Don Italo Molinaro est chargé de la communication de la rencontre des prêtres du diocèse de Lugano | © Maurice Page
Suisse

Les prêtres du Tessin se confrontent aux changements sociétaux

Les prêtres du diocèse de Lugano se réuniront du 29 au 31 août 2022 à Lugano pour approfondir la question de l’identité du prêtre face aux changements sociétaux nombreux et rapides qui caractérisent notre époque. Le curé et journaliste tessinois Don Italo Molinaro, en charge de la communication de l’événement, donne son point de vue.

Cristina Vonzun, catt.ch/traduction et adaptation: Raphaël Zbinden

La conférence «Être prêtres ensemble: aujourd’hui, ici, pour qui, pour quoi?» (Essere preti insieme: oggi, qui, per?) se déroulera pendant trois jours au Centre des congrès de Lugano. Elle sera ponctuée de plusieurs sessions plénières, avec la participation d’intervenants extérieurs, et de sessions de travail en petits groupes. Il s’agit d’une première pour le clergé tessinois, qui se lance ainsi dans un exercice non seulement didactique, mais également dans un large dialogue où les prêtres se confronteront à des questions délicates.

Quelle est l’origine de cette rencontre?
Italo Molinaro: Cela faisait quelque temps que nous, les prêtres (du diocèse de Lugano), ressentions le besoin de discuter de nombreux sujets qui nous touchent, mais aussi de la vie de l’Église au Tessin, de son présent et de son avenir, de notre identité en relation avec l’Église, la société et le monde. Cela à la lumière de notre époque et aussi des fragilités qui sont apparues parmi nous, dont il a également été question dans les médias.

Dans les réflexions synodales recueillies dans les différents pays, la figure du prêtre ressort comme devant être revue. Avez-vous constaté cet aspect au Tessin?
Notre réalité en tant que prêtres est un peu mystérieuse, même pour nous-mêmes. Ces derniers temps, la possibilité de mener une discussion ouverte et générale sur des questions d’actualité a fait quelque peu défaut. Nous nous sommes réunis pour d’autres thèmes et objectifs, mais nous avions maintenant besoin de parler de nous-mêmes, de notre expérience, de notre façon d’être au service de nos sœurs et frères.

«Avant même la pandémie, les relations étaient déjà minées par la prééminence de l’individualisme sur la communauté»

Nous devons mieux lire notre réalité: celle de notre cœur, celle qui nous entoure. Nous devons lire ensemble le changement d’ère dans lequel nous sommes tous embarqués. Nous avons besoin de comprendre, d’interpréter, de nous raconter cette réalité. Avant de faire de grands projets, nous voulons nous comprendre nous-mêmes et donner une voix à nos expériences, nos sentiments, nos mots et nos rêves qui ont besoin d’émerger. Cela aussi est un fruit du Synode: nous pouvons dire que, aussi bien le Synode que notre démarche (en tant que prêtres du diocèse de Lugano), sont des fruits de l’époque dans laquelle nous vivons. Ils servent à donner un nom à notre crise pour la découvrir non pas comme quelque chose de négatif, mais comme une crise de croissance.

Aujourd’hui, tout arrive de façon rapide, les pandémies, la guerre, le changement climatique… et ne laissent à personne, pas même aux gouvernements, le temps de réfléchir. Comment les prêtres vivent-ils ce contexte mondial difficile?
J’attends bien que nous nous confrontions à ces questions. Mon sentiment – je pense par exemple à la pandémie – est que nous, les prêtres, avons vécu un choc général qu’il faut maintenant mettre en mots. Avant même la pandémie, les relations étaient déjà minées par la prééminence de l’individualisme sur la communauté, par l’avancée des nouveaux moyens de communication tels que les médias sociaux qui enferment l’individu dans son propre petit monde, par la croissance d’une tendance générale au narcissisme, qui touche tout le monde et surtout ceux qui ont un style de vie individuel, comme les prêtres.

«Nous souhaitons comprendre ce que les femmes peuvent penser de la vie des prêtres»

Le grand défi, c’est de comprendre ce que cela signifie pour nos vies. C’est pourquoi la confrontation, le questionnement, le dialogue et le voyage sont nécessaires. Mais des personnes possèdent des idées et des clés d’interprétation, comme les invités à l’Assemblée, dont nous attendons de l’aide, sans recettes faciles, parce qu’en fin de compte nous sommes tous en voyage, comme le rappelle le pape François.

Au cours de ces trois jours, vous donnerez la parole à des intervenants avec des profils et des compétences différents: laïcs, femmes et hommes, prêtres, théologiens, experts en communication, psychologie, littérature, philosophie et théologie.
Nous souhaitons comprendre ce que les femmes peuvent penser de la vie des prêtres. Nous sommes intéressés par ce que pensent des laïcs ayant des compétences différentes des nôtres ou ce que pensent d’autres prêtres très actifs dans le domaine de la formation.

Envisagez-vous que cette forme de rencontre – échange puisse être étendue aux laïcs?
Le mercredi 31 août, nous travaillerons en groupes pour voir ce que nous pouvons faire du chemin qui s’est dessiné. Le résultat sera remis à l’évêque. Notre sentiment est que nous sommes au début d’une route. Il serait bien de donner des outils à nos confrères pour qu’ils ne se sentent pas comme des fonctionnaires anonymes dans leurs communautés, mais qu’ils aient des éléments pour activer et vivre des dynamiques relationnelles.

Certains sortent d’expériences négatives et sont sous le coup d’un désenchantement pastoral. Il n’y a pas de solution magique, mais dans cette ère de changement, nous sommes convaincus, en tant que groupe de personnes qui tentent de faire avancer la société, qu’il est encore possible d’activer quelque chose. Nous devons revenir aux petites choses qui peuvent faire grandir le bien. (cath.ch/catt/cv/rz)

Don Italo Molinaro, actuellement curé du Sacré-Cœur de Lugano, est journaliste depuis de nombreuses années. Il a notamment été rédacteur adjoint du Giornale del Popolo et responsable du programme Strada Regina diffusé sur la Radio Télévision suisse italienne (RSI), ainsi que de la rédaction catholique du programme radiophonique Chiese in diretta, diffusé sur Rete Uno. CV

Don Italo Molinaro est chargé de la communication de la rencontre des prêtres du diocèse de Lugano | © Maurice Page
25 août 2022 | 17:24
par Rédaction
Temps de lecture : env. 4  min.
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