Le cardinal Jean-Claude Hollerich a participé à la rencontre européenne du synode, à Prague | photo d'illustration © Catholic Church of England and Wales/Flickr/CC BY-NC-ND 2.0
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Cardinal Hollerich: «Ce n’est pas un synode sur l’homosexualité»

«C’est la première fois qu’on se parle vraiment, entre chrétiens de l’Europe centrale, de l’Europe de l’Est et de l’Europe occidentale». C’est le bilan en teinte positive dressé le 8 février 2023 par le cardinal Jean-Claude Hollerich, rapporteur général du Synode sur l’avenir de l’Église, alors que les travaux de l’assemblée synodale européenne organisée à Prague touchent à leur fin.

Lors d’un point presse auquel a participé l’agence I.MEDIA à la veille de la conclusion de la rencontre, le cardinal Hollerich s’est dit «très consolé». Le Luxembourgeois quittera en mars 2023 la présidence de la Commission des épiscopats de l’Union européenne (Comece), après cinq ans de mandat. Malgré «les différences entre les Églises qui existent en Europe», s’est-il félicité, «nous avons pu nous écouter les uns les autres», écouter «des opinions divergentes, avec respect».

Poser les bonnes questions

Le rapporteur général a confié être «particulièrement impressionné» par les partages des groupes en ligne. Quelque 500 personnes participaient en visioconférence, en plus des 200 délégués et invités sur place. En revanche, il a dressé un constat plus mitigé sur les débats de l’assemblée: «Les uns poussent pour le sacerdoce des femmes, d’autres voient une catastrophe, les uns sont pour l’accueil des homosexuels, d’autres trouvent que ce sont des pécheurs avec qui on ne peut pas s’associer…».

Ces questions «ne sont pas des problèmes à étudier en soi, ce n’est pas un synode sur l’homosexualité, ce n’est pas un synode sur le sacerdoce des femmes», a prévenu le cardinal Hollerich. Et de préciser: «Je ne dis pas que ce ne sont pas des sujets importants, mais ce n’est pas ce synode».

La première fois qu’on se parle vraiment

Il s’agit d’aborder «les bonnes questions» sur la synodalité, a-t-il martelé en mettant en garde contre «une Église qui se regarde elle-même». L’Église doit être «au service du monde et pas préoccupée par ses propres problèmes», car «personne ne s’intéresse à une Église qui s’occupe d’elle-même», a-t-il insisté. Malgré ce constat, le cardinal Hollerich ne craint pas un éclatement irréversible sur le continent européen. «C’est plutôt le contraire, a-t-il assuré. C’est la première fois qu’on se parle vraiment, entre chrétiens de l’Europe centrale, de l’Europe de l’Est et de l’Europe occidentale. Je suis très satisfait. Cela aurait pu devenir beaucoup plus violent.»

Le document produit par les évêques

Le cardinal a précisé que le deuxième document, produit par les présidents des conférences épiscopales qui doivent se réunir du 10 au 12 février, «ne va pas corriger» le document de l’assemblée générale. «Les évêques vont faire leur propre document», a dit le prélat, souhaitant que ces derniers évitent «les politiques d’Église».

Leur démarche est «légitime», a concédé le rapporteur, «mais il y a des peurs que les évêques renversent les discours». Avant de se montrer rassurant: les évêques ne peuvent pas «faire tout à fait autre chose», car «l’opinion publique ne le tolèrerait pas», a-t-il affirmé. Les évêques «finissent un discernement, mais la matière du discernement est donnée par tout le peuple de Dieu».

Les lignes de consensus qui se dégagent

Parmi les points de convergences des débats, le cardinal Hollerich voit le manque de jeunes dans l’Eglise. «Les jeunes ont une autre manière de penser, de sentir les choses. Ils ont déjà un pied dans l’ère digitale qui est en train de commencer. […] Cette présence des jeunes est essentielle, c’est leur Église, ils ont le droit de parler». «Si les évêques n’écoutent pas les jeunes, je pense qu’ils seront dans le faux», a-t-il assené.

Autre point de convergence: «On a parlé beaucoup des femmes, et c’est pour moi aussi très important, parce que, comme l’a dit quelqu’un, il n’y a pas de baptême en bleu et de baptême en rose». Si l’accès au sacerdoce est un sujet à approfondir, il y a «des choses qu’on peut faire maintenant», poursuit le rapporteur général en suggérant «des femmes dans la direction des structures de diocèses».

«Les femmes ne sont pas seulement là pour ranger des chaises et faire des arrangements de fleurs dans l’Église, elles ont leur mot à dire», a enchaîné le cardinal Hollerich. Songeant aux abus, il a estimé «qu’une présence plus féminine aurait évité beaucoup de problèmes». D’où la suggestion d’impliquer des femmes dans les équipes des séminaires, «pas seulement comme professeurs mais aussi comme formatrices et pourquoi pas comme mères spirituelles».

Un Synode continental institué?

Enfin, le cardinal a souligné la récurrence de la mention de l’œcuménisme, lors de cette rencontre où était présent le Conseil œcuménique des Églises. «Je suis convaincu que la synodalité va donner un nouvel essor à l’œcuménisme», car «le Synode remet l’accent sur le trésor du baptême que nous partageons».

Le prélat luxembourgeois s’est dit favorable à l’appel à une rencontre de ce type tous les dix ans, proposée par des délégués de divers pays. «Je pense que ce serait une bonne chose, si c’est vraiment dans le cadre du synode». Et de glisser également: «Nous avons beaucoup à apprendre des autres continents». (cath.ch/imedia/ak/rz)

Le cardinal Jean-Claude Hollerich a participé à la rencontre européenne du synode, à Prague | photo d'illustration © Catholic Church of England and Wales/Flickr/CC BY-NC-ND 2.0
9 février 2023 | 10:43
par I.MEDIA
Temps de lecture : env. 4  min.
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