Le film "Buzz l'Eclair", sorti par les studios Disney Pixar en 2022, contient une scène de baiser lesbien qui a provoqué une vaste controverse | capture d'écran
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Des groupes catholiques critiquent le virage «pro-LGBT» de Disney

Disney encourage ouvertement, depuis quelques années, l’acceptation des minorités, en particulier sexuelles, au sein de ses activités de divertissement. Une démarche qui provoque une levée de boucliers de la part de mouvements conservateurs catholiques, notamment en Afrique.

Le 28 mars 2022, la présidente du Groupe Disney, Karey Burke, a exprimé à ses employés son souhait de voir davantage de personnages LGBTQ et issus de minorités raciales dans les productions. «En tant que mère de deux enfants queer, un transgenre et un pansexuel, je me sens responsable de parler pour eux», a-t-elle déclaré. La femme d’affaires a rappelé à cette occasion que, dans les parcs d’attraction Disney, l’utilisation de pronoms genrés avait été supprimée. Les employés ne disent par exemple plus «Bonjour mesdames et messieurs, mais bonjour tout le monde ou bonjour les amis».

La société basée en Californie s’inscrit ainsi dans la «guerre culturelle» qui bat son plein aux Etats-Unis entre un conservatisme radical et un mouvement de réforme sociale désigné comme «wokisme». Disney s’est ainsi ouvertement engagé à faire abroger une loi de Floride adoptée en mars 2022 interdisant l’enseignement sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre dans les écoles publiques.

Conservatisme radical contre «wokisme»

Les dernières productions cinématographiques de Disney semblent refléter ce nouveau militantisme culturel. Le film d’animation Avalonia, l’étrange voyage (Strange World-2022) met en scène une histoire d’amour entre deux adolescents homosexuels. Le long-métrage Buzz l’Eclair (Lightyear-2022) présente un baiser entre deux personnages féminins. La série Andi Mack, qui s’est terminée en 2019, était le premier programme Disney à faire figurer un personnage gay.

Des aspects nouveaux dans le cinéma de grande diffusion, reçus de façon très différente selon les milieux et les pays. Lightyear a notamment été interdit dans 14 pays du Moyen-Orient et d’Asie. En 2017, le Kenya Film Classification Board (KFCB) a interdit la diffusion d’Andi Mack en expliquant que la série contenait «des messages subtils cherchant à normaliser l’homosexualité chez les jeunes». En juin 2022, l’influente université cairote d’Al-Azhar a critiqué Disney pour l’introduction de personnages homosexuels dans ses films. L’institution sunnite évoquait un «plan diabolique systématique visant à normaliser le crime immoral de l’homosexualité dans les sociétés musulmanes».

Réactions catholiques contrastées

Dans le monde catholique, les réactions ont été contrastées. Le film Avalonia, l’étrange voyage a été jugé comme «recommandable» par la Commission nationale d’évaluation des films (CNVF) de la Conférence épiscopale italienne. Dans son appréciation, l’organe catholique s’est concentré principalement sur le message écologiste du film, vu comme «une métaphore convaincante de la société actuelle», dont «le fil rouge est l’engagement écologique, la défense et la protection de la Maison commune, rappelant les propos du pape François dans l’encyclique Laudato si’ «. La CNVF note simplement: «En abordant le thème de la famille, Disney choisit de raconter l’histoire dans le sens de l’inclusion la plus large, englobant ainsi les questions d’identité, sociales, culturelles, raciales et LGBTQ+».

Une position fortement fustigée par plusieurs médias catholiques conservateurs. Le journal italien Nuova Bussola Quotidiana estimait notamment, dans un article du 2 décembre, que «nous sommes vraiment dans un monde étrange si un film d’animation qui vise à endoctriner les enfants, en présentant les relations homosexuelles comme normales et bonnes, est projeté dans les cinémas paroissiaux et recommandé par un organisme catholique officiel, dont le devoir serait de proposer une évaluation morale conforme au Magistère de l’Église».

L’Afrique plus critique

Le mouvement «anti-Disney» a pris un tour plus intense en Afrique, où l’homosexualité reste un fort tabou. Les membres de CitizensGo Africa, la branche africaine de l’organisation militante catholique conservatrice CitizenGo – fondée en Espagne en 2013 – ont lancé une pétition contre l’injection d’idées LGBTQ+ dans les contenus pour enfants, rapporte le 5 décembre le site américain Crux. La démarche est adressée à Robert Iger, le nouveau PDG de la société, nommé en novembre dernier. Ils l’exhortent à «ramener (l’entreprise) aux valeurs familiales, au lieu d’être la ruineuse usine d’endoctrinement LGBTQ+ qu’elle est maintenant». Ils fustigent le rôle de l’ancien patron Bob Chapek, vu comme «l’un des principaux croisés pour le virage de Disney vers le wokisme».

«Au cours des dernières années, la société (Disney) s’est aliénée les intérêts des familles, et a complètement ignoré les voix des parents, en se tournant complètement du côté du lobby LGBT», ajoute l’organisation.

Certains observateurs ont en effet établi un lien entre les difficultés financières actuelles de Disney et sa démarche d’inclusivité. Les actions de la société ont chuté de 40 % depuis 2021, date à laquelle Bob Chapek, avait pris les rênes. Les dernières productions du studio californien, dont Avalonia et Buzz l’Eclair, ont également enregistré des résultats en dessous des attentes. A noter que la baisse de rendement touche toute la filière cinématographique, principalement à cause des effets de la pandémie de Covid et de la concurrence des plateformes de streaming. (cath.ch/crux/ag/arch/rz)

Le film «Buzz l'Eclair», sorti par les studios Disney Pixar en 2022, contient une scène de baiser lesbien qui a provoqué une vaste controverse | capture d'écran
8 décembre 2022 | 12:12
par Raphaël Zbinden
Temps de lecture : env. 3  min.
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