Davide Pesenti, actuellement journaliste à RTSreligion, prendra ses fonctions le 1er mars 2022 | © Bernard Hallet
Suisse

Davide Pesenti est le nouveau secrétaire général de la CES

Davide Pesenti, actuellement journaliste à RTSreligion, a été nommé secrétaire général de la Conférence des évêques suisses (CES). Dans sa nouvelle fonction, le Grison de 39 ans, de langue maternelle italienne, veut être un «trait d’union» entre les diverses sensibilités et cultures de l’Eglise en Suisse.

De nombreux Romands ont eu l’occasion d’entendre son accent chantant, de voir sa chevelure léonine et de lire sa prose journalistique. Davide Pesenti travaille depuis plus de trois ans à Cath-Info. Après avoir œuvré conjointement à cath.ch et RTSreligion, il s’était consacré dernièrement à la radio-télévision.

Une équipe qu’il quittera dès le 1er mars 2022 pour prendre le poste de secrétaire général de la Conférence des évêques suisses (CES), à 80%.

A l’âge de 39 ans, il est le deuxième laïc à occuper cette fonction après Erwin Tanner – qui rejoint pour sa part la direction de Missio – le Grison quadrilingue fait part à cath.ch de sa vision et de ses motivations.

Comment vous sentez-vous après cette nomination?
Davide Pesenti: J’ai en moi un mélange de beaucoup d’émotions. Je suis principalement reconnaissant pour la confiance que les évêques m’accordent. Je suis aussi enthousiaste de pouvoir occuper un poste au cœur de l’Eglise en Suisse.

En même temps, je suis conscient des grandes responsabilités que la charge implique. Je me trouve devant quelque chose de grand qui à la fois me fascine et suscite une certaine appréhension. Une tâche inspirante qui éveille en moi une forme de «sainte crainte». Mais en règle générale, je reste dans la confiance.

Comment allez-vous aborder cette fonction?
Avec beaucoup d’humilité, et de respect, notamment pour ce qui a été fait avant moi. Je me rends compte qu’en tant que secrétaire général de la CES, j’aurai la possibilité de peser quelque peu sur l’avenir de l’Eglise en Suisse. Une opportunité que j’aborde comme un service et non comme un pouvoir. Je sais que j’ai beaucoup à apprendre; je dois trouver mon rythme et connaître les rouages de la fonction. Je me donne aussi le droit à l’erreur, tout en étant sûr de pouvoir pleinement donner ce que j’ai à donner.

De quelle façon s’est passée votre nomination?
J’ai reçu un appel de Mgr Felix Gmür (évêque de Bâle et président de la CES, ndlr.), qui m’a demandé si j’étais intéressé par le poste de secrétaire général. Je l’ai remercié et dit que je devais réfléchir. J’ai passé les dix jours suivants à discerner à l’intérieur et à l’extérieur de moi sur la proposition. J’en ai parlé avec mon épouse et avec mon accompagnatrice spirituelle, que je remercie pour leurs précieux conseils.

«Je prends vraiment cette opportunité comme un appel du Seigneur»

Je suis allé manger une fondue avec Mgr Gmür afin d’approfondir les questions liées à mes éventuelles tâches.

J’ai dormi encore quelques nuits et je me suis finalement déclaré disponible pour le poste. Tout en négociant pour travailler à 80%, afin de pouvoir prendre soin de notre petit garçon, qui est né fin septembre.

Les évêques suisses ont décidé de ma nomination le 22 novembre, alors qu’ils étaient réunis à Rome pour leur visite ad limina. Ils me l’ont communiquée immédiatement.

Qu’est-ce qui vous a décidé à dire «oui»?
Je pense que la fonction de secrétaire général est bien plus qu’un poste administratif. Il s’agit d’accompagner les évêques dans leurs décisions et leurs prises de parole publique, des moments où la foi joue un rôle essentiel.

Je prends vraiment cette opportunité comme un appel du Seigneur, même s’il nous laisse toujours la liberté de refuser et que le discernement est important.

J’y ai vu aussi l’occasion de renouer avec la diversité culturelle, linguistique et ecclésiale de la Suisse. Un aspect que j’ai pu expérimenter concrètement au cours de ma vie et que j’apprécie particulièrement.

Votre passage dans les médias sera-t-il un avantage?
J’en suis persuadé. Cela m’a notamment donné une forme d’ouverture. Comme journaliste à RTSreligion, j’ai pu collaborer avec des réformés et des évangéliques. Des mondes qui m’étaient plutôt inconnus auparavant. Au fil de mes reportages à cath.ch et RTS religion, j’ai rencontré des personnes de différentes religions et différents milieux. Cela m’a ouvert encore davantage l’esprit sur le fait que les personnes peuvent avoir des sensibilités diverses tout en étant capables de dialoguer.

«Le dialogue œcuménique et interreligieux est pour moi également un point central»

Cette écoute et cette recherche d’un équilibre sont des axes que je compte bien développer à la CES.

Au-delà, que pensez-vous pouvoir apporter dans cette fonction?
Comme je l’ai évoqué auparavant, j’aime à penser que je m’inscris dans une dimension nationale. Dieu a voulu que j’expérimente la Suisse de façon transversale. J’ai grandi dans la partie italophone des Grisons, je suis ensuite allé travailler à Zurich. Puis je suis venu en Suisse occidentale pour étudier à Fribourg, où j’ai épousé une Romande. Ce qui m’a offert la capacité de m’exprimer dans les langues nationales.

J’ai également une expérience dans divers domaines ecclésiaux: la pastorale, le milieu académique et les médias.

Je compte mettre tout cela au service des défis qui, à mon sens, sont les plus cruciaux pour l’Église d’aujourd’hui.

Quels sont-ils?
Tout d’abord la communication. Mon expérience médiatique m’a permis de comprendre à quel point c’est un élément central pour l’annonce de l’Evangile dans le monde actuel. Et les médias en sont un outil précieux. Pour cette raison, la refonte de la Commission des médias de la CES sera un dossier important.

Dans cette catégorie, je mettrais aussi le défi de la synodalité, que le pape a très justement affiché comme une priorité. Je pense que l’Eglise doit trouver une nouvelle forme de dialogue, qui donne la parole à tous les baptisés, sans exclure les minorités, autant sociales qu’ecclésiales.

Le dialogue œcuménique et interreligieux est pour moi également un point central. L’Église fait partie de ce monde multiculturel. Elle doit prendre en compte ce facteur, qui permet de l’enrichir.

«L’écoute et l’équilibre sont les deux piliers sur lesquels je voudrais accomplir ma fonction»

Finalement, l’Église ne peut se passer de développer encore sa dimension sociale, la diaconie, l’attention envers les pauvres, les personnes en marge de la société. C’est au cœur de sa mission et il en va de sa crédibilité.

Il y aura aussi le débat des abus sexuels et l’enquête en Suisse, que vous devrez aussi gérer après votre entrée en fonction…
Effectivement. Pour moi, c’est une occasion que l’Église doit saisir pour jeter un regard lucide sur son passé, pour ne pas refaire les mêmes erreurs et pour installer une transparence nécessaire. Je pense qu’il faut cependant le faire sans jugement et sans procès sommaire.

Quel sera votre «style» de management?
Je compte afficher un profil discret, comme je l’ai dit, ancré dans l’humilité et le service. La CES a déjà une responsable de la communication, il vaut mieux ne pas multiplier les paroles. Je me perçois aussi dans un travail d’équipe, qui privilégie l’échange et le dialogue. L’écoute et l’équilibre sont les deux piliers sur lesquels je voudrais accomplir ma fonction.

Au-delà, j’espère pouvoir jouer le rôle de « trait-d’union » entre les diverses cultures, sensibilités, sphères de l’Église en Suisse.

Et si vous deviez avoir une devise, comme en ont les évêques?
Je choisirais un passage de la première lettre de saint Pierre: «Soyez toujours prêts à rendre compte de l’espérance qui est en vous» (1P 3,15). Cela me paraît bien correspondre à ma vision des choses: un équilibre approprié entre foi et raison, entre Grâce et travail. (cath.ch/rz)

Du journalisme à la CES
Davide Pesenti est né le 29 juillet 1982 à Locarno (TI), d’une mère tessinoise et d’un père grison. Il a grandi à Grono (GR). Après sa scolarité obligatoire dans le Val Mesolcina (1989-1998), il a fréquenté l’école cantonale à Coire (1998-2003).
Il a suivi un cursus universitaire bilingue en théologie (spécialisation en théologie systématique) et en sciences religieuses à l’Université de Fribourg et à Rome (2003-2009) – une année d’étude à l’Athénée pontifical Saint-Anselme (2006-2007).
Après avoir obtenu sa licence en théologie, il a effectué une année pastorale dans son diocèse d’origine de Coire, et a travaillé pendant deux ans comme assistant pastoral (théologien en pastorale) dans la paroisse Saint-Joseph de Horgen (ZH) (2009-2011). De 2013 à 2018, il a été assistant diplômé de l’Institut de sciences liturgiques, à Fribourg, domaine dans lequel il a produit une thèse.
Depuis 2018, il est rédacteur du portail catholique romand cath.ch et de la rédaction radio de RTSreligion. À partir de 2020, il a été en charge de produire les émissions télévisées de la RTS en Eurovision. Il est marié et a un enfant. RZ

Secrétaire général
Les tâches principales du secrétariat général de la Conférence des évêques suisses (CES), sont la préparation des assemblées ordinaires de la CES ainsi que leur suivi. Le secrétariat général soigne les relations avec les instances ecclésiales et étatiques par le biais dʼune correspondance nourrie. Il demeure en contact permanent avec les organismes, institutions et commissions ordonnés à la Conférence des évêques. Il est aussi chargé dʼentretenir les contacts avec dʼautres conférences épiscopales – notamment celles des pays voisins. CES/RZ

Davide Pesenti, actuellement journaliste à RTSreligion, prendra ses fonctions le 1er mars 2022 | © Bernard Hallet
29 novembre 2021 | 18:00
par Raphaël Zbinden
Temps de lecture : env. 6  min.
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