Valais: une nouvelle croix au sommet du Grammont
Denis Pichard, constructeur métallique à Vouvry (VS), met la dernière main à la croix métallique qui sera érigée sur le sommet du Grammont le 17 août 2020. La Commission bourgeoisiale lui a confié le projet qui s’inscrit dans la tradition des croix sommitales de ce canton catholique.
«Voilà un moment que je suis dans la ferraille et j’en ai fait des pièces de toutes sortes! Mais la commande de cette croix est pour moi un très beau projet!», lance Denis Pichard, constructeur métallique à Vouvry (VS). Il met les bouchées doubles pour achever la croix que lui a commandée la Commission bourgeoisiale de la commune. Héliportée le 17 août prochain, elle remplacera celle, très abimée, qui orne depuis 1955 le sommet du Grammont à 2’271 mètres d’altitude.
Un vrai défi
A partir d’une photo trouvée sur internet que lui a fournie Cédric Vuadens, conseiller municipal de Vouvry, l’artisan a dû dessiner et calculer les dimensions de la croix pour rester au plus près des proportions de l’originale – qui se trouve dans les Alpes bavaroises, dans le parc national de Berchtesgaden. «Ce fut un vrai défi de ‘recréer’ la croix sans en trahir l’esthétique», indique Denis Pichard, qui doit souder une quinzaine de pièces. La croix, une fois assemblée, mesurera 4,5 m de hauteur pour 2,6 m d’envergure.
L’artisan, penché comme un alchimiste sur son creuset, promène délicatement une bille incandescente sur un des arcs qui constituera la partie supérieure de la croix. Il fignole une soudure. Un léger crépitement perturbe parfois le souffle de la combustion du chalumeau. «Tout doit être parfait.»
Le poids de la glace
Il a choisi l’inox pour sa résistance à la corrosion et aux intempéries. Les conditions climatiques au sommet du Grammont, à plus de 2’000 mètres d’altitude, seront plutôt rudes. Il a intégré dans ses calculs le poids de la glace et de la neige ainsi que la force d’une bise parfois violente. «Je vais aussi tester la résistance en mettant sous pression certains points de l’assemblage. Je n’ai pas droit à l’erreur».
Le socle en béton sera refait pour accueillir la croix de 400kg et rehaussé pour dissuader d’éventuels grimpeurs intempestifs. Un paratonnerre sera installé sur la croix.
Au-delà du défi technique et du travail de conception que lui a demandé ce projet, Denis Pichard est touché que la Bourgeoisie ait pensé à lui. Son entreprise existe à Vouvry depuis 12 ans, mais «maintenant les gens viennent me parler de cette croix et évoquent la longévité de la réalisation qui surplombera tout le Chablais». L’idée, initiée en mars 2019, a fait parler dans la commune.
Engouement populaire
Le projet suscite l’engouement de la population. Un sondage lancé par la Commission bourgeoisiale sur sa page Facebook a permis à 300 personnes de choisir entre une croix en métal et une autre en bois. «La version en métal a recueilli 68% des voix, explique Cédric Vuadens. Nous avions cherché sur internet et trouvé des photos parmi lesquelles nous avons sélectionné ces deux croix».
Une levée de fonds a été lancée, avec un tout-ménage pour les particuliers et une plaquette de présentation du projet pour les entreprises. «Avec 7’000 ou 8’000 francs, nous aurions été très heureux», sourit le conseiller municipal. La collecte a en fait rapporté 22’000 francs. A la générosité des indigènes s’ajoutent des dons envoyés de Lausanne et du Valais central. De quoi financer le projet devisé à 20’000 francs, comprenant la fabrication, l’héliportage, le socle en béton et la pose.
Pas de globe illuminé
Il était question de fixer un globe illuminé en permanence au centre de la croix, mais la commune a reçu un préavis négatif de l’Etat en raison des conséquences que cela pourrait avoir sur la flore environnante. «Nous ne comptions pas éclairer tout le Chablais mais un repère lumineux visible de loin aurait été un beau symbole. Pour cela, il aurait fallu une mise à l’enquête et des démarches administratives qui auraient retardé le projet. Mais nous n’excluons pas de l’illuminer ultérieurement», relativise Cédric Vuadens. Un globe jaune transparent sera fixé au centre de l’ouvrage.
Alors que les symboles religieux en dehors des églises sont de plus en plus contestés, parfois endommagés, la pose d’une croix sommitale peut interroger. Il y a trois ans, la croix en métal et en pierre du sommet de la Dent d’Hérens avait été sciée. Le conseiller municipal assume: «Nous ne nous sommes pas posé la question. Chacun est libre de s’arrêter au pied d’une croix ou de passer son chemin. Nous sommes un canton catholique et les croix sommitales font partie de nos traditions!». (cath.ch/bh)
>La croix sera inaugurée le 22 août 2020 à 10h30. La partie officielle sera suivie de la bénédiction à 10h45.
Les croix sommitales
De nombreuses croix de sommet ont été érigées dans les régions catholiques et germanophones des Alpes durant la deuxième moitié du XIXe siècle et la première moitié du XXe siècle. Ces croix sont souvent accompagnées d’un cahier dans lequel les randonneurs peuvent laisser un message. Dès la fin du XIIIe siècle, de grandes croix sont installées sur des cols alpins, comme au Birnlücke ou sur l’Arlberg.