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Mgr Gallagher: l'accord Chine-Vatican n'est pas «le meilleur possible»

Mgr Paul Richard Gallagher, le ministre des Affaires étrangères du Vatican a déclaré que l’accord entre le Vatican et la Chine n’était pas «le meilleur accord possible» et que des négociations étaient en cours pour le rendre «plus efficace», rapporte Catholic news Agency (CNA) le 15 mars 2023. Il a confirmé que des négociations sont en cours pour la nomination d’évêques.

Dans une interview avec Colm Flynn pour EWTN News, Mgr Paul Richard Gallagher, secrétaire du Vatican pour les relations avec les États, a déclaré que les diplomates du Saint-Siège «négocient des améliorations» à l’accord provisoire du Saint-Siège avec Pékin sur la nomination des évêques, signé pour la première fois en 2018.

«Évidemment, l’objectif est d’obtenir le meilleur accord possible, ce qui n’est certainement pas le cas de cet accord à cause de l’autre partie: elle n’était prête à aller que jusqu’à un certain point et à accepter certaines choses. Mais c’était ce qui était possible à l’époque», a déclaré Mgr Gallagher. L’aveu est plutôt rare de la part d’un diplomate de haut rang en exercice, qui plus est quand il s’agit du secrétaire pour les relations avec les États.

Un accord issu d’un long processus

«Le moment n’était pas vraiment propice à la signature de l’accord, pour diverses raisons. Il allait toujours être difficile; il allait toujours être utilisé par le parti chinois pour accroître la pression sur la communauté catholique, en particulier sur ce que l’on appelle ‘l’Église clandestine’. Nous sommes donc allés de l’avant». Mgr Gallagher, qui n’a pas été directement impliqué dans les négociations, a souligné que l’accord avec la Chine, renouvelé deux fois au cours des cinq dernières années, était issu d’un processus d’une durée de 30 ans étalé sur trois pontificats. «La majeure partie de l’accord avait déjà été convenue et acceptée par le Saint-Siège et les autorités chinoises à l’époque du pape Benoît XVI», a-t-il déclaré.

Mgr Gallagher a déclaré qu’il pensait que le Vatican et les autorités chinoises avaient acquis «une meilleure compréhension et un plus grand respect» l’un pour l’autre au fil des ans. «Tout se fait évidemment dans le contexte de la politique intérieure chinoise… Et par conséquent, nous ne pouvons pas faire grand-chose.»

Le 10 mars 2023, Xi Jinping a été réélu pour un troisième mandat présidentiel lors d’une session parlementaire du Congrès national du peuple. L’assemblée a voté à l’unanimité en sa faveur lors d’une élection où il n’y avait pas d’autres candidats. L’Assemblée nationale populaire avait précédemment confirmé un changement constitutionnel supprimant la limitation des mandats, accordant en 2018 au président de la république populaire la possibilité de gouverner à vie. Cela, six mois avant que le Saint-Siège ne signe pour la première fois son accord avec Pékin.

Seuls six évêques ont été nommés depuis 2018 et le Vatican a reconnu plusieurs évêques ordonnés «illicitement» par la Chine. Selon les rapports, plus de 40 diocèses en Chine restent sans évêques.

L’accord, dont les dispositions n’ont jamais été rendues publiques, s’est heurté à une forte opposition de la part de certains dirigeants de l’Église et des catholiques chinois, qui l’ont qualifié de «trahison» des catholiques clandestins. Divers critiques affirment que l’accord ne tient pas compte des souffrances qu’ils ont endurées pour être loyaux envers le Vatican.

Détérioration de la liberté religieuse

Sous la direction du président chinois, le respect des droits de l’homme et de la liberté religieuse s’est détérioré et a fait l’objet d’une condamnation internationale croissante pour la persécution brutale des musulmans ouïghours dans la région du Xinjiang, au nord-ouest de la Chine. Les fonctionnaires de l’État ont enlevé des croix et démoli des églises et des bâtiments paroissiaux dans différentes régions de la Chine.

En novembre 2022, le Vatican a déclaré que les autorités chinoises avaient violé les conditions stipulées dans son accord sur la nomination des évêques. Dans une déclaration publiée le 26 novembre dernier, le Saint-Siège a en effet noté avec «surprise et regret» que l’évêque Mgr John Peng Weizhao avait été installé comme «évêque auxiliaire de Jiangxi», un diocèse qui n’est pas reconnu par le Vatican.

Récemment, le gouvernement du Henan a publié une circulaire demandant aux croyants de toutes les religions de s’enregistrer en ligne pour pouvoir assister aux célébrations dans les lieux de culte. Utilisant une application appelée «Smart Religion», ils doivent déclarer leurs informations personnelles. «Le Saint-Siège espère que de tels épisodes ne se reproduiront pas, attend les communications appropriées des autorités à ce sujet et réaffirme qu’il est tout à fait disposé à poursuivre le dialogue respectueux sur toutes les questions d’intérêt commun.»

Nominations d’évêques en cours de négociations

Dans l’interview accordée à EWTN, le secrétaire pour les relations avec les États a confirmé que «des négociations sont en cours pour la nomination d’autres évêques» et reste déterminé à poursuivre le dialogue.

Interrogé sur ce qu’il considère comme les plus grands défis diplomatiques actuels, Mgr Gallagher a déclaré que la guerre en Ukraine, le changement climatique, les conflits au Moyen-Orient, dans certaines régions d’Afrique et la déstabilisation de l’Amérique latine sont les principaux problèmes auxquels la communauté internationale est confrontée.

«Mais l’une des choses que les Chinois, l’Église catholique et le Saint-Siège ont en commun, c’est que nous ne pensons pas en mois, ni même en années. Nous pensons à beaucoup plus long terme. Et nous espérons qu’avec le temps, les relations entre l’Église catholique et la Chine seront, disons, beaucoup plus ‘normales’, beaucoup plus fluides, beaucoup plus fructueuses», a-t-il déclaré. Les observateurs affirment qu’à long terme, le Vatican vise à rétablir des liens diplomatiques formels avec la Chine. (cath.ch/cna/ucanews/bh)

Relations difficiles
Le Vatican et la Chine ont rompu leurs relations diplomatiques officielles en 1949, après la prise du pouvoir par les communistes. Depuis lors, la nomination des évêques catholiques est devenue une pomme de discorde entre la Chine et le Vatican.
Les problèmes se sont intensifiés après la création par le parti communiste chinois, en 1957, de l’Association patriotique catholique chinoise, un organe chargé par l’État de superviser l’Église catholique en Chine.
L’association a commencé à nommer des évêques sans l’accord du Vatican. Les membres du clergé qui ont refusé de se conformer aux règles et aux ordres de l’État ont continué à être harcelés, à subir des disparitions forcées et à être assignés à résidence. Des millions de catholiques ont refusé de rejoindre l’»Église patriotique» et sont restés fidèles au pape malgré les persécutions des autorités. Ils ont fini par être connus sous le nom d’»église clandestine». BH

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15 mars 2023 | 14:11
par Bernard Hallet
Temps de lecture : env. 5  min.
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