L’éthique de responsabilité face à la tragédie
Emmanuel Macron a déclaré la guerre à la peste. Albert Camus avait magistralement décrit l’emprise des pandémies. Il visait semble-t-il une peste politique, la peste brune. Nous voilà de fait empestés jusqu’au cou par une véritable «pandémonie». C’est en effet bien plus encore qu’une pandémie. Nous sommes pris corps et âme dans cette saloperie. Une vraie tragédie.
La démocratie est davantage dépassée que menacée. Elle craque sur tous ses bords. Les édiles qui nous gouvernent sont écartelés entre leurs conseils scientifiques et des sondages incertains.
Et Dieu dans tout cela? Joue-t-il un rôle dans cette catastrophe mondiale? Que pouvons-nous attendre de lui?
«Dieu n’a rien à voir avec le coronavirus, simplement pour cette raison que Dieu n’existe pas», diront les athées. Dieu n’est donc ni à l’origine ni au terme de la pandémie (inutile, ici, de parler de pandémonie). Etant donné que le COVID-19 est un phénomène naturel livré au hasard, son explication causale ne peut être que scientifique et pragmatique. De même, la réponse qui lui est donnée par l’humanité ne peut être que naturelle. Les décès nombreux provoqués sont un effet collatéral de la nature. Il ne pourra y être remédié que par une réponse pratique, selon une éthique rationnelle dirigée de toutes ses forces contre la pandémie.
«La seule posture théologique crédible nous semble être une attitude de lucidité et de responsabilité»
Certains courants fondamentalistes ou intégristes tenteront par contre de lire le virus comme une punition de Dieu ou, au minimum, comme une invitation de Dieu à la conversion.
La seule posture théologique crédible nous semble être une attitude de lucidité et de responsabilité. La pandémie actuelle n’est pas une punition ou une leçon de Dieu, mais un événement à la fois historique et naturel qui donne à penser et à agir. Nous devons comprendre le rôle de l’homme dans son surgissement, et le lien qui se joue avec l’animal (voir Didier Sicard dans la revue Esprit). Soutenir l’Etat et les instances médicales dans leur lutte contre la contamination est un impératif éthique de première nécessité pour les Eglises et les chrétiens comme pour les autres religions du monde. Soutenir les inquiets, les responsables politiques et sanitaires, les soignants, les malades et les endeuillés est la tâche spécifique des croyants et des communautés religieuses. Tous ensemble, nous devons faire preuve de responsabilité et d’espérance. Cela nous obligera aussi à repenser notre compréhension de Dieu, sans rien enlever à l’éthique de responsabilité.
Denis Müller
8 avril 2020
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