Evangile de dimanche: la promesse est tenue
Mgr Paul Desfarges, ancien archevêque d’Alger, vient de publier un livre auquel il a donné ce titre étonnant: Une Église dans la mangeoire1. Ce témoignage bouleversant nous fait entrer au cœur de l’Église qui est en Algérie. Son histoire contemporaine évoque, en raison des tensions politiques, sa vulnérabilité et sa faiblesse.
Le prix du sang des martyrs dont les moines de Tibhirine et Mgr Pierre Claverie, évêque d’Oran, pour ne citer que ses figures, exprime à la fois la violence et comme en contraste la fidélité sans mesure de ces femmes et de ces hommes en mission dans le pays. Bouleversant ce témoignage! Page après page, Paul Desfarges nous saisit la main pour nous conduire comme un père au cœur même de l’Évangile. «Après presque cinquante années, j’entends encore cette question si souvent posée: qu’est-ce que vous faites en Algérie? Une fois j’avais répondu simplement: j’apprends à aimer. Est-il si difficile de croire à la vocation d’une Eglise qui n’a d’autre raison d’être et donc en mission que d’aimer ceux et celles au milieu desquels elle vit? Pour nous sauver, le Christ n’a rien fait d’autre que venir nous aimer… jusqu’à l’extrême. Toute la vie de Jésus se résume dans cette phrase de l’évangile de Jean: ‘Ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, il les aima jusqu’à l’extrême’(Jn 13,1).»2
La force de cette Église puise ses énergies dans la rencontre de l’autre, tel qu’il est. Ouverte au dialogue, elle vit de l’Esprit-Saint et travaille sans relâche à l’unité en prenant soin de l’humain dans le respect absolu. Il faut lire ces pages pour discerner et comprendre aujourd’hui la mission de nos communautés. L’Église dans la mangeoire a de quoi nourrir notre foi et notre espérance en demeurant dans la confiance et la paix.
«Ce n’est pas la religion et la pratique qui sauvent. Dieu seul sauve et il sauve en se donnant et c’est sans conditions, car il aime.»
Mgr Paul Desfarges
D’ailleurs, n’est-ce pas le sens de l’Évangile de ce dimanche? Il n’est nullement question d’une échappée mystique en se calfeutrant dans une spiritualité sclérosée. Il s’agit bien du concret de chacune de nos vies, comme une sorte de mode d’emploi, pour garder au cœur la brûlure de la présence du Ressuscité. Tout part de l’amour, nous dit Jésus. «Si vous m’aimez, vous garderez mes commandements. Moi, je prierai le Père, et il vous donnera un autre Défenseur qui sera pour toujours avec vous: l’Esprit de vérité, lui que le monde ne peut recevoir, car il ne le voit pas et ne le connaît pas.»
Cette promesse de Jésus nous révèle notre identité profonde. En accueillant l’amour inconditionnel et unique de Dieu, chacune et chacun fait l’expérience de la présence de l’Esprit en lui et en elle. Et vivre de cet Esprit, c’est apprendre à se dessaisir pour aimer en toute vérité. Le oui de la foi permet alors à la vie divine de venir nous habiter. Permettez-moi encore de citer Paul Desfarges: «Ce n’est pas la religion et la pratique qui sauvent. Dieu seul sauve et il sauve en se donnant et c’est sans conditions, car il aime. La religion, les religions peuvent aider à se disposer à accueillir cet Amour et à s’y abandonner. Elles peuvent aussi empêcher, freiner, parfois faire obstacle. Le seul chemin est celui de l’abandon confiant et cet abandon peut exister en dehors de la religion. (…) La qualité de notre relation à Dieu se donne à voir dans notre humanité, dans la qualité de l’humain en nous, plus que dans nos pratiques religieuses. Dieu se donne à voir dans l’humain enfin humain.»3
Or, il n’y a que l’amour qui rend humain.
Bernard Miserez | Venrdedi 12 mai 2023
1 Paul Desfarges, Une Église dans la mangeoire, Mediaspaul, 2022
2Idem, p 129
3Idem, pp 95-96
Jn 14, 15-21
En ce temps-là,
Jésus disait à ses disciples :
« Si vous m’aimez,
vous garderez mes commandements.
Moi, je prierai le Père,
et il vous donnera un autre Défenseur
qui sera pour toujours avec vous :
l’Esprit de vérité,
lui que le monde ne peut recevoir,
car il ne le voit pas et ne le connaît pas ;
vous, vous le connaissez,
car il demeure auprès de vous,
et il sera en vous.
Je ne vous laisserai pas orphelins,
je reviens vers vous.
D’ici peu de temps, le monde ne me verra plus,
mais vous, vous me verrez vivant,
et vous vivrez aussi.
En ce jour-là, vous reconnaîtrez
que je suis en mon Père,
que vous êtes en moi,
et moi en vous.
Celui qui reçoit mes commandements et les garde,
c’est celui-là qui m’aime ;
et celui qui m’aime
sera aimé de mon Père ;
moi aussi, je l’aimerai,
et je me manifesterai à lui. »
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