne savaient évidemment pas qu’il «tenterait après les élections de falsifier le résultat, de répandre des mensonges et des mythes de conspiration sur l’élection de Joe Biden et de lancer un coup contre la démocratie», ajoute le théologien.

Mais pour les évêques qui soutenaient déjà Trump il y a quatre ans, cela ne semble pas avoir d’importance. Les attaques de Trump «ne font aucune différence à leurs yeux, ni à ceux de nombreux catholiques. C’est choquant».

De nombreux évêques ne voient pas en Trump la solution, mais le considèrent comme plus crédible que Joe Biden: «Ils savent que Donald Trump est corrompu et qu’il n’est pas chrétien. Mais ils espèrent qu’il pourra briser le système actuel, qui leur est devenu étranger».

Pour le professeur, la conférence épiscopale américaine est «une collection d’administrateurs d’églises locales qui font un travail purement administratif. Beaucoup d’évêques n’ont pas la capacité de comprendre et d’analyser intellectuellement ce qui se passe dans le monde et à quel point la démocratie est en danger». (cath.ch/kna/mp)