La fumée s'élève au-dessus de la ville pendant les combats entre l'armée soudanaise et les paramilitaires des Forces de soutien rapide (RSF) à Khartoum, au Soudan, le 19 avril 2023 | © Keystone/EPA
International

Le Soudan plongé dans la violence

Depuis le 15 avril 2023, les combats opposant l’armée soudanaise et les groupes paramilitaires ont plongé le Soudan dans une véritable guérilla urbaine. À Khartoum, la capitale, les échanges de tirs sont quotidiens terrorisent les civils contraints de se terrer chez eux.

«Nous sommes tous enfermés dans nos maisons et on nous a conseillé de ne pas sortir. Les balles et les bombes arrivent de partout », confie une source anonyme à l’agence Fides. Une trêve était prévue le 18 avril à partir de 18h et jusqu’à 6 heures le lendemain, mais elle n’a pas été respectée.

Bombardements incessants

Il y a également eu des bombardements toute la nuit dernière et ce matin. Il semble y avoir une accalmie, «mais nous savons que cela va durer longtemps et que ce n’est pas près de s’arrêter. Les deux généraux n’ont pas l’intention de perdre leur poste». Les religieux et les religieuses sont dispersés dans les différentes communautés et, selon leur proximité avec le palais présidentiel assiégé ou avec l’aéroport, ils se trouvent tous dans des zones à très haut risque.

«Il ne reste plus qu’à prier, à prier fort pour qu’ils parviennent à un accord. Nous prions pour ce peuple afin que le Seigneur protège ces personnes qui souffrent le plus. Malheureusement, nous ne pouvons aider personne et c’est là la véritable tragédie. Dans les banlieues de Khartoum en particulier, les gens ont faim et ne peuvent rien acheter à manger. Tous les commerces sont fermés. Il n’y a personne dans les rues, seulement le bruit des bombes», précisent les témoins apeurés.

Au moins 200 morts et 2000 blessés

Le pays en est à son cinquième jour de guerre civile. Chaque camp: les troupes du  commandant en chef Abdel Fattah Al Burhane, et les forces d’intervention rapide (RSF) du général Mohamed Hamdane Daglo, dit «Hemetti», s’accusent mutuellement de violer le cessez-le-feu prévu pour permettre à la population de s’approvisionner en nourriture et d’évacuer les blessés. L’ONU a déjà dressé un bilan de plus de 200 morts à Khartoum et près de 2000 blessés, mais il reste difficile d’avoir des chiffres exacts. 

Des chasseurs et des hélicoptères de l’armée survolent la capitale et des unités antiaériennes répondent depuis le sol. La presse locale rapporte que de nombreux hôpitaux de Khartoum sont hors service en raison des tirs d’artillerie à proximité ou de leur utilisation comme quartier général militaire.

Les appels lancés par le syndicat des médecins (Ccsd) sont restés lettre morte. Sur les 59 hôpitaux de base de la capitale et des États fédéraux soudanais adjacents aux zones de conflit, 39 sont «hors service»: neuf parce qu’ils ont été bombardés et 16 après avoir été évacués de force», rapporte le Ccsd, ajoutant que dans la même zone de conflit, 20 autres hôpitaux «risquent d’être fermés en raison du manque de personnel médical» et de divers types de fournitures, y compris l’électricité.

La situation de la population est dramatique. Des attaques de magasins par des hommes armés ont été enregistrées. Les deux belligérants ne sont pas intéressés par une trêve et ont l’intention de résoudre le conflit militairement. Les combats se déroulent à l’intérieur des maisons et le risque est celui d’une guérilla urbaine de longue durée.

Des rivalités anciennes

Malgré les appels au calme de la communauté internationale, l’affrontement entre les deux hommes forts du pays semblait inévitable tant le climat s’était dégradé, rappelle Vatican News. Le duo était arrivé au pouvoir après le coup d’État du 25 octobre 2021 qui a mis fin à une période de cohabitation avec un pouvoir civil, consécutive à la chute de l’ancien dictateur Omal Al Béchir. 

Mis sous pression par la rue mais aussi par les bailleurs de fonds du Soudan, conditionnant son aide au retour d’un pouvoir civil à Khartoum, les militaires soudanais ont signé le 5 décembre dernier un accord sous les auspices de l’ONU. Mais plutôt que d’envisager l’avenir, le pacte entre militaires a au contraire aiguisé les rivalités. Parmi les points de ruptures entre Al Burhane et Hemetti figuraient notamment la question de l’intégration des FSR à l’armée régulière. 

Mais ce conflit est aussi le produit de rivalités anciennes entre deux hommes dont l’influence a grandi durant l’ère Al Béchir, et qui ont su, comme l’appareil sécuritaire soudanais, mettre la main sur des pans entiers de l’économie du pays.

En marge de la prière du Regina Caeli, le 16 avril dernier, le pape a demandé à ce que les combats cessent entre les deux armées rivales. «Je suis avec préoccupation les événements qui se déroulent au Soudan. Je suis proche du peuple soudanais, déjà tant éprouvé, et je l’invite à prier pour que les armes soient déposées et que le dialogue prévale, pour reprendre ensemble le chemin de la paix et de la concorde», a-t-il exhorté. (cath.ch/fides/vatnews/bh)

La fumée s'élève au-dessus de la ville pendant les combats entre l'armée soudanaise et les paramilitaires des Forces de soutien rapide (RSF) à Khartoum, au Soudan, le 19 avril 2023 | © Keystone/EPA
19 avril 2023 | 17:37
par Bernard Hallet
Temps de lecture : env. 3  min.
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