Le cardinal Kurt Koch est président du Conseil pontifical pour l’unité des chrétiens depuis 2010. | © Jacques Berset
Vatican

Cardinal Kurt Koch: «La guerre est un faux chemin»

Le cardinal Kurt Koch sera à la tête de la délégation du Vatican à la 11e assemblée plénière du Conseil œcuménique des Églises (COE) qui se réunira à Karlsruhe, en Allemagne, dès la fin du mois d’août 2022.

Severina Bartonitschek cic / traduction adaptation Maurice Page

Le président du Conseil pontifical pour l’unité des chrétiens parle de ses attentes, du dialogue orthodoxe à l’ombre de la guerre en Ukraine et d’une possible rencontre entre le pape François et le patriarche de Moscou Cyrille Ier.

Cardinal Koch, quelles sont vos attentes vis-à-vis de l’assemblée générale du COE à Karlsruhe?
Kurt Koch: J’espère que le thème de cette Assemblée, «L’amour du Christ mène le monde à la réconciliation et à l’unité », pourra vraiment montrer ce que cet amour peut faire bouger dans notre monde et aussi entre nous, chrétiens. J’espère que cela sera mis en évidence sous différents aspects.

    »Au Proche-Orient, il faut viser une solution à deux États».

Un aspect important sera certainement la prise de position commune prévue sur le conflit au Proche-Orient. Au vu de la situation actuelle notamment, cela peut-il conduire à des  divisions?
J’espère qu’il y aura une perspective sensée. Ici aussi, la devise selon laquelle l’amour du Christ réconcilie est un message important. Le Saint-Siège a toujours souligné qu’il fallait viser une solution à deux États. Il ne peut guère y avoir de paix et de réconciliation sans elle. J’espère que cela sera à nouveau rappelé et que des voies pourront être tracées pour résoudre ce grave conflit. Les deux, Israël et la Palestine, ont le droit d’exister.
L’Assemblée générale se déroule aussi en Allemagne et avec son histoire de extermination des juifs ce pays a ici une responsabilité particulière.

Un autre actualité est bien sûr la guerre en Ukraine. Des délégués doivent venir aussi bien de Russie que d’Ukraine. Pensez-vous qu’il pourrait y avoir des discussions fructueuses?
Il y a eu une discussion préalable pour savoir si la délégation du patriarcat orthodoxe russe devait être ›désinvitée’. Mais le Conseil œcuménique des Églises a décidé que ce n’était pas une solution. Les dialogues, les discussions et les relations doivent être maintenus, sinon on ne peut rien obtenir du tout.

    »Cyrille a provoqué de grandes tensions au sein de l’orthodoxie».

Il y a eu une pré-assemblée orthodoxe à Chypre en vue de l’assemblée générale du COE. Un des collaborateurs du Conseil pontifical pour l’unité des chrétiens y a participé. Quelle était l’ambiance?
Le dominicain Hyacinthe Destivelle a pu faire une expérience globalement positive. Il a été possible de discuter ouvertement, même si la situation était évidemment très difficile. La position du patriarche orthodoxe russe Cyrille a également provoqué de grandes tensions au sein de l’orthodoxie. Les orthodoxes essaient de clarifier leurs différentes positions tout en restant en contact les uns avec les autres.

En septembre, le pape François se rendra au Kazakhstan pour un rencontre interreligieuse. Le patriarche Cyrille Ier a également confirmé sa participation. Y aura-t-il une rencontre entre les deux hommes?
Je ne sais pas. Un grand défi sera – c’est l’autre chose qu’il faut respecter – le fait que le pape rencontre d’abord le patriarche orthodoxe russe avant de visiter l’Ukraine. Ce qui serait perçu comme très difficile en Ukraine.

Pensez-vous qu’une rencontre entre François et Cyrille soit judicieuse?
Je pense qu’elle serait judicieuse si l’on pouvait parvenir à une prise de position commune claire pour que cette guerre insensée et cruelle prenne enfin fin.

Comment se poursuit par ailleurs le dialogue avec l’Eglise orthodoxe russe? Cyrille peut-il encore être un interlocuteur?
Les Églises orthodoxes ont décidé que le dialogue théologique entre elles et l’Église catholique ne serait que multilatéral et non bilatéral. Le patriarcat orthodoxe russe ne participe plus à ce dialogue international depuis que le patriarche œcuménique Bartholomée Ier a déclaré l’autocéphalie, l’indépendance ecclésiastique de l’Eglise orthodoxe en Ukraine. Cela concerne également notre commission. C’est pourquoi nous n’avons actuellement aucun dialogue théologique avec Moscou.

    »Les relations avec l’Eglise orthodoxe russe sont ternies par la position du patriarche Cyrille».

Et au-delà du dialogue théologique?
Nous avons une relation bilatérale, comme nous l’avons avec d’autres Églises orthodoxes. Celle-ci est maintenant ternie par la position du patriarche Cyrille sur la guerre en Ukraine. Les positions sont très différentes, car pour l’Eglise catholique, il est tout à fait clair qu’une guerre n’est jamais une solution.
La guerre ne fait que créer des problèmes encore plus grands, justement avec ce nombre élevé de victimes, les nombreux réfugiés, les conséquences sur la poursuite de la pollution de la création et la faim dans le monde. La position du Saint-Siège est donc claire: la guerre est un faux chemin.
Le patriarche Cyrille est convaincu qu’il faut emprunter cette voie. Les différences sont tout simplement très grandes. Mais si nous voulons chercher des moyens de poursuivre la compréhension, nous devons rester dans le dialogue. (cath.ch/cic/mp)

Le cardinal Kurt Koch est président du Conseil pontifical pour l’unité des chrétiens depuis 2010. | © Jacques Berset
11 août 2022 | 13:28
par Rédaction
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