Ce que les mots de «Laudate Deum» disent de la volonté du pape
«Plus», «pouvoir», «monde» ou encore «nous» sont les mots qui reviennent le plus dans l’exhortation apostolique Laudate Deum, publiée le 4 octobre 2023. Afin de proposer une autre lecture de ce texte de 26 pages, I.MEDIA a sélectionné et remis dans leur contexte et analysé les occurrences de ce texte, en les comparant notamment à celle de l’encyclique Laudato si’.
«Plus»: 65 occurrences
Comme dans Laudato si’, le terme le plus récurent est l’adverbe «plus». Le pape demande plus d’action dans un monde où «l’impact du changement climatique sera de plus en plus préjudiciable à la vie». Il souligne la situation des pays les plus favorisés et des plus défavorisés, considérant que la situation est «plus urgente» aujourd’hui que jamais alors que les manifestations du dérèglement climatique se font plus visibles.
«Pouvoir» (et dérivés): 53 occurrences
Le pontife consacre une grande partie de son texte à dénoncer une obsession contemporaine, celle d’«22. accroître au-delà de l’imaginable le pouvoir de l’homme». Il invite à «repenser» l’usage du pouvoir dans le monde moderne, notamment au niveau multilatéral pour sortir du paradigme d’un « pouvoir grandissant». Comme dans Laudato si’, il s’agit de la seconde occurrence lexicale la plus récurrente, signe d’un texte tourné entièrement vers les potentialités d’action qu’implique l’urgence climatique pour l’humanité.
«Humain» (et dérivés): 45 occurrences
Comme dans Laudato si’ (3e occurrence), le pape met en garde contre les projets contemporains qui prône un «humain qui prétend prendre la place de Dieu», fruit du «paradigme technocratique». «L’homme est nu, exposé à son propre pouvoir», met-il en garde, invitant à le considérer comme partie prenante de la Création plutôt que de le nier par volonté d’un pouvoir illimité.
«Monde» (et dérivés): 43 occurrences
Le «monde qui nous entoure» mais «qui s’effrite», est comme dans Laudato si’ (le 5e le plus employé), un des objets centraux du texte. L’importance de la dimension mondiale semble même accentuée dans Laudate Deum, le pape plaçant sa réflexion écologique à une échelle plus globale et politique qu’individuelle et spirituelle. «Les solutions les plus efficaces ne viendront pas seulement d’efforts individuels, mais avant tout des grandes décisions de politique nationale et internationale», insiste ainsi le pape. Il invite à ne pas comprendre le monde, devenu «multipolaire», comme un «objet d’exploitation», mais comme une «zone de contact» dont il faut prendre soin.
«Nous» (et dérivés): 30 occurrences
Plus encore que dans Laudato si’ où la troisième personne du pluriel était déjà omniprésente – 6e occurrence lexicale la plus fréquente – le pape adopte une attitude inclusive pour évoquer la question écologique. «Nous et tous les êtres de l’univers, sommes unis par des liens invisibles», insiste-t-il. Le texte est d’ailleurs adressé uniquement «à toute les personnes de bonne volonté», s’affranchissant de la dimension ecclésiale et spirituelle qui était centrale dans Laudato si’.
«Changement» et «climatique»: 21 occurrences
Alors que ces deux termes ne faisaient pas partie des occurrences les plus fréquentes dans Laudato si’, le problème du changement climatique est au cœur de cette exhortation apostolique, qui aborde notamment sa perception dans la société et dans l’Église. «L’impact du changement climatique sera de plus en plus préjudiciable à la vie et aux familles de nombreuses personnes», met en garde le pontife, le décrivant à nouveau comme un des principaux défis pour l’humanité. C’est pourquoi l’urgence climatique réclame un «changement culturel».
«Pays»: 21 occurrences
Le texte Laudate Deum s’adresse plus aux pays qu’aux individus, insistant sur l’obligation d’un changement d’approche sur le plan multilatéral. Le terme «pays», qui ne faisait pas partie des occurrences les plus importantes de Laudato si’, permet aussi au pape de distinguer les défis qui opposent pays pauvres et pays riches, insistant en particulier sur la grande responsabilité de ces derniers.
«Vie»: 18 occurrences
Comme dans Laudato si’ (7e occurrence), le terme «vie» revient à de nombreuses reprises dans Laudate Deum. Le pape souligne les dangers que pose la crise climatique pour la vie de nombreuses personnes et de nombreux êtres vivants. «La vie humaine est incompréhensible et insoutenable sans les autres créatures», insiste-t-il. Il demande en conséquence une évolution urgente des modes de vie.
«2023»: 13 occurrences
Laudate Deum est un texte particulièrement ancré dans le présent, en s’appuyant notamment sur les derniers rapports d’experts scientifiques pour expliquer l’urgence climatique. Alors que Laudato si’ apporte une réflexion spirituelle intemporelle sur le rapport des sociétés humaines à leur environnement, l’exhortation apostolique semble toute tournée vers l’échéance de la COP28 de Dubaï, demandant qu’elle soit «historique».
«Temps»: 12 occurrences
Huit ans après Laudato si’, le pape confie s’être rendu «compte au fil du temps que nos réactions sont insuffisantes». Insistant sur l’urgence actuelle, il affirme que l’humanité a «tout juste le temps d’éviter des dégâts plus dramatiques» et doit donc réagir «à temps».
Les autres termes clés
Parmi les termes qui reviennent régulièrement, on retrouve celui de «personnes», dont l’avenir est en jeu, celui de «terre» ou encore celui de «COP», dont le pontife fait le bilan. Le terme de «Dieu» apparaît seulement dix fois dans l’exhortation apostolique, là où il était le quatrième terme le plus employé dans Laudato si’ (avec 173 occurrences, ce texte étant tout de fois beaucoup plus long). Autres termes moins récurrents: ceux de «nature», d’«environnement» ou de «développement», signe d’un texte moins contemplatif et plus tourné vers l’action immédiate. (cath.ch/imedia/cd/bh)
Huit ans après la publication de l’encyclique "Laudato si’", le pape François presse les dirigeants du monde à agir face à l’urgence du réchauffement climatique, dans l’exhortation apostolique "Laudate Deum", publiée ce 4 octobre 2023.