Mgr de Moulins-Beaufort dénonce «l'idéologie de l’islamisme»
Dénonçant «l’idéologie de l’islamisme», le président de la Conférence des évêques de France (CEF) appelle les catholiques à s’engager dans une «guerre spirituelle» contre l’islamisme et à poursuivre le dialogue avec les musulmans.
Dans une interview accordée le 1er novembre 2020 au quotidien français «La Croix», Mgr Eric de Moulins-Beaufort dénonce «la pathologie de l’islam que représente l’islamisme».
Après l’attentat terroriste dans la basilique Notre-Dame de l’Assomption, à Nice, qui a coûté la vie, jeudi 29 octobre, à trois fidèles – Vincent Loques, le sacristain, Nadine Devillers, 60 ans, et Simone Barreto Silva, une Brésilienne de 44 ans résidant en France – le président de la CEF qualifie de «dramatique» le fait de voir que des jeunes gens se laissent happer par cette idéologie et en deviennent les exécutants.
«Menace traître et aveugle»
Le 29 octobre, la Conférence des évêques de France (CEF) demandait déjà «malgré la douleur [de] faire face à cette menace traître et aveugle«.
Face à ce nouvel attentat visant des catholiques dans une église, Mgr de Moulins-Beaufort admet qu’il faut accepter d’être en colère ou d’avoir peur. «Ce sont des réactions humaines. Mais qu’en faisons-nous? Ce dimanche de la Toussaint, nous avons entendu de manière providentielle les Béatitudes: elles résonnent comme un appel à demander la grâce de Dieu pour transformer notre colère et notre peur en une énergie pour un bien meilleur. Ne restons pas enfermés dans la peur ou le désespoir et prisonniers de la colère qui peut se changer en haine. Les Béatitudes ouvrent une voie et le Christ nous donne l’exemple».
«La France a admirablement réagi»
Le président de la CEF rappelle qu’après les attentats contre Charlie Hebdo, le Bataclan ou l’assassinat du Père Jacques Hamel, «la France a admirablement réagi» et que face à la violence terroriste, «le pays a toujours montré beaucoup de dignité, de cohésion, et de manière assez ferme, même lorsqu’il était par ailleurs agité par des mouvements sociaux. Après l’assassinat du Père Hamel déjà, beaucoup d’observateurs en France et à l’étranger avaient été impressionnés par la réaction des catholiques français. Je ne doute pas qu’il en sera de même après l’attentat de Nice».
Face à la menace islamiste, le président de la CEF salue le fait que «les [responsables] politiques, les journalistes, avec une certaine fermeté, ainsi que les responsables musulmans de notre pays, avec un courage certain, osent désigner d’où vient le mal. Il faut pouvoir pointer la pathologie de l’islam que représente l’islamisme. Cette idéologie mondialisée, nourrie par des individus et attisée par les discours de certains responsables politiques étrangers, exerce une influence considérable, notamment grâce à internet». Il rappelle que le Christ nous invite à croire qu’il vaut la peine d’aller vers l’autre: «pas pour lui faire la guerre, mais anticiper la communion éternelle».
Il est possible et nécessaire de s’estimer mutuellement
Il estime malgré tout, que si une part de risque existe, «nous croyons que ni la haine ni l’oppression ne l’emporteront. Les mesures de police, qui sont absolument nécessaires, ne suffisent pas. Avec les musulmans que nous rencontrons, nous osons croire qu’il est aussi possible que nécessaire de se connaître et de s’estimer, sans partager la même foi».
N’hésitant pas à dire que «nous sommes en guerre contre cette idéologie de l’islamisme», Mgr de Moulins-Beaufort juge que c’est un combat à l’échelle du monde dans lequel les musulmans sont également partie prenante. «Elle fait beaucoup de mal à ceux qui veulent vivre leur foi musulmane. Peut-être faudrait-il que davantage encore de musulmans, dans notre pays et ailleurs, puissent le dire fermement. La violence est dans le cœur de tous les hommes, y compris le mien. Il est arrivé aussi que des chrétiens violents utilisent leur foi pour justifier domination et destruction. La transformation de la violence est un travail que nous avons tous à faire sur nous-mêmes».
La violence peut être vaincue par la force de l’amour et du pardon
Pour le président de la CEF, si des mesures de sécurité sont à prendre, cette guerre est avant tout une «guerre spirituelle». Et de mettre en garde: «nous devons faire attention à ne pas nous laisser absorber par les armes de l’ennemi. Ce n’est pas en opposant une violence à une autre que nous vaincrons réellement. Notre acte de foi, comme chrétiens, c’est de croire que la violence peut être vaincue par la force de l’amour et du pardon, ce qui n’exclut pas les mesures de police et le devoir de protection de l’Etat».
Dans cette lutte contre le fanatisme, l’Eglise a un rôle important à jouer. «Elle doit faire entendre la parole de Dieu, aider les fidèles à vivre une relation vivante avec le Christ, dont la caractéristique est de mourir sur la croix pour ressusciter: c’est sa manière d’affronter le mystère du mal. Nous devons essayer de ne pas vivre seulement à côté des musulmans, mais oser entrer en relation avec eux, ne pas avoir peur».
Le pari du pape François
Dans son encyclique Fratelli tutti, rappelle le président de la CEF, le pape François met en valeur, de manière tout à fait étonnante, son lien d’amitié avec le grand imam d’Al-Azhar. «Il essaie en quelque sorte d’amener tous les musulmans de bonne volonté vers l’expression d’une fraternité réelle et dans la recherche de la vérité. C’est un pari qu’il fait et dans lequel il entraîne toute l’Eglise».
Mgr de Moulins-Beaufort souligne que ce qui manque aujourd’hui, ce sont de vraies relations entre des familles chrétiennes et des familles musulmanes, une vraie connaissance mutuelle quotidienne. «Pour des raisons sociales, notamment, nous vivons bien souvent juxtaposés. Nous avons des contacts au sommet, nous apprenons à nous estimer entre responsables. Mais le plus important, c’est que des enfants, des jeunes, des familles se découvrent en profondeur. Des chrétiens enracinés dans leur foi peuvent témoigner paisiblement». (cath.ch/cx/be)