Lugano: l’Église et les abus sexuels en débat
L’exposé cru des abus sexuels dont a été victime le Professeur Sergio Piasentin a ouvert la deuxième journée de la conférence internationale «Avant que ça n’arrive» (»Prima che accada»). Organisés par la Fondation tessinoise pour l’aide, le soutien et la protection de l’enfance (ASPI), du 23 au 25 mai 2022, les débats se sont déroulés à Lugano sur la prévention des abus et des maltraitances sexuelles envers les enfants (de 0 à 18 ans).
catt.ch/traduction et adaptation Bernard Hallet
Le 24 mai 2022, la journée a été consacrée aux abus et à leur prévention dans l’Église et dans le monde du sport. L’évêque de Coire, Mgr Joseph Bonnemain. Mgr Zanini, vicaire général du diocèse de Lugano, représentait Mgr Lazzeri, évêque de Lugano.
Le professeur Sergio Piasentin, chargé de cours à la Haute école spécialisée de la Suisse italienne, à Lugano, a eu le courage de raconter les abus sexuels dont il a été victime à l’âge de 7 ans et qui ont duré 10 ans. Les abus répétés d’un sacristain en contexte ecclésial, se sont déroulés dans l’Italie voisine où vivait la victime.
Le professeur Piasentin explique avoir tenté de raconter ce qui lui est arrivé à trois prêtres en trois occasions différentes, mais sans rien obtenir. Il a fallu plusieurs années à Sergio Piasentin pour parvenir à digérer cette expérience et à comprendre qu’il n’était pas coupable.
L’indifférence institutionnelle
Son histoire est emblématique d’une situation que malheureusement l’Église catholique connaît bien: le danger de l’indifférence institutionnelle qui, dans ce cas précis et dans tant d’autres, a conduit les abuseurs à persister dans leur comportement envers les abusés et à faire de ces derniers des victimes inaudibles.
Toutefois, a souligné Mgr Bonnemain à propos del’Église en Suisse, des progrès ont été réalisés au fil des ans. Il convient de mentionner les directives révisées pour la prévention des abus, la création de la CVS «Commission d’experts pour les abus sexuels dans l’Eglise», qui conseille les évêques suisses sur les aspects psychologiques, juridiques, sociaux, moraux, théologiques ainsi que de politique ecclésiale des abus sexuels.
Bureau indépendant pour les cas d’abus
L’évêque de Coire suit l’évolution du problème à l’intérieur et à l’extérieur de l’Église et indique les mesures à prendre. Il y a la présence, au niveau diocésain, de la Commission d’experts en cas d’abus sexuels dans l’Eglise, qui existe également au Tessin, et d’un bureau indépendant pour la dénonciation des cas d’abus, avec deux professionnels qui s’en occupent.
Carlo Calanchini, psychiatre, et Rita Pezzati, psychothérapeute, qui sont les personnes de référence de la Curie pour écouter et aider les personnes qui, même les années précédentes, pensent avoir été victimes d’abus. Un parcours d’accompagnement dont les pouvoirs publics sont également informés, avec d’éventuelles dénonciations des affaires.
Deux innovations
Mgr Bonnemain a présenté deux innovations: le Code de conduite sur les abus sexuels dans le diocèse de Coire, un document éthique élaboré pour les agents pastoraux, qui doit également être repris dans les autres diocèses suisses, et l’étude pilote indépendante menée par l’Université de Zurich dans les archives des différents diocèses suisses, qui vise à examiner 70 ans d’archives ecclésiales.
Les archives épiscopales secrètes de tous les diocèses de Suisse seront ouvertes aux experts qui vont mener cette étude, dont les résultats sont attendus pour la fin de l’année 2022. (cath.ch/catt.ch/bh)