Manifestation contre les abus de la loi sur le blasphème au Pakistan | © asianews
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Pakistan: nouvelle condamnation à mort d'un chrétien pour blasphème

Un tribunal de Lahore, capitale de la province pakistanaise du Pendjab, a condamné à mort, le 8 septembre 2020, un chrétien pour blasphème. Asif Pervaiz, 37 ans, est incarcéré depuis 2013 sous l’accusation d’avoir envoyé des SMS blasphématoires à son employeur.

Pour Saif-ul-Malook, l’avocat musulman qui a également défendu Asia Bibi, la condamnation à mort d’Asif Pervaiz est un nouveau cas dans lequel la loi est utilisée injustement contre les minorités religieuses, rapporte l’agence missionnaire vaticane Fides. Selon l’accusé, le superviseur de l’usine où il travaillait voulait le convaincre à se convertir à l’islam et lorsqu’il n’a pas accepté, il l’a accusé faussement de blasphème.

Il aurait pour cela utilisé le téléphone portable perdu par l’accusé, sur lequel il aurait envoyé des messages offensant le prophète Mahomet. Comme Asif Pervaiz n’avait pas signalé la perte de son appareil, le tribunal a jugé que le téléphone était encore en sa possession et donc qu’il était bien l’auteur des messages litigieux.

Son avocat va faire appel devant la Haute cour du Pakistan. «Le Premier ministre Imran Khan devrait se concentrer davantage sur les Pakistanais non musulmans et s’opposer à la montée du radicalisme. Les personnes accusées de blasphèmes ne sont pas en sécurité dans les tribunaux ou les commissariats de police», a-t-il déclaré à l’agence catholique ucanews.

«Bien que ne connaissant pas directement le cas, nous ne croyons pas aux accusations, a commenté le Père Mario Rodrigues, curé à Karachi, contacté par Fides. Il existe trop de précédents et de cas de fausses accusations dans lesquels la loi est manipulée. Aucun chrétien au Pakistan ne songerait à insulter l’islam ou Mahomet. Nous sommes un peuple respectueux à l’égard de toutes les religions, plus encore dans la condition où nous vivons, sachant que le blasphème demeure un problème très délicat. […] Il est temps de faire justice et de promouvoir une réelle égalité entre tous les citoyens pakistanais. Les musulmans eux-mêmes sont souvent victimes de fausses accusations».

80 personnes incarcérées pour blasphème, 77 tuées

Actuellement, au moins 80 personnes sont incarcérées au Pakistan pour le délit de blasphème. Au moins la moitié d’entre elle risque la réclusion criminelle à perpétuité ou la peine capitale. Les personnes accusées sont principalement des musulmans puisque 98% de la population est de religion islamique. Mais la loi prend pour cible de manière disproportionnée des membres des minorités religieuses tels que chrétiens et hindous, relève la Commission Justice et Paix de la Conférence épiscopale du Pakistan,

Selon l’ONG Centre pour la Justice sociale, fondée et présidée par Peter Jacob, catholique pakistanais, depuis 1990 au moins 77 personnes ont été tuées dans le cadre d’exécutions sommaires en rapport avec des accusations de blasphème. Outre les personnes accusées de blasphème, on trouve parmi les victimes des membres de leurs familles, des avocats et des juges.

Le dernier cas remonte à juillet 2020 quand un Pakistanais disposant de la nationalité américaine, Tahir Ahmad Naseem, 57 ans, accusé de blasphème et dont le procès était en cours, a été tué par balles par un jeune musulman de 19 ans à l’intérieur du tribunal de Peshawar. (cath.ch/fides/ucanews/mp)

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10 septembre 2020 | 14:12
par Maurice Page
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