Mgr Valerio Lazzeri, évêque de Lugano | Alessandro Crinari 
(Diocesi Lugano)
Suisse

Mgr Lazzeri soutient une famille éthiopienne menacée d’expulsion

Mgr Valerio Lazzeri, évêque de Lugano, soutient l’appel lancé par la fondation «Azione Posti Liberi», en faveur d’une famille d’origine éthiopienne résidant au Tessin sommée de quitter prochainement le pays. Un engagement au nom de l’Evangile, mais aussi de la tradition helvétique d’assistance et d’accueil.

Le 8 janvier 2022, le quotidien tessinois Corriere del Ticino a publié un «appel urgent», demandant au président de la Confédération, Ignazio Cassis, au Conseiller d’Etat tessinois chargé du dossier, Raffaele de Rosa, ainsi qu’à Mgr Valerio Lazzeri, évêque de Lugano, que la jeune India, 19 ans, et sa famille, ne soient pas expulsés en Ethiopie, mais puissent rester en Suisse avec un «permis de séjour pour cas de rigueur».

Sans citoyenneté

L’appel, publié sur une page entière et co-signé par des dizaines de personnalités politiques et membres de la société civile suisse-italienne bien connues, faisait suite à l’engagement d’une des professeures de la jeune fille.

J’espère un miracle, celui d’une loi qui prévoit l’amour.

Enseignante de la jeune India

Avant Noël, elle avait lancé un premier appel, en espérant «un miracle, celui d’une loi qui prévoit l’amour». Ceci, après que la demande d’asile déposée il y a 10 ans par la famille ait été refusée. L’affaire avait eu un certain retentissement médiatique dans la région.

«India vit au Tessin depuis 10 ans, mais pour l’État, elle n’existe pas. Elle n’est pas une citoyenne», lit-on dans la lettre ouverte lancée par ‘Azione Posti Liberi’, une fondation tessinoise qui encourage et soutient les initiatives en faveur de l’aide aux demandeurs d’asile contraints de quitter leur pays ou leur famille en raison de conflits armés ou de situations de violence.

«Et pourtant, elle ne peut s’empêcher de respirer, de grandir, de s’intégrer au pays qui, entre-temps, est devenu sa maison. Elle connait l’italien mieux que sa langue maternelle. Nous ne pouvons pas tourner le dos à ce qui se passe chez nous; nous ne pouvons pas faire comme si de rien n’était», poursuit l’appel.

«Protéger la dignité»

Directement concerné par cette requête publique, après en avoir pris connaissance, Mgr Lazzeri a rapidement répondu à l’appel, en partageant les propos des signataires. Il a ainsi considéré comme un devoir de donner un signal fort, en faveur d’une solution définitive à la précarité juridique dans laquelle la famille vit depuis une dizaine d’années. Au nom de la foi chrétienne, mais aussi de la longue tradition humanitaire de la Suisse.

Un engagement plutôt rare pour un évêque, qui témoigne d’une parole chrétienne engagée, face à cette situation dramatique et douloureuse, cas emblématique d’une réalité qui touche plusieurs familles requérantes d’asile en Suisse.

Aider et accueillir ne répond pas seulement à une exigence évangélique, mais appartient à la meilleure part de notre tradition culturelle nationale.

Mgr Valerio Lazzeri

Dans sa déclaration, l’évêque de Lugano a exprimé «son soutien à l’appel urgent promu par la ‘Fondazione Azione Posti Liberi’ concernant la situation particulière de la famille d’India» qu’il ne connait pas personnellement.

L’évêque de Lugano espère vivement «que les autorités compétentes, en donnant la priorité à la nécessité de protéger l’intégrité et la dignité des plus faibles, trouveront le moyen de faire en sorte que ces personnes en difficulté, et tous ceux qui se trouvent vivre dans des circonstances tout aussi dramatiques, reçoivent l’aide et l’accueil qui non seulement répondent à une exigence évangélique, mais appartiennent à la meilleure part de notre tradition culturelle nationale».

Procédure critiquée

Une position qui s’inspire notamment des mots exprimés par le pape François à Lesbos (Grèce), début décembre, et que l’appel urgent reprend dans son argumentation: «Le respect des personnes et des droits de l’homme, surtout sur le continent qui ne manque pas de les promouvoir dans le monde entier, doit toujours être sauvegardé et la dignité de chaque personne doit être placée avant tout».

La jeune India vit au Tessin avec son frère majeur Nurhusien, qui a été contraint de quitter son travail et ses activités sportives, ainsi que sa mère Munaja. L’histoire de la famille, originaire d’une région à la frontière entre Ethiopie et Érythrée, bien intégrée et appréciée au Tessin, n’est pas nouvelle au sud des Alpes et a déjà été relatée par plusieurs médias.

Après des années dans les limbes, une femme seule avec ses enfants doit retourner à la merci des dangers qu’elle avait courageusement fuis. Où est la faute?»

Fondation ‘Azione Posti Liberi’

La lettre ouverte arrive à quelques jours de la décision définitive. De fait, ne possédant aucun document, la famille est apatride, car aucune des deux nations ne la reconnait. Pour la Suisse, elle vient d’Ethiopie, et doit être rapatriée, car le pays est considéré aujourd’hui comme sûr. A noter que de violents combats opposent actuellement des groupes indépendantistes à l’armée éthiopienne dans la région du Tigré, justement à la frontière avec l’Erythrée.

Les signataires critiquent la procédure helvétique en matière d’expulsion. «Après plusieurs années dans les limbes, une non-vie d’attente, d’incertitude, une femme seule avec ses enfants a dû placer son existence en mode veille et doit maintenant retourner dans un pays qui ne la reconnaît pas comme citoyenne, à la merci de tous les dangers qu’elle avait courageusement fuits. Où est la faute?» (catt.ch/cath.ch/red/dp)

Mgr Valerio Lazzeri, évêque de Lugano | Alessandro Crinari (Diocesi Lugano)
10 janvier 2022 | 16:39
par Davide Pesenti
Temps de lecture : env. 4  min.
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