Le pape Jean Paul II fait l'objet d'une profonde vénération dans de nombreux endroits du monde | © David Berkowitz/Flickr/CC BY 2.0
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Faut-il repenser la canonisation des papes?

Le récent rapport du Vatican sur l’ex-cardinal Theodore McCarrick, convaincu d’abus sexuels, a écorné l’image de saint Jean Paul II. L’historien de l’Eglise Klaus Unterburger, professeur à la Faculté de théologie catholique de l’Université de Ratisbonne (Allemagne), appelle à repenser la canonisation des papes.

Klaus Unterburger a rappelé, le 14 novembre 2020, sur le portail de l’archidiocèse de Cologne domradio.de, qu’il existait des critères et des règles bien définis pour la canonisation des papes. L’historien allemand a suggéré que le Vatican avait cédé à la pression de nombreux croyants pour procéder à la canonisation très rapide du pape polonais, décédé en 2005 (canonisé en 2014). L’émotion causée par sa mort, après une longue période de souffrances, pourrait expliquer, selon lui, pourquoi le Vatican n’a pas pris le temps indiqué pour le processus.

Le soupçon McCarrick

Le rapport sur Theodore McCarrick, publié par le Saint-Siège le 10 novembre 2020, a mis en lumière l’inaction de Jean Paul II face aux rumeurs persistantes d’abus sexuels autour du cardinal américain, renvoyé de l’état clérical en 2019. Klaus Unterburger a estimé, sur domradio.de, qu’il fallait sérieusement examiner si le pontife polonais avait «regardé ailleurs» ou avait seulement mal jugé la situation. Il aurait pu être induit en erreur par son expérience des campagnes de diffamation menées sous les anciens régimes communistes du bloc de l’Est contre des dignitaires de l’Eglise.

«Toujours les enfants de leur temps»

Klaus Unterburger relativise cependant les exigences concernant la béatification et la canonisation. Ces processus n’affirment pas que la personne ait mené «une existence sans faute et complètement irréprochable», mais qu’elle ait donné totalement sa vie à Dieu.

Klaus Unterburger, professeur de l’histoire de l’Eglise à la Faculté de théologie catholique de l’Université de Ratisbonne | Universität Regensburg

L’historien allemand rappelle en outre que les saints sont toujours «des enfants de leur temps» et sont façonnés par le contexte de leur époque.

On peut également être sceptique d’une certaine manière quant à la pratique selon laquelle les papes canonisent leurs prédécesseurs en aussi grand nombre, car il s’agit après tout d’une forme d’auto-sacralisation, et on peut aussi se poser la question de l’impartialité, lorsque l’on doit sa propre ascension à son prédécesseur.

Mais l’historien admet également que la dévotion de beaucoup de catholiques est directement liée à la figure des papes. Une situation toujours vraie dans notre société médiatique actuelle.

La tendance à considérer les saints comme des figures divines n’est pas nouvelle. Tout au long de l’histoire, la vénération des saints a menacé à plusieurs reprises de se transformer en adoration. Les saints et les bienheureux sont des personnes qui ont abordé et vécu l’Evangile d’une manière particulière. Ils sont des modèles pour les fidèles et peuvent intercéder pour eux auprès de Dieu. Il faut ainsi bien garder à l’esprit que les saints ne peuvent et ne veulent rien accomplir par eux-mêmes. (cath.ch/domradio/rz)

Le pape Jean Paul II fait l'objet d'une profonde vénération dans de nombreux endroits du monde | © David Berkowitz/Flickr/CC BY 2.0
17 novembre 2020 | 10:54
par Raphaël Zbinden
Temps de lecture : env. 2  min.
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