Evangile de dimanche: Tel Père, tel Fils!
Ce dimanche, Jésus nous entraîne vers quelque chose d’inaccessible, voire d’impossible. «Aimez vos ennemis et priez pour ceux qui vous persécutent.» Cette invitation tend à menacer l’ordre du monde, vous en conviendrez, et le chemin proposé par le Christ semble ignorer ce que nous appelons la justice humaine.
Comment proclamer une telle parole dans les lieux où sévit la guerre? Que dire à toutes les victimes innocentes qui se voient dépouillées de tout dans les conflits trop nombreux sur la terre? Peut-on vraiment aller jusque-là, à aimer ses ennemis, quand ceux-ci ont mis à mort devant vous vos proches avec l’horreur innommable de la violence extrême? Comment aimer ses ennemis quand vous avez été abusé de toutes sortes de manière, dans votre enfance ou votre jeunesse, laissant à tout jamais des traces vives de meurtrissures? Il suffit d’ouvrir les yeux et les oreilles pour voir et entendre les victimes qui peuplent la terre. Démunies, plongées dans l’abîme de la terreur.
Et puis, à notre mesure, ces ennemis, celles et ceux qui nous empêchent de vivre, nous les connaissons bien. Parfois, nous leur en voulons d’être injustes avec nous, jaloux. Blessés par la calomnie, la méchanceté et le regard assassin de celles et de ceux qui ne nous aiment pas, nous avons déjà du mal à entrer dans la logique du pardon pour trouver la paix et la fraternité. Enfin, ces ennemis ne sont pas seulement à l’extérieur de nous. Nous savons bien qu’en nous aussi il peut y avoir une force néfaste.
«Parce que nous sommes de Dieu, aimés inconditionnellement, nous osons nous risquer, à notre tour, dans un amour semblable au sien.»
Mais alors aujourd’hui, si nous voulons suivre le Christ, comment entendre cette parole déconcertante? Serait-elle surhumaine? Jésus dévoile la logique de cet impossible. «Aimez vos ennemis et priez pour ceux qui vous persécutent, afin d’être vraiment les fils de votre Père qui est aux cieux; car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, il fait tomber la pluie sur les justes et sur les injustes.» Voilà l’inouï, l’étonnant: être vraiment les fils de votre Père qui est aux cieux. Si l’amour des ennemis est possible, ce n’est pas en vertu de notre potentiel, mais c’est en reconnaissant le mystère de la fraternité qui trouve sa source dans le Père. Il faut aller jusque-là pour vivre la démesure de l’amour à vivre. Parce que nous sommes de Dieu, aimés inconditionnellement, nous osons nous risquer, à notre tour, dans un amour semblable au sien.
Une rencontre bouleversante de Frère Christian de Chergé, prieur de Tibhirine avec Sayah Attiah, chef d’un groupe terroriste, célèbre pour ses méfaits meurtriers. C’est un jour de Noël. Sayah, armé jusqu’aux dents, vient exiger auprès du moine trois requêtes auxquelles Frère Christian dira non. A la fin de cette entrevue, Christian de Chergé lui dit: «Nous sommes en train de nous préparer à célébrer Noël, pour nous c’est la naissance du Prince de la paix, et, vous venez comme cela, en armes? Et Sayah lui répond: «Excusez-moi, je ne le savais pas».
Cet entretien a duré un quart d’heure. Frère Christian note alors dans son journal: «Nous nous sommes retrouvés dehors; à mes yeux il était désarmé. Nous avons été visage en face de visage. J’étais le gardien de mes frères mais aussi le gardien de ce frère qui était là en face de moi et qui devait pouvoir découvrir en lui autre chose que ce qu’il était devenu. Et c’est un peu cela qui s’est révélé dans la mesure où il a cédé.»
Que vienne en nous cette Parole! Qu’elle nous désarme de nos prétentions hautaines et nous donne de voir en tout autre, la sœur ou le frère à aimer comme Dieu ne cesse de l’aimer.
Bernard Miserez | Vendredi 17 février 2023
Mt 5, 38-48
En ce temps-là,
Jésus disait à ses disciples :
« Vous avez appris qu’il a été dit :
Œil pour œil, et dent pour dent.
Eh bien ! moi, je vous dis de ne pas riposter au méchant ;
mais si quelqu’un te gifle sur la joue droite,
tends-lui encore l’autre.
Et si quelqu’un veut te poursuivre en justice
et prendre ta tunique,
laisse-lui encore ton manteau.
Et si quelqu’un te réquisitionne pour faire mille pas,
fais-en deux mille avec lui.
À qui te demande, donne ;
à qui veut t’emprunter, ne tourne pas le dos !
Vous avez appris qu’il a été dit :
Tu aimeras ton prochain
et tu haïras ton ennemi.
Eh bien ! moi, je vous dis :
Aimez vos ennemis,
et priez pour ceux qui vous persécutent,
afin d’être vraiment les fils de votre Père qui est aux cieux ;
car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons,
il fait tomber la pluie sur les justes et sur les injustes.
En effet, si vous aimez ceux qui vous aiment,
quelle récompense méritez-vous ?
Les publicains eux-mêmes n’en font-ils pas autant ?
Et si vous ne saluez que vos frères,
que faites-vous d’extraordinaire ?
Les païens eux-mêmes n’en font-ils pas autant ?
Vous donc, vous serez parfaits
comme votre Père céleste est parfait. »
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