L'Anneau Unique du Seigneur des Anneaux représente la séduction du pouvoir et de l'argent | © Pixabay
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Tolkien et le symbolisme chrétien

Il est connu que l’écrivain britannique J.R.R. Tolkien a intégré dans son œuvre des éléments liés à sa fervente foi catholique. Le réalisateur et théologien américain Stan Williams a relevé quelques uns des symboles chrétiens les plus marquants dans la saga du Seigneur des Anneaux.

«Le Seigneur des Anneaux est bien sûr une œuvre fondamentalement religieuse et catholique», soulignait J.R.R. Tolkien. L’auteur, décédé en 1973, assurait avoir inclus ce substrat chrétien de manière inconsciente dans un premier temps, mais de façon tout à fait consciente lors de la révision de son oeuvre.

Le Seigneur des Anneaux décrit un conflit entre le bien et le mal | New Line Cinema

L’écrivain britannique souhaitait que son univers continue d’être une source d’inspiration encore longtemps après sa mort. «Tolkien avait espéré que des personnes adapteraient après lui, à l’instar d’autres mythes, les histoires de la Terre du Milieu, pour les rendre à la fois assimilables et accessibles aux nouvelles générations», relève Stan Williams. Le réalisateur et producteur de films du Michigan a écrit des ouvrages aussi bien sur la communication et le cinéma que sur la Bible et la foi catholique. Avoir un pied dans chacun de ces mondes l’a naturellement amené à s’intéresser à l’œuvre de Tolkien. Surtout après sa popularisation sur grand écran par le réalisateur néo-zélandais Peter Jackson, qui a reproduit Le Seigneur des Anneaux en trois longs-métrages, entre 2001 et 2003.

Pour le site canadien catholiceducation.org, Stan Williams a énuméré les principaux éléments de l’œuvre de Tolkien qui relèvent de la foi chrétienne.

L’Anneau «anti-sacramentel»

Dans Le Seigneur des Anneaux, les ténèbres envahissent progressivement la Terre du Milieu, où les hommes, les bêtes et la nature sont entraînés dans un combat millénaire entre le bien et le mal. Pour le réalisateur américain, cette opposition binaire ne suffit pas à faire du livre une œuvre chrétienne. Il note cependant que les héros de la saga portent, dans ce contexte apocalyptique, un message typiquement chrétien. Il pourrait se résumer ainsi: «Malgré la gravité des choses, et en dépit de la quantité de mal qu’il y a dans ce monde, il y a toujours un bien qui mérite que l’on continue à se battre».

Gandalf est une figure christique du Seigneur des Anneaux

L’Anneau Unique, qui «cristallise» les ténèbres, illustre pour sa part comment le mal peut séduire et asservir les personnes. Cet artefact magique donne à son porteur un pouvoir immense, mais le force à prêter allégeance à son véritable propriétaire, le maléfique Sauron. On peut y voir une image de la corruption qu’exerce sur l’homme l’argent et la domination.

Pour Stan Williams, l’anneau fonctionne comme un «anti-sacrement». En fonction de l’état spirituel d’une personne, un sacrement permet à la grâce de pénétrer dans une personne par le biais du domaine physique. De même, dans la Terre du Milieu, la disposition spirituelle des personnages les rend plus ou moins sensibles à ce pouvoir «anti-sacramentel» de l’anneau, qui, s’il est «mal porté», diffuse littéralement la destruction.

Le «pape» Gandalf

Dans la «confrontation ultime» entre le bien et le mal que narre Le Seigneur des Anneaux, Gandalf et Saroumane renvoient aux figures de Jésus et de Satan. Saroumane peut-être assimilé au diable en ce qu’il est une sorte «d’ange déchu», qui a trahi les forces du bien pour rejoindre celles du mal. Il essaye également de rallier Gandalf à sa cause lors de leur combat, comme le Christ est tenté par Satan dans le désert.

Gandalf reflète également la papauté. Le magicien est le chef des peuples libres et des fidèles. Il est le gardien de tout ce qui est bon dans le monde, tout en ne régnant sur aucune terre. De même que les papes de l’histoire composent avec les rois et les empereurs, Gandalf couronne, à la fin de l’histoire, le roi et le bénit pour qu’il règne dans la justice et la paix.

«La Comté reflète les enseignements sociaux du catholicisme»

Un autre personnage christique de la saga est certainement Aragorn, l’héritier de la couronne du Gondor. Les humains de la Terre du Milieu désirent ardemment le retour d’un roi sur le trône. Tout comme les chrétiens attendent le retour du Christ, qui apportera une ère de paix.

Aragorn mène la Communauté de l’Anneau, qui est constituée de représentants de différents peuples de la Terre du Milieu, dotés de dons différents adaptés à leur lutte contre le mal. Cette diversité les maintient unis. Pour Stan Williams, cela n’est pas sans rappeler la diversité des dons spirituels et des talents temporels accordés aux différents membres de la communauté chrétienne pour l’unité du corps, dont parle saint Paul.

Les Hobbits, des chrétiens idéaux?

A l’instar des chrétiens, Frodon est appelé à risquer sa vie dans une grande aventure pour sauver le monde. Le Hobbit, «comme nous, ne semble pas être à la hauteur de cette tâche», note Stan Williams. Il n’a pas de talent évident pour le combat. «Mais il est choisi, comme nous le sommes. Car nous sommes tous nécessaires à l’accomplissement du grand plan de Dieu, et même la bête la plus improbable et la plus répugnante de notre vie, semblable à Gollum, est nécessaire». Et lorsque Frodon demande: «Que peut faire un petit Hobbit?», cela renvoie à la parole d’Isaïe selon laquelle ” Un petit enfant les conduira» (11, 6).

Pour le théologien du Michigan, la Comté reflète les enseignements sociaux du catholicisme. Les Hobbits bénéficient d’une structure communautaire avec peu d’organisation formelle et très peu de conflits. Ils travaillent juste assez pour survivre et apprécient la compagnie des autres. Il n’y a pas de jalousie, pas d’avidité, et les événements inattendus sont rares. Pour Stan Williams, les Hobbits sont «les doux qui hériteront de la terre» (Mt. 5:3-12).

Frodon, le porteur de l’Anneau, est aux prises avec son pouvoir maléfique | New Line Cinema

Comme les chrétiens, les personnages de Tolkien sont appelés à jouer un rôle dans une histoire beaucoup plus grande et plus importante qu’ils n’en ont conscience. Gandalf, à la fin du livre Le Hobbit, dit d’ailleurs à Bilbon: ” Tu ne penses pas vraiment, n’est-ce pas, que toutes tes aventures et tes évasions ont été du fait de la simple chance, juste pour ton seul bénéfice? Tu n’es qu’un petit bonhomme dans le vaste monde, après tout!».

Hosties elfiques

Stan Williams note aussi maintes allusions eucharistiques. Avant que la Communauté ne quitte la Lorien, Galadriel demande à chacun de participer à un rituel d’adieu et de boire dans une coupe commune. La nourriture mystique elfique donnée à la communauté (le lembas ou pain de la route) se rapporte certainement à l’hostie. Une petite quantité de ce pain donne une force surnaturelle, qui peut nourrir un voyageur pendant plusieurs jours.

Le réalisateur américain note qu’il existe dans les livres de Tolkien bien d’autres signes faisant référence au christianisme. Mais ceux révélés peuvent déjà amener vers «une expérience plus intéressante et plus approfondie pour les chrétiens et les catholiques» de (re)lecture ou de (re)visionnage de son oeuvre. (cath.ch/ag/rz)

L'Anneau Unique du Seigneur des Anneaux représente la séduction du pouvoir et de l'argent | © Pixabay
9 avril 2021 | 17:00
par Raphaël Zbinden
Temps de lecture : env. 5  min.
C.S. Lewis (3), cinéma (131), Culture (115), J.R.R Tolkien (4), Littérature (46), Narnia (3)
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