Veillée de prière du pape François contre le coronavirus | capture d'écran Vatican Media
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«Au nom de Dieu», les 10 suppliques du pape dans un nouveau livre

«Au nom de Dieu, je vous demande…«. Le pape François s’adresse à l’humanité avec 10 suppliques reprenant les préoccupations de son pontificat, dans un livre à paraître en italien le 18 octobre 2022 (Vi chiedo in nome di Dio, éditions Piemme).

L’ouvrage balaie les thématiques chères au pontife argentin, de la «tolérance zéro» pour les abus à la condamnation de la violence au nom de Dieu, en passant par le sort des migrants, le rôle des femmes ou encore le droit à la santé.

Le chef de l’Église catholique s’y exprime sur un ton personnel, dans un texte rédigé en espagnol par le journaliste argentin Hernán Reyes Alcaide, à partir d’échanges en personne, par téléphone et par mail. Au fil des pages, le pape cite divers auteurs (GK Chesterton, Virgille, Dante, Dostoïevsky…) et rend hommage à une religieuse française vivant à Ostie, Geneviève Jeanningros, «qui vient tous les mercredis à l’audience dans la chaleur ou dans le froid» et œuvre auprès des plus marginalisés. 

Dans la préface, le pape explique qu’il entretient avec Dieu «une relation comme celle de tout homme, très humaine». «Parfois je ne le comprends pas, il a sa façon d’agir», confie le pontife de 85 ans qui dit ne pas atteindre de «sommet mystique», dans ce dialogue «parfois sans parole». 

Alors que l’humanité vit «un moment clé» avec la guerre en Ukraine et que le monde se transforme pour certains en un lieu «dangereux», «nous ne pouvons pas rester les bras croisés», exhorte-il, en engageant à «devenir le changement que nous voudrions voir». Il invite notamment à démasquer ses contradictions, citant ceux qui se plaignent du «manque de ressources des hôpitaux» d’un côté tout en pratiquant «l’évasion fiscale» d’un autre côté. 

La réparation des abus «ne sera jamais suffisante«

Réclamant au premier chapitre «que la culture des abus soit extirpée de l’Église», le chef de l’Église catholique demande pardon, reconnaissant que «nous avons péché gravement». Toute réparation du mal commis au sein de l’Église «ne sera jamais suffisante» face au «peu que nous avons fait dans le passé», admet-il, professant qu’un seul cas d’abus «est déjà en soi une réalité monstrueuse», un «crime atroce». 

Les suppliques du pape François

Une des «erreurs les plus graves» a été de ne pas prendre en compte le récit des victimes, juge l’évêque de Rome, qui demande désormais de ne pas écarter les dénonciations anonymes, et qui souhaite la destitution des évêques négligents. Le pontife défend aussi la présomption d’innocence tant que la Justice n’a pas délivré sa sentence. 

Le péché contre l’écologie dans le catéchisme

Deuxième appel de l’auteur de Laudato Si’ : la protection de l’environnement, car «il n’existe pas de planète B», scande-t-il en reprenant le titre d’un best-seller (There is no planet B). Fustigeant la «gloutonnerie de ressources naturelles», mais aussi la tendance à «se perdre en bavardages» au niveau international, le pape répète que «le moment d’agir est aujourd’hui, pas demain». 

«Nous devrons faire le pas d’introduire dans le Catéchisme le péché contre l’écologie», affirme le pontife. Il enjoint les gouvernements à adopter des mesures pour limiter l’augmentation de la température moyenne mondiale et loue la créativité et la résilience des jeunes, que n’avaient «ni leurs grands-parents, ni ma génération, ni leurs parents». 

Un direct Tiktok ne remplace pas la messe 

Les limites de la Terre dont parle l’Évangile sont «aujourd’hui digitales», écrit François qui encourage la présence de l’Église dans le monde numérique, sans toutefois «remplacer notre messe par un direct ›Tiktok› ni faire des ›memes› de nos martyrs pour les diffuser en ligne». Les ›likes› »ne peuvent pas se substituer au contact humain», assène-t-il dans le troisième chapitre.

Le pape demande au nom de Dieu «une communication qui combatte les ›fakes news› et qui évite les discours de haine». Il pointe du doigt en ce sens les ›trolls› anonymes en ligne, les utilisateurs «fantômes» œuvrant pour influencer et manipuler l’opinion. Il conseille aux médias, «le quatrième pouvoir», de revoir leur indépendance quant à leurs actionnaires et d’éventuels conflits d’intérêt, et s’inquiète de guerres juridiques (lawfare) visant à décrédibiliser des opposants. 

Plaidant pour «le droit de changer, la réparation et la conversion», il s’oppose à la «pensée unique» qui voudrait nier ou réécrire l’histoire, en prétendant «juger les erreurs du passé avec le journal du lundi en main». 

Guerre juste, réforme de l’ONU, migrants, femmes…

Dans les chapitres suivants, le pape François s’adresse aux politiques. S’ils ne sont pas «des surhommes», ils sont invités à ne pas tomber dans la corruption. Le pape va plus loin, suggérant que s’il n’est «pas illégal qu’un être humain se sente attiré par l’argent, par les voyages en première classe», un politique doit cependant vivre «la sobriété» et «l’austérité». 

S’élevant contre la folie de la guerre, qui ne peut en aucune occasion «être considérée juste», il dénonce une fois encore la dépense mondiale en armement, et «la facilité croissante» avec laquelle on peut se procurer des armes personnelles de petit calibre. «Avec la guerre il y a des millions de personnes qui perdent tout mais aussi quelques personnes qui gagnent des millions», déplore le pontife argentin invitant l’ONU à se réformer.

«Je ne vous ai jamais oubliés», lance le pape aux migrants et aux réfugiés dans un chapitre dédié. Il estime que sur «la conscience» des pays développés «devrait peser chaque vie perdue d’un frère, d’une sœur qui traverse le désert, l’océan». 

Dans un chapitre sur la participation des femmes dans la société, il souhaite que la croissance professionnelle et la maternité ne soient pas «des projets incompatibles» pour une femme. Il fait mémoire de «toutes les femmes assassinées pour le simple fait d’être femmes» ou considérées comme «citoyennes de seconde classe». «Notre monde a besoin de plus de dirigeantes femmes», affirme le pape, précisant cependant que dans l’Église, il ne s’agirait pas de confondre «rôle» et «charge». 

Un système économique «malade» 

Dans un système économique «malade» et «insoutenable», qui «tue et exclut», le 266e pape démonte la théorie des retombées des gains des plus riches, dont les plus pauvres devraient attendre «des gouttes». «Que nous est-il arrivé, comme humanité, pour nous conduire à ne pas commencer chaque journée en se demandant comment inclure, nourrir, prendre soin et vêtir les petits derniers de la société, plutôt que de les exclure ?», s’interroge-t-il. 

Il lance un plaidoyer pour les pays pauvres asphyxiés par leur dette, et pour les petits agriculteurs, alors que les populations se concentrent de plus en plus dans les villes. Il se redit aussi favorable à un revenu universel de base. 

Consacrant par ailleurs un chapitre au «droit à la santé pour tous», le pape prend résolument fait et cause pour les vaccins contre le coronavirus, qui selon lui devraient être considérés comme «un bien commun de l’humanité». Il reproche aux objecteurs du vaccin «une approximation égoïste et privée d’empathie». 

Alors que plusieurs pays, dont la France, envisagent la légalisation de l’euthanasie, le successeur de Pierre invite à ne pas confondre l’accompagnement de la personne mourante avec «des pratiques inacceptables qui conduisent à tuer». Il faut «accueillir la mort» et non pas «administrer la mort», redit-il.

Être plus Abel et moins Caïn

Enfin, au dernier chapitre, le pape François appelle les religions à s’unir «dans la condamnation unanime de toute tentative d’utiliser le nom du Tout puissant pour justifier un quelconque type de violence ou d’agression». «Personne ne peut penser prendre Dieu pour bouclier quand il projette et accomplit des actes de violence et d’abus», affirme-t-il, car «la violence au nom de Dieu est une trahison de la religion». 

Le pape déplore le fait que «nous nous arrêtons trop à discuter sur les petites différences qui nous séparent plutôt que de nous concentrer sur les grandes concordances qui nous rapprochent». «L’époque actuelle nous demande d’être plus Abel et moins Caïn», ajoute-t-il. 

Sur tous les thèmes abordés dans le livre, il n’existe pas de «formule magiques», se défend le pape François dans son épilogue, néanmoins certaines «attitudes envers la vie» peuvent aider. Ainsi «celui qui n’a pas d’espérance ne va nulle part». «Au contraire de l’optimisme, l’espérance ne trahit jamais», conclut-il.  (cath.ch/imedia/ak/mp)

Veillée de prière du pape François contre le coronavirus | capture d'écran Vatican Media
18 octobre 2022 | 11:11
par I.MEDIA
Temps de lecture : env. 6  min.
Abus sexuels (1289), catéchisme (35), écologie (55), guerre (458), Migrants (356)
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