Reliques, espions, otages et micros: le témoignage de Cecilia Marogna
À fin de la 16e audience du procès de l’affaire de l’immeuble de Londres – le 19 mai 2022 – pendant laquelle s’est conclu l’interrogatoire du cardinal Angelo Becciu, l’avocat de Cecilia Marogna a demandé à lire une note de sa cliente, ce que lui a refusé le juge Giuseppe Pignatone. Le témoignage de 22 pages de celle qui se présente comme une «experte en diplomatie informelle» a cependant été formellement déposé et transmis à la presse. Au menu: reliques, espions, otages et micros, millions d’euros et moeurs douteuses…
Cecilia Marogna est la seule femme sur le banc des accusés et son inculpation n’est pas directement liée à l’affaire de l’immeuble de Londres. De 2018 à 2019, elle aurait reçu, selon la justice vaticane, près de 600’000 euros de la Secrétairerie d’État pour mener des activités de renseignements, sur recommandation du cardinal Becciu. Les sommes allouées pour des missions censées permettre la libération d’otages dans le Sahel auraient «été utilisées, dans la quasi-totalité, pour effectuer des achats non compatibles et donc non justifiables» avec l’objet de sa mission, considère la justice. Elle est accusée de détournement de fonds via une société basée en Slovénie.
Étant donnée la nature explosive de son témoignage, I.MEDIA revient largement sur son contenu. Mais il convient, dans l’attente de son interrogatoire et de la suite du procès, de prendre ces informations, qui tiennent parfois d’une liste à la Prévert, avec prudence.
1 – Les reliques de saint Nicolas
Après la rencontre historique du pape François et du patriarche Cyrille à Cuba le 12 février 2016, il fut décidé, pour marquer le rapprochement entre leurs deux Églises, de transporter les reliques de saint Nicolas de Myre en Russie. Conservées depuis près d’un millénaire à Bari, dans les Pouilles, les restes du saint, vénéré tant par les catholiques que par les orthodoxes, furent exposés à Moscou puis à Saint-Pétersbourg du 21 mai au 28 juillet 2017 avant de retourner en Italie.
Cecilia Marogna affirme avoir été contactée quelques semaines plus tard, en octobre 2017, par un entrepreneur italien nommé Piergiorgio Bassi qui l’aurait mise en contact avec deux «partners« russes. Ces individus, qu’elle identifie comme Goloschchapov Konstantin Veniaminovich et Lukjanov Vladimir Nikolayevich, lui sont présentés comme des «délégués pour les questions diplomatiques particulières» de Vladimir Poutine.
Ils voulaient, explique l’Italienne, rencontrer Mgr Becciu, alors substitut – ›numéro 3 du Vatican’ – et désiraient aussi des informations sur un trust dénommé «Imperial» qui aurait été déposé par les Russes il y a de «très nombreuses années» à l’IOR, la banque privée du Vatican. L’IOR aurait nié l’existence d’un tel trust.
Par ailleurs, un des buts des fonctionnaires aurait été de «recevoir en don» les reliques de Saint Nicolas de Bari, les mêmes qui venaient de rentrer en Italie quelques semaines auparavant. Les deux Russes et l’intermédiaire auraient rencontré Mgr Becciu et Cecilia Marogna et demandé de faire «cadeau au Président russe» des reliques.
Le prélat sarde, bien que peu convaincu, aurait présenté la demande délicate directement au pape, qui lui aurait expliqué que la seule personne à pouvoir décider sur ce point était Mgr Francesco Cacucci, à l’époque archevêque de la capitale apulienne. Mgr Becciu aurait alors envoyé la demande à ce dernier, qui aurait écarté sans ambiguïté la possibilité que la «dépouille du Saint soit démembrée».
Le refus aurait «contrarié» l’intermédiaire, Piergiorgio Bassi, qui se serait emporté, considérant impossible que le pape «n’ait pas compris l’importance de ce geste qui aurait uni ultérieurement les deux Églises», et qualifiant le comportement de Mgr Cacucci de «grossier et autoritaire». Il aurait été alors suggéré aux envoyés russes de faire envoyer une demande officielle directement par le patriarche Cyrille via la Secrétairerie d’État. Celle-ci ne serait jamais arrivée.
Mais cela n’est pas tout : l’intermédiaire italien aurait aussi demandé s’il était possible d’obtenir un bien immobilier «sur une des zones extraterritoriales du Saint-Siège en Italie» pour y installer un «centre d’écoute russe». Une demande «inopportune sinon absurde» qu’elle aurait néanmoins transmise Mgr Becciu, lequel aurait émis le même jugement. Elle aurait donc été refusée pour des raisons de «sécurité» et de «civilité diplomatique internationale».
2 – Un projet de Skype avec Carles Puigdemont
À la même période, le référendum pour l’indépendance de la Catalogne aboutit, après un scrutin contesté, à un score très favorable aux séparatistes. Cecilia Marogna aurait reçu de la part du même intermédiaire, Piergiorgio Bassi, une demande d’organiser, à la sollicitation de ses clients russes, une rencontre ou un appel entre Mgr Becciu et l’indépendantiste Carles Puigdemont, à la tête du mouvement indépendantiste et engagé dans un bras de fer avec Madrid.
Le prélat sarde aurait accepté la demande «pour savoir ce qui se passe en Espagne et s’il y a lieu de prévoir une intervention diplomatique du Vatican». Une vidéo-conférence est envisagée, le Catalan ne pouvant voyager à cette période. Cependant, Piergiorgio Bassi aurait présenté comme «conditio sine qua non« le fait que l’appel devait avoir lieu dans l’appartement privé de Mgr Becciu avec un «compte Skype spécifique» installé par un contact de l’intermédiaire.
Une demande que Cecilia Marogna aurait jugée «inhabituelle et, pour le moins, illogique», mais l’intermédiaire aurait insisté. Étant donné la «criticité politique de la situation espagnole», elle aurait alors suggéré à Mgr Becciu d’exiger une demande officielle adressée par le président auto-proclamé Carles Puigdemont à la Secrétairerie d’État afin d’éviter des «instrumentalisations» voire un «incident diplomatique».
Une réponse qui aurait été présentée à l’intermédiaire. Une nouvelle fois irrité, Piergiorgio Bassi aurait qualifié Mgr Becciu d’homme «sans caractère». Quelques mois plus tard, Cecilia Marogna affirme que le même Piergiorgio Bassi l’aurait contacté une dernière fois pour lui dire qu’il avait réussi à entrer en «contact direct» sur cette question avec le secrétaire d’État du Saint-Siège, le cardinal Pietro Parolin, sans qu’elle puisse savoir si tel était le cas.
3. La libération de Sœur Gloria Cecilia Narvaez
Cecilia Marogna affirme être entrée en contact avec la société Inkerman – «une société fondée et gérée par des ex-agents de l’intelligence militaire britannique» qui serait «toujours liée» au MI5 et au MI6 – en décembre 2017. Ces premiers contacts auraient donné lieu à une rencontre en janvier 2018 lors d’un sommet organisé par un club «exclusif» pour les personnes liées au milieu des services secrets britanniques. Elle soutient la version du cardinal Becciu selon laquelle elle lui aurait présenté l’agence pour gérer la question «délicate» de la libération de Sœur Gloria Cecilia Narvaez, une religieuse colombienne enlevée par des djihadistes dans le Sahel.
Lors de la première rencontre, l’agence britannique aurait communiqué le prix de la rançon demandée par les ravisseurs pour sa libération – 17 millions d’euros. Pour ses services, Inkerman aurait demandé à être payé et aurait expliqué au substitut que la libération de la religieuse sans payer la rançon nécessitait des «investissements sur les ressources humaines et logistiques plus onéreux» que d’autres affaires étant le profil de l’otage et le contexte de l’époque au Sahel.
Mgr Becciu aurait ensuite rendu compte de la rencontre au pape François qui lui aurait donné «toute latitude pour agir» afin de «trouver une solution pacifique» pour relâcher la religieuse retenue captive. Avec cet accord, Cecilia Marogna aurait commencé à entrer en contact, via Inkerman puis de manière plus autonome, avec les responsables du «GAULA», les forces spéciales des services secrets colombiens, spécialisés dans l’antiterrorisme – notamment contre les Farcs. Une rencontre aurait été organisée à Bogotà entre le GAULA, Inkerman et le nonce apostolique en Colombie Mgr Ettore Balestrero – nommé en juillet 2018 nonce en République démocratique du Congo – suivie d’une rencontre avec la famille de la religieuse.
Mgr Becciu et Cecilia Marogna auraient eu deux rencontres à Rome en mars et juillet 2018 avec Inkerman. Lors de la seconde rencontre, les Britanniques auraient encouragé la constitution d’une «société à l’étranger» pour «faire écran» à l’implication de leur organisation et celle du Vatican.
L’agence Inkerman aurait aussi signalé avoir reçu du Saint-Siège une somme «considérablement plus élevée» que celle prévue pour leurs services. Ainsi, 350’000 £ auraient été versés au lieu de 170’000 £.
Selon Marogna, il se serait agi d’une erreur de Mgr Alberto Perlasca. La trop-perçu ne fut pas restitué par Inkerman et il fut convenu qu’elle servirait à financer la suite de son action pendant que Cecilia Marogna se chargerait de la création de la société à l’étranger. En tout, la société anglaise aurait reçu 589’000 euros du Vatican. Cecilia Marogna se demande pourquoi, contrairement aux sommes qu’elle a reçues, celles-ci ne sont pas «prises en considération» par le Promoteur de justice dans son enquête.
4 – L’initiative de la Gendarmerie vaticane sur le dossier Narvaez
Entre temps, en février 2018, les services marocains auraient averti Cecilia Marogna d’une initiative prise par Domenico Giani – commandant de la Gendarmerie vaticane – visant à payer une rançon pour libérer la religieuse. Elle en avisa Mgr Becciu qui, «étant donnée la gravité de l’initiative», en parla à son tour au pontife. Ce dernier aurait alors reçu le chef de la Gendarmerie vaticane, lui demandant de mettre fin à son opération «de haut risque pour le Vatican et tous ses collaborateurs religieux et laïcs présents dans les zones à haut risque terroriste».
Sans que de lien ne puisse être fait avec le dossier malien, le commandant Giani a été remercié par le pape en 2019 pour avoir laissé fuiter des informations sur cinq personnes suspendues par le Saint-Siège dans le cadre d’une enquête menée par le Promoteur de justice. Dans un communiqué publié le 1er octobre 2019, le Saint-Siège avait souligné que le chef de la Gendarmerie n’avait «aucune responsabilité objective» dans cette fuite mais qu’il s’agissait d’assurer «la sérénité nécessaire à la poursuite de l’enquête coordonnée par le Promoteur de Justice». Il a même été décoré par le Saint-Siège le 31 octobre de la même année en remerciement pour son travail.
5 – Une société écran pour libérer la religieuse
Pour créer la société écran demandée par Inkerman, on aurait suggéré à Cecilia Marogna de l’installer en Slovénie en raison de sa «bureaucratie plus mince» et des possibilités qu’offrait le statut des entreprises dans ce pays, option qu’aurait approuvée Mgr Becciu. C’est ainsi que fut fondée LOGSIC D.O.O., la société slovène accusée dans ce procès, en tant que personne juridique, de détournement de fonds.
La société aurait servi à gérer le cas de la religieuse enlevée mais aussi d’autres cas «hautement critiques, sensibles, discrets» en Afrique du nord et dans le Sahel, pour laquelle Cecilia Marogna était engagée depuis octobre 2017 par le général Luciano Carta, directeur de l’AISE – les services secrets italiens.
Elle affirme avoir agi, à la demande de Mgr Becciu et du général Carta comme un «pont opérationnel» pour permettre la mise en place d’un «partnership diplomatique parallèle» entre le Saint-Siège et les services secrets italiens. Cette coopération gérée par la LOGSIC, déclare-t-elle, visait à «récolter des bénéfices communs en respectant toujours l’éthique et la morale» de ses deux clients. L’entreprise aurait reçu du Vatican 575’000 euros entre décembre 2018 et mi-2019, selon Cecilia Marogna. Elle insiste sur le fait qu’elle n’a signé aucun contrat stipulant la façon dont elle devait utiliser les fonds alloués et qu’elle aurait agi «selon un ordre spécifique donné par le pape François».
6 – Gestion de crises épiscopales en Sardaigne
Cecilia Marogna affirme avoir aussi travaillé en 2017, dans le cadre de sa collaboration avec Mgr Becciu, sur un cas concernant Mgr Arrigo Miglio, archevêque émérite de Cagliari depuis 2019. L’archevêque sarde aurait été confronté à une situation «critique» avec un autre évêque à laquelle elle aurait dû trouver une «solution discrète».
Mgr Miglio aurait demandé de l’aide à Cecilia Marogna plus tard à propos d’une autre affaire. Celle-ci concernait «quelques investissements sociaux» pour lesquels le nouvel évêque de l’archidiocèse de Sassari – Mgr Gian Franco Saba – ne se montrait pas coopératif malgré l’intervention du cardinal Becciu. Le risque, assure-t-elle, était de voir un projet d’immobilier social être converti en «projet spéculatif». Le cardinal aurait «mis à disposition» Cecilia Marogna pour régler le problème bien qu’il ne soit pas directement lié à ses compétences en matière diplomatique et d’intelligence étrangère.
7 – Un dossier compromettant sur Mgr Peña Parra
Cecilia Marogna affirme avoir rencontré le cardinal Pietro Parolin – secrétaire d’État et supérieur direct du cardinal Becciu quand il était substitut – «plusieurs fois» jusqu’en octobre 2020. Des rencontres, affirme-t-elle, liées à des «situations particulièrement critiques qui mettaient en danger la réputation du Saint-Siège et de certains prélats qui travaillaient à la Curie».
Ces rencontres pourraient être une «clé de lecture» pour comprendre son arrestation et les «vicissitudes» qui la touchent aujourd’hui, affirme-t-elle. Elle note en particulier un entretien avec le cardinal Parolin survenu en septembre 2018 pendant lequel elle aurait transmis des informations qu’elle aurait reçues qui «mettaient en lumière des personnages laïcs et des situations ambiguës qui auraient pu compromettre la réputation du Saint-Siège», notamment un «dossier volumineux» reçu de l’étranger sur celui appelé à devenir le successeur du cardinal Becciu, l’actuel substitut Mgr Edgar Peña Parra.
Le dossier contenait des «photos et déclarations sur les conduites immorales présumées du prélat» qu’elle souhaitait faire vérifier par «honnêteté intellectuelle». Elle en aurait parlé avec le secrétaire d’État qui aurait «montré de la curiosité» et lui aurait demandé une «copie papier» du dossier qu’elle aurait transmis, voulant s’assurer qu’il ne s’agissait pas d’un «faux dossier confectionné au détriment du prélat».
Elle remarque que seulement dix jours après cette rencontre, le 12 octobre 2018, l’hebdomadaire L’Espresso avait sorti une enquête sur ce fameux dossier – l’article dénonçant vivement les «poisons» visant Mgr Peña Parra. Le «même hebdomadaire», souligne-t-elle, a publié la «campagne diffamatoire» visant le cardinal Becciu en septembre 2020 – le lendemain de sa démission –, agissant contre elle et lui par la suite comme un «assassin médiatique».
8 – Concurrence au sein des services secrets italiens
Cecilia Marogna affirme avoir poursuivi ses travaux pour libérer certains otages malgré de nombreuses difficultés – notamment la crise pandémique. Elle cite dans son rapport les noms d’autres otages du Sahel, le Père Macalli et Nicola Chiaccio, ainsi que l’humanitaire franco-suisse Sophie Pétronin – cette dernière étant alors enfermée avec Sœur Narvaez – dont elle affirme avoir obtenu des vidéos constituant des «preuves de vie exclusives» en juillet 2020. À partir de ce moment, elle affirme avoir subi «plusieurs tentatives de boycot», évoquant notamment les services secrets italiens.
Elle assure notamment qu’un agent nigérian se présentant comme un référent du général Caravelli – vice-directeur de l’AISE jusqu’en 2020 où il devient directeur à la place du général Carta – aurait fait savoir au Sahel qu’il était prêt à payer une rançon pour les personnes apparues vivantes sur les vidéos. Elle aurait rapporté en urgence l’information au cardinal Becciu qui en aurait averti le pape François, et l’opération aurait été «rapidement bloquée», le Vatican ne voulant toujours pas payer de rançon pour éviter d’autres enlèvements.
Elle explique aussi s’être tournée vers le cardinal Becciu pour lui demander de téléphoner à des responsables de la sécurité du Mali et du Burkina Faso. Ces derniers voulaient rencontrer le pape après avoir réussi à libérer les otages. Cependant, «l’instabilité» de la ligne du cardinal lui fait penser qu’il aurait été victime «d’interférences provenant peut-être du système de sécurité et de renseignements du Vatican».
Cecilia Marogna explique que la nomination du général Carta à la tête de l’entreprise italienne d’armements Leonardo et son remplacement par le général Caravelli auraient mis à mal ses efforts pour permettre une libération vaticane-italienne de trois otages en même temps, les deux Italiens et la religieuse colombienne. Devant se «confronter» au nouveau venu, elle aurait été avertie par le cardinal Becciu de la possible rivalité entre le général Caravelli – qui serait lié à Pierluigi Bassi, l’intermédiaire des Russes – d’un côté et son prédécesseur le général Carta, soutenu par un «parlementaire italien». Cecilia Marogna insiste sur le fait que la relation de confiance entre le cardinal Becciu, le général Carta et elle-même n’est pas liée à leurs origines communes sardes.
Grâce à l’aide du cardinal Becciu, elle aurait fini par réussir à joindre le général Caravelli qui lui aurait déclaré qu’ils avaient des façons de travailler «très différentes» et qu’il ne souhaitait pas poursuivre leur collaboration, ce qu’elle interprète comme une conséquence de sa proximité avec le général Carta. Le cardinal Becciu aurait alors invité le général récalcitrant chez lui, avec l’autorisation et même la présence du pape, mais le général n’aurait pas répondu à l’invitation.
Pour poursuivre ses missions, Cecilia Marogna explique s’être alors tournée vers deux autres personnes proches des services secrets italiens, l’ex-agent Marco Mancini et l’ancien membre de la section criminelle des Carabinieri de Milan, Giuliano Tavaroli. Ces derniers auraient agi de façon très étrange, ce qu’elle interprète a posteriori comme une diversion pour pas qu’elle ne s’occupe plus des otages. Son arrestation «illégale» le 13 octobre 2020 par la Guardia di Finanza à Milan après le dépôt d’un mandat d’arrêt du Vatican à Interpol conduit alors à son internement dans la prison de San Vittore jusqu’au 30 du même mois, période pendant laquelle elle affirme ne plus avoir d’information sur l’avancée des négociations sur la libération.
9 – Les messages Facebook de Francesca Chaouqui
Entre 2017 et 2020, le cardinal Becciu aurait demandé à Cecilia Marogna de «surveiller» son compte Facebook, sur lequel il était très peu actif, parce que Francesca Immacolata Chaouqui, une ancienne employée du Saint-Siège condamnée pour son implication dans les Vatileaks, lui envoyait des messages sur ce compte. Étant donnée leur nature, que Cecilia Marogna décrit comme «insistante, menaçante et péremptoire», le cardinal lui aurait demandé de les enregistrer pour en garder trace.
Cecilia Marogna explique que les messages reçus par le cardinal le 29 septembre faisaient référence aux frères du cardinal et à elle-même sous le nom de «Cecilia Zulema», un surnom qu’elle dit avoir retrouvé dans plusieurs articles de presse «de nature tout aussi diffamatoire et mensongère» publiés le 5 octobre 2020. Elle souligne que ce nom est utilisé dans plusieurs interrogatoires par Mgr Perlasca qui affirme la connaître sous ce nom.
Elle estime en outre que la «protectrice» de Mgr Perlasca, Genevieve Ciferri Putignani, citée par le cardinal Becciu dans son témoignage, aurait pu installer un «dispositif électronique» dans l’appartement du cardinal Becciu pour l’espionner et transmettre des informations à Francesca Chaouqui, qui les auraient utilisées dans des entretiens avec la presse.
10 – DGSE et assassinat d’un humanitaire en Colombie
Cecilia Marogna affirme avoir cependant continué à travailler avec les services secrets colombiens, qui eux-mêmes auraient collaboré avec les services secrets français – la DGSE – pour libérer l’otage franco-suisse Sophie Pétronin et la religieuse colombienne ensemble. Une collaboration qui, explique-t-elle, serait liée au manque d’expérience des forces colombiennes dans le Sahel et à une proximité entre leurs services depuis le cas de l’enlèvement de Ingrid Betancourt par les Farcs entre 2002 et 2008.
Elle fait le lien entre les obstacles qu’elle a dû affronter et la mort de Mario Paciolla, journaliste italien travaillant pour les Nations unies tué le 15 juillet 2020 en Colombie dans des conditions pour l’heure non élucidée. Elle considère que ces obstacles pourraient être le résultat de l’action d’une personne «probablement d’extraction italienne» qui aurait appris l’existence de ce lien franco-colombien. Un lien qui aurait pu aller à l’encontre d’intérêts propres à des services italiens ou créer des jalousies, estime-t-elle. (cath.ch/imedia/cd/mp)