Le réseau clunisien, l’internet du Moyen Âge 1/6
La nouvelle exposition CLUNY #TOUSCONNECTÉS, à l’abbatiale de Payerne, met en valeur le réseau formé par les sites liés à la célèbre abbaye française. L’occasion pour cath.ch d’annoncer sa série d’été, qui fera découvrir diverses étapes de la «Via Cluny» en Suisse romande.
«Comment tous ces moines clunisiens ont-ils réussi à rester connectés les uns aux autres, sans les solutions offertes par nos réseaux de communication, de transport et d’information modernes?» Telle est l’une des questions auxquelles répond l’exposition CLUNY #TOUSCONNECTÉS, le réseau des sites clunisiens au Moyen Âge dont le vernissage a eu lieu le 16 juin 2023 à l’abbatiale de Payerne. Le complexe ecclésial du nord vaudois a en effet été une pièce maîtresse de ce réseau, du 10e siècle au 16e, époque où elle est passée à la Réforme protestante. En Suisse romande, ce réseau connectait d’autres sites bien connus tels que l’abbaye de Romainmôtier (VD), l’église de Montcherand (VD), ou encore le temple de Corcelles (NE).
Le réseau au Patrimoine mondial?
«Pour cet été, nous avons choisi de mettre l’accent sur le réseau clunisien afin mettre en valeur cet héritage encore quelque peu ignoré», explique Anne-Gaëlle Villet, directrice-conservatrice du Musée de l’abbatiale, qui fait visiter l’exposition à cath.ch. L’événement se place aussi dans le cadre de la candidature du réseau clunisien au patrimoine mondial de l’UNESCO, lancée en 2023. «Nous sommes persuadés que le réseau clunisien a toute sa place dans le patrimoine mondiale, au vu notamment de son importance dans l’histoire de l’Europe», relève la directrice du musée. «Les sites clunisiens constituent un système reconnaissable de monastères et de lieux (…) qui se sont répandus dans toute l’Europe du 10e au 18e siècle, et qui ont exercé une influence notable sur la religiosité et la culture de l’Europe, ainsi que sur sa politique et celle de ses Etats en formation», assure ainsi le site de la candidature du réseau clunisien.
L’abbaye de Cluny est une abbaye bénédictine en Bourgogne-Franche-Comté. Elle a été fondée en 910 (ou 909) par le duc d’Aquitaine et comte d’Auvergne Guillaume Ier. Devenue le symbole du renouveau monastique en Occident, Cluny fut un foyer de réforme de la règle bénédictine et un centre intellectuel de premier plan au Moyen Âge classique.
Moines et «Fashion»
Pour faire connaître au public cette réalité, de grands panneaux explicatifs ont été disposés à l’entrée de l’abbatiale de Payerne et le long des majestueuses colonnades. L’exposition se veut discrète, pour ne pas gêner les autres manifestations qui ont lieu dans l’église. «Il fallait qu’elle se fonde dans le décor», précise Anne-Gaëlle Villet. Les panneaux sont de diverses couleurs, en fonction de différents thèmes développés, tels que l’histoire de Cluny, les sites clunisiens en Suisse, ou encore la comparaison ‘avant-maintenant’.
Dans cette dernière section, un panneau intitulé «FASHION» explique: «Même en dehors de leur monastère, l’habillement est un moyen pour les moines d’affirmer visuellement leur appartenance à la communauté de Cluny et constitue donc un élément identitaire fort…Mais au Moyen Âge, pas de logos de marques, pas de grands couturiers, pas de défilés de mode pour montrer les nouvelles tendances».
«Nous avons voulu faire le lien entre des éléments des sites clunisiens, notamment de la vie de moines, et des aspects familiers de notre monde actuel», remarque Anne-Gaëlle Villet. «Les visiteurs peuvent ainsi mieux entrer dans le sujet, et se rendre compte de tout ce que nous avons à disposition aujourd’hui.» Cet aspect ludique vise en particulier à attirer un public plus diversifié et plus jeune.
Une exposition «rassembleuse»
L’exposition met en lumière les similitudes entre le réseau clunisien, qui reliait l’abbaye-mère de Bourgogne à des centaines d’autres lieux en Europe et même jusqu’en Terre Sainte, et les réseaux électroniques actuels. «Les moines s’échangeaient beaucoup d’informations entre les différents sites, dans tous les domaines de la vie de l’époque. Le paradoxe était qu’en étant reclus dans leurs monastères, ils étaient plus informés sur ce qu’il se passait dans le monde que la population en dehors des murs, qui était libre de voyager. En fait, c’était un peu l’ancêtre d’internet.»
Un réseau de partage de connaissances et de biens qui a façonné l’Europe, eu égard au très important rayonnement de Cluny au Moyen Âge. «Mais c’est une réalité qui n’appartient pas seulement au passé, note la directrice-conservatrice. Car aujourd’hui encore, les sites clunisiens entretiennent d’étroites relations, notamment en Suisse romande.» Une Association des sites clunisiens de Suisse a ainsi été créée en 2022, qui s’engage bien sûr pleinement pour la candidature à l’UNESCO. «L’exposition est une démarche de rassemblement, assure Anne-Gaëlle Villet. Outre un renforcement des liens entre les sites clunisiens, notre but est d’associer la population payernoise à la candidature, ainsi qu’au patrimoine si riche et significatif que représente l’abbatiale.» (cath.ch/rz)
L’exposition ‘CLUNY #TOUSCONNECTÉS, le réseau des sites clunisiens au Moyen Âge’ est visible jusqu’au 18 février 2024 à l’abbatiale de Payerne.
cath.ch sur la «Via Cluny»
En Suisse, neuf monastères médiévaux étaient aussi directement dépendants de Cluny. Plusieurs d’entre eux sont encore aujourd’hui des lieux préservés et visitables. Cet été, cath.ch vous propose de retrouver, dans une série d’articles, neuf étapes de la «Via Cluny», un itinéraire lancé depuis quelques années par l’abbaye de Romainmôtier. En texte et photos, le lecteur pourra découvrir les chemins reliant deux sites clunisiens de Suisse occidentale et une visite «guidée» des lieux. RZ
La via Cluny en Suisse romande
La nouvelle exposition CLUNY #TOUSCONNECTÉS, à l’abbatiale de Payerne, met en valeur le réseau formé par les sites liés à la célèbre abbaye française. L’occasion pour cath.ch de vous proposer sa série d’été, qui fera découvrir diverses étapes de la «Via Cluny» en Suisse romande.