Une nouvelle délégation d'autochtones du Canada reçue par le pape
« Nous avons été très touchés lorsqu’il nous a demandé pardon », a déclaré David Chartrand, président de la Fédération des Métis du Manitoba (FMM) à l’issue de l’audience de sa délégation avec le pape François, le 21 avril 2022.
Comme le 1er avril dernier en présence d’autres représentations autochtones, le pontife a demandé pardon pour les mauvais traitements subis dans les pensionnats pour enfants autochtones gérés par l’Église catholique, scandale historique qui devrait être au cœur d’un prochain voyage du pontife en terre canadienne, potentiellement en juillet prochain.
« Nous avons pu voir qu’il pensait ce qu’il disait […], que ces excuses comptaient pour lui », s’est réjoui David Chartrand lors d’une conférence de presse improvisée place Saint-Pierre peu de temps après avoir été reçu avec un cinquantaine de représentants au Palais apostolique au Vatican. « Beaucoup ont pleuré », a-t-il souligné, expliquant lui avoir offert des croix en bois perlé, une technique pratiquée par son peuple depuis 200 ans et des « pantoufles » traditionnelles afin qu’il « marche » avec eux.
« Nous devons soutenir le Vatican pour que nos églises restent ouvertes », a encore affirmé celui qui a confié avoir été intimidé par la présence du pontife lors de l’audience. « Nous sommes inquiets pour les églises qui ferment au Canada, et nous avons besoin qu’elles restent ouvertes », a-t-il précisé.
Dissensions au sein du mouvement Métis
Moins d’un mois après la venue d’une grande délégation comportant des représentations Métis, Inuit et des Premières Nations, le pontife a reçu une nouvelle représentation d’autochtones du Canada, la FMM. Il s’agit d’une organisation politique métisse régionale qui s’est récemment séparée du Rassemblement National Métis (RNM) – présent à Rome fin mars – sur fond de fortes dissensions en matière de gouvernance et de finance.
David Chartrand a par ailleurs expliqué que le message qu’il avait porté au pontife était « différent » de celui porté par l’autre délégation métisse. Outre leur commune volonté d’obtenir des excuses de la part du pape et d’évoquer un chemin de réconciliation, il a considéré avoir « plus mis l’accent sur l’espoir et la revitalisation » de l’Église dans son pays, soulignant le rôle joué par le catholicisme dans l’identité métisse revendiquée par sa communauté.
À rebours, la représentante du RNM avait simplement évoqué « l’importance » qu’avait le catholicisme pour certains membres de sa communauté lors d’une conférence de presse organisée à Rome le 28 mars dernier. Cependant, le voyage de la délégation de la RNM – contrairement à celui de la FMM – était organisé par la Conférence des évêques catholiques du Canada.
Le pape sur les pas de Louis Riel ?
Le peuple métis est une nation semi-autochtone et existant avant la création du Canada. Résidant principalement dans les Prairies du centre du pays, il est né du métissage de femmes indigènes – des peuples Cris, Ojibwés, Saulteaux ou Dénés – et de trappeurs français et plus tard anglais ou écossais. Le sentiment d’appartenance collective des Métis c’est formé sous l’influence de figures telles que Louis Riel, général catholique francophone ayant résisté à l’expansion canadienne à la fin du XIXe siècle.
Lors de l’audience, David Chartrand a demandé au pontife de venir dans le Manitoba pendant son voyage pour bénir la tombe de Louis Riel. Il s’agit, selon lui, d’un homme qui a « tout donné, non seulement pour le peuple métis mais aussi pour l’Église ». Louis Riel, bien que chef de guerre, était célèbre pour ne pas porter d’arme à feu mais seulement un crucifix sur lui. Son mysticisme – qui a tourné à la folie à la fin de sa vie – a cependant été condamné par l’Église qui y a vu une dérive hérétique, le leader se réconciliant néanmoins avec Rome peu avant d’être exécuté.
Compréhension en cas de non venue du pape
Pour l’heure, le Manitoba ne fait pas partie des destinations qui ont été évoquées dans les médias canadien pour la venue du pontife. Le média canadien CBC a par exemple évoqué un voyage de quatre jours avec trois escales à Edmonton (Ontario), Québec et Iqaluit (Nunavut, territoire inuit). Si le pontife a exprimé son souhait de se rendre au Canada pour la Sainte Anne, le 26 juillet, pour l’heure aucune annonce officielle du déplacement n’a été faite par le Saint-Siège.
Se disant conscient que le pontife ne pouvait aller partout, notamment en raison de santé, David Chartrand a affirmé en avoir parlé avec le pape. « S’il ne peut pas le faire, nous accepterons quand même ses excuses et nous irons à sa rencontre là où il ira », a-t-il affirmé, tout en soulignant les avantages que représentaient sa région de la « Red River » en raison de la présence de la plus grande population indigène. (cath.ch/imedia/cd/mp)