Le pape François, sur la place St-Pierre| © Jacques Berset
Vatican

Le pape qui aime Verlaine et Wagner et qui veut être un bon prêtre

Dans son ouvrage de dialogue avec des pauvres du monde entier à paraître le 1er avril 2022, le pape François livre des confidences inédites et spontanées,  sur ces goûts artistiques et musicaux, son régime alimentaire, son enfance et sa foi

Son poème favori
Vous savez, j’ai une part mélancolique. Et j’aime beaucoup me répéter un poème français qui reflète bien mon coeur quand il est mélancolique. Il est de Verlaine : »Les sanglots longs des violons de l’automne blessent mon coeur d’une langueur monotone…» Il y a un autre poète français que j’aime beaucoup, c’est Baudelaire, et ses Fleurs du mal».

Son livre préféré
J’aime les classiques. Et parmi eux, mon préféré est sûrement l’Énéide. J’ai lu aussi beaucoup d’auteurs modernes. Mais les classiques m’ont davantage formé.

Sa musique apaisante
Moi, ce qui m’adoucit, ce qui me «désenrage» et ce qui me calme, c’est d’écouter de la musique. Et plus précisément Wagner.

Son saint favori
Sainte Thérèse de Lisieux.

Son régime alimentaire
Jusqu’à il y a trois ans, je mangeais de tout. Maintenant malheureusement, j’ai une sérieuse complication intestinale, une diverticulite aiguë, et je dois me nourrir de riz bouilli, de pommes de terre bouillies, de poisson grillé ou de poulet. Du simple, simple, simple…

La couleur de ses pantalons
Deux jours après mon élection, on m’a dit : «Saint-Père, il faut que vous portiez des pantalons blancs.» Je leur ai répondu : «Je ne suis pas glacier!»

Sa méthode d’apprentissage de l’allemand
Tu me rappelles ces livres pour l’apprentissage des langues qui s’appelaient «Assimil». […] C’est comme cela que j’ai commencé à étudier l’allemand, et c’est ainsi que l’on ouvrait la porte à de nouvelles langues.

Ce qui le met mal à l’aise
Quand on commence à chanter mes louanges, je me sens mal à l’aise, parce que je sais que ce n’est pas la vérité. Ce qui me convient, c’est la proximité avec les gens, qui ne doivent donc pas faire de moi une espèce de divinité ou me vénérer.

Sa première désillusion
Je me souviens comme si c’était hier de ma première désillusion au sujet de mon père, ou tout au moins la première dont je me souvienne. Je devais avoir cinq ou six ans. Mon père m’avait amené à la clinique pour une opération des amygdales. (À cette époque, l’infirmier s’emparait de vous, il vous asseyait, vous maintenait immobile, vous plaçait entre les dents quelque chose qui vous empêchait de fermer la bouche et avec une paire de ciseaux, couic ! C’était comme je vous le dis. Il y avait du sang partout. On ne vous laissait même pas le temps de crier, on vous apportait une glace, et avec la glace, on oubliait tout!)
Quand nous sommes sortis de la clinique, mon père a appelé un taxi pour rentrer à la maison. Quand on est arrivés, il a payé le chauffeur. J’étais interloqué ! Je ne pouvais pas parler parce que j’avais très mal, et il fallait que je mange ma glace pour calmer la douleur. Mais deux jours plus tard, quand j’ai recommencé à pouvoir parler, la première chose que j’ai dite à mon père a été : «Pourquoi as-tu payé le chauffeur ?» Il m’a expliqué le travail de cet homme. Je n’en croyais pas mes oreilles : «Comment ? Cette voiture n’est pas à toi ?» Dans l’idéalisation de mon père, j’étais persuadé qu’il était propriétaire de toutes les voitures de la ville, et ce fut ma première déception d’apprendre que ce n’était pas le cas.

Son accident de voiture
J’avais roulé jusqu’à une ville située à 250 kilomètres de Buenos Aires, cinq heures de route, pour une ordination sacerdotale. Je suis allé à cette ordination, et quand elle a été finie, je me suis dit : «Je ne vais pas manger sur place parce que ça va m’endormir.» Et je suis reparti. Alors que je conduisais, il s’est mis à pleuvoir et à un moment la voiture a dérapé. J’avais cinquante ans et quelques, et j’ai pensé : «Quand ma vignette arrivera à terme, je ne la renouvellerai pas.» Car il m’a semblé que cet accident était un signe.

Ses doutes
Ce n’est pas que j’aie pensé ne plus pouvoir croire en Dieu, mais il m’est en effet arrivé de me demander : «Où est Dieu ?» Ce fut une expérience difficile, obscure. Tout semblait s’assombrir. Cela m’est peut-être bien arrivé au moment de mon exil de Buenos Aires, en Allemagne, puis à Còrdoba, en Argentine. Des moments très difficiles, oui, très sombres. […] J’étais mal dans ma peau. J’ai prié, je me suis mis dans les mains de Dieu, j’ai demandé pardon, je me suis laissé aider.

Sa prière à son ange gardien
Ange de Dieu qui est mon gardien
Une piété éternelle m’a recommandé à toi 
Aide-moi, sauve-moi, et porte-moi la vie éternelle

Ses principaux défauts 
Je suis soupe au lait. Comment le dire ? Impatient… Je réponds quelquefois trop vite. Je me suis parfois cru supérieur aux autres. Je n’ai parfois pas eu la patience d’attendre. Et ce sont des défauts qui sont tous liés au sentiment d’autosuffisance, qui est une racine très amère, très laide, que je dois tout le temps surveiller.

Son confesseur 
Je me confesse au Père Manuel. Un franciscain, qui m’a téléphoné aujourd’hui. Tous les quinze jours, il m’appelle et me dit : «Quinze jours ont passé.» Puis il vient, et il me confesse. Il s’appelle Manuel Blanco, il est espagnol. C’est le supérieur de l’une des communautés franciscaines de Rome.

Une question qu’il se pose le soir
Moi-même, lorsque le soir je prie et j’essaie de faire mon examen de conscience, de voir ce qui s’est passé pendant la journée, comment je l’ai vécue, une question me revient toujours : l’ai-je vécue dignement ? Avec dignité ? … Et quand on parle de dignité, cela signifie le sens de la réalité des choses, l’humilité, le besoin des autres. 

Son plus grand désir de pape
Je dirais spontanément : être un bon prêtre. 

Le pape François, sur la place St-Pierre| © Jacques Berset
24 mars 2022 | 16:12
par I.MEDIA
Temps de lecture : env. 4  min.
pape françois (2303), pauvres (103)
Partagez!