Pakistan: chrétiens accusés de blasphème «acquittés» par des oulémas
Six balayeurs chrétiens pakistanais accusés de blasphème ont été « acquittés » par le Conseil des oulémas du Pakistan. Cette décision a été saluée par Mgr Samson Shukardin, évêque d’Hyderabad, soulignant qu’elle « renforcera la paix et l’harmonie entre les personnes de différentes religions ».
L’évêque franciscain a déclaré apprécier « l’action rapide, l’engagement et la décision par laquelle le Conseil des oulémas du Pakistan a enquêté », contribuant à faire en sorte que « les minorités religieuses ne vivent pas dans la crainte de fausses accusations de blasphème ».
Les six balayeurs chrétiens étaient accusés d’avoir jeté aux ordures des opuscules contenant le nom de Mahomet et donc étaient passibles du délit de blasphème.
Risques d’homicides
Mgr Samson Shukardin estime que cette décision de responsables islamiques « fait espérer que l’Etat de droit au Pakistan sera respecté et que les innocents pourront recevoir justice. Six hommes et leurs familles pourront vivre en paix, sans le stress et la peur dans laquelle ils ont vécu pendant plus d’une semaine. En effet, dans ce genre de cas, la situation se fait immédiatement très tendue et peut dégénérer en violences ou en homicides ».
Mgr Shukardin dit sa reconnaissance aux oulémas pour avoir examiné la question avec ouverture et pour avoir rendu justice à des innocents. « Si une telle question a été résolue de manière pacifique et avec objectivité, cela signifie qu’il existe des personnes de bonne volonté, désirant la justice, contraires à l’injustice et à la violence au Pakistan ».
Selon le rapport d’enquêtes réalisé par la police, les six balayeurs chrétiens ont été accusés d’avoir jeté aux ordures des opuscules contenant le nom de Mahomet le 25 novembre dernier. La question a été envoyée au Conseil des oulémas du Pakistan formé de spécialistes des traditions législatives islamiques. Les membres du Conseil ont mené une enquête rapide, concluant que l’ensemble des prévenus étaient analphabètes et donc innocents. Les chrétiens ont été renvoyés chez eux sains et saufs.
Engagement du Conseil des oulémas
Le Père dominicain James Channan, directeur du Peace Center de Lahore, commentant cette affaire, a déclaré à l’agence vaticane Fides : « La décision du Conseil des oulémas démontre que les accusations de blasphème peuvent être retirées après des enquêtes sérieuses et transparentes. Nous apprécions les efforts d’Allama Tahir Mehmood Ashrafi, président du Conseil des oulémas, promoteur du dialogue interreligieux. Il a promis publiquement qu’aucun faux cas de blasphème ne sera promu contre personne au Pakistan ».
Parlant récemment dans le cadre d’une conférence de presse aux côtés de Mgr Sebastian Shaw, archevêque de Lahore, Allama Tahir Mehmood Ashrafi a relevé qu’au Pakistan, plus de 90% de cas d’accusations de blasphème se démontrent faux et privés de fondement.
Sur la base de telles données, les chrétiens demandent depuis longtemps une modification de la loi de manière à ce qu’elle ne puisse plus être instrumentalisée pour des fins étrangères à son objet. Ce sont souvent des voisins musulmans, notamment pour s’emparer de propriétés appartenant à des chrétiens, qui lancent de fausses accusations de blasphème, rapidement récupérées par des religieux fanatiques.
Le cas de la chrétienne Asia Bibi, condamnée à mort en 2010 pour de fausses accusations de blasphème et qui a passé 9 ans en prison avant d’être libérée et « exfiltrée » à l’étranger pour échapper à la haine de chefs religieux ayant juré sa mort. (cath.ch/fides/be)