Le Hamas interdit aux musulmans de participer aux fêtes de Noël à Gaza
Les islamistes du Hamas, qui gouvernent la bande de Gaza, ont interdit aux musulmans d’assister aux célébrations de Noël dans cette enclave palestinienne, où les chrétiens sont un petit millier, sur une population d’environ 2 millions d’habitants, essentiellement des musulmans sunnites.
Le Hamas a également interdit les festivités du Nouvel An dans les lieux publics, estimant qu’elles offensaient «nos us, coutumes, valeurs et enseignements de notre religion», a indiqué la police de l’enclave. Le ministère de l’Intérieur et le département de la police n’ont accordé d’autorisation à aucun restaurant, hôtel ou salle pour ces fêtes.
Rien à voir avec la lutte contre le Covid-19
Les autorités de Gaza n’ont pas invoqué la lutte contre le Covid-19 – qui fait des ravages dans l’enclave palestinienne – pour imposer ces mesures, qui ont suscité l’indignation des mouvements laïcs et des milieux chrétiens.
Un document interne publié le 15 décembre 2020 par Walid Owaidah, directeur général de l’Autorité générale de la prédication et de l’orientation au sein du ministère des Wakfs (Biens religieux) et des affaires religieuses de Gaza préconise de «limiter l’interaction» avec les célébrations de Noël.
Campagne des prédicateurs musulmans
Ces mesures comprennent, entre autres, l’émission d’une fatwa (décret religieux) ad hoc et une campagne en ligne sur la nécessité d’imposer des restrictions aux célébrations. En outre, le document recommande que les prédicateurs et les médias musulmans participent à la campagne.
L’Union démocratique palestinienne (FIDA), un groupe laïc de l’OLP, a exprimé son indignation face à la décision du Hamas, la qualifiant de «rupture flagrante avec les valeurs de tolérance et de fraternité qui ont toujours prévalu parmi le peuple palestinien, chrétiens et musulmans».
Violation flagrante de la Déclaration d’indépendance palestinienne
Le groupe a déclaré que la décision était une violation flagrante à la fois de la Déclaration d’indépendance palestinienne et de la Loi fondamentale palestinienne, qui stipulent le rejet de l’intolérance et soulignent le droit de tous de pratiquer librement leurs rites religieux. Les islamistes du Hamas ont défendu leur décision, affirmant qu’elle ne s’applique qu’aux musulmans qui assistent à des célébrations non musulmanes.
Des militants palestiniens ont condamné cette dérive du Hamas, la qualifiant de « raciste » et y voyant le signe que le mouvement islamiste voulait en finir avec la présence chrétienne à Gaza. Ils ont laissé entendre que cette décision n’était pas différente de celles prises par Daech, l’Etat islamique, et les Talibans. «Ces gens ne reconnaissent pas les chrétiens comme des natifs du pays», a déclaré l’activiste politique Mohammad Abdel Salam.
Dans l’après-midi du 19 décembre, en tentant de désamorcer les polémiques, le Ministère contrôlé par Hamas a publié un communiqué pour préciser que les mesures prévues n’étaient pas dirigées contre les pratiques liturgiques et dévotionnelles des chrétiens de Gaza, présentés comme «des compatriotes et compagnons dans la lutte pour la cause palestinienne» mais s’adressaient exclusivement aux musulmans qui participent à des célébrations religieuses non islamiques.
Vive réaction du Père Faltas
Le Père franciscain Ibrahim Faltas, religieux égyptien de la Custodie de Terre Sainte, connu pour sa proximité vis-à-vis du peuple palestinien, a qualifié la déclaration ministérielle de »page noire» de l’histoire du Hamas. Il blâme le mouvement islamiste pour avoir tenté «d’empêcher le peuple de célébrer ensemble la fête la plus belle de Palestine, la fête au cours de laquelle l’attention de millions de personnes du monde entier est attirée pour suivre avec enthousiasme les détails de cette célébration à Bethléem, capitale de la Nativité, qui devient capitale de la joie en Palestine».
«Noël – poursuit le religieux franciscain s’adressant aux militants du Hamas – n’est-elle pas l’anniversaire du Messager de l’Amour et de la Paix, ce Christ Jésus fils de Marie que vous honorez en tant que prophète de Dieu et qui est cité dans le Coran 25 fois ? Et la Vierge Marie n’est-elle pas mentionnée 34 fois dans le Coran ? Noël n’est-elle pas la fête de Bethléem, devenant aussi une source de revenus pour la Palestine et pour le peuple palestinien ?» (cath.ch/jpost/fides/be)