Église St-Joseph de Genève: une «oasis spirituelle» de 150 ans
La paroisse Saint-Joseph, dans le quartier des Eaux-Vives, au cœur de Genève, fête le 10 novembre 2019 les 150 ans de l’inauguration et de la bénédiction de son église. Un lieu qui s’est transformé au gré de l’évolution du quartier, et qui a toujours constitué un «point de repère» de calme et de spiritualité, dans l’agitation de la grande ville.
Le 3 octobre 1869, jour de la solennité du Rosaire, l’église Saint-Joseph était inaugurée, au centre du quartier des Eaux-Vives. 150 ans plus tard, les fidèles célébreront l’anniversaire lors d’une messe solennelle, le 10 novembre, présidée par Mgr Alain de Raemy, évêque auxiliaire de Lausanne, Genève et Fribourg (LGF).
Un jubilé important pour un lieu de culte dont l’existence n’a pas toujours été évidente. «Eriger une église catholique si près du centre historique de Genève n’allait pas de soi dans une Genève fortement marquée de calvinisme», explique Marc-Louis Passera, actuel curé de Saint-Joseph. Cette demande était pourtant logique dans une ville qui abritait, déjà dans les années 1860, davantage de catholiques que de protestants, avec une forte présence de ces premiers dans le quartier des Eaux-Vives.
Finalement, après maintes démarches, un terrain sera accordé pour la construction du troisième lieu de culte catholique dans la cité du bout du Lac. Des travaux démarrent donc en 1866 sur la parcelle cédée. Ils se termineront trois ans plus tard.
L’ombre du Kulturkampf
La relative entente entre catholiques et protestants de la ville sera cependant mise à mal quelques années après l’inauguration de Saint-Joseph, avec l’éclatement du Kulturkampf, qui opposera plusieurs Etats européens à l’Eglise catholique suite au Concile Vatican I (1870). En 1877, dans le cadre des lois religieuses genevoises, l’église Saint-Joseph se voit même confisquée et confiée aux vieux-catholiques de la ville. Elle est rendue aux paroissiens romains en 1883, à la faveur d’un changement de régime et d’un apaisement des rapports entre l’Etat et l’Eglise. Dans les décennies qui suivront, les relations s’amélioreront peu à peu avec la communauté protestante. L’église Saint-Joseph fera finalement pleinement partie du paysage des Eaux-Vives et de la Cité de Calvin.
Un livre pour l’histoire
Une aventure mouvementée relatée dans le livre Une église au cœur des Eaux-Vives, écrit par l’historienne genevoise Chantal Renevey Fry, publié début novembre 2019 aux éditions Saint-Augustin, dans le cadre du jubilé. Outre l’histoire de l’église, le livre présente les divers artistes qui y ont oeuvré, les réalisations et la vie de la communauté paroissiale ainsi que la créativité musicale que le lieu a inspirée et abritée.
L’ouvrage décrit un édifice dont le destin est intimement lié à celui du quartier des Eaux-Vives. Un morceau de ville qui a sensiblement évolué au fil du temps. Tout d’abord creuset d’immigration, où s’étaient installés commerçants et ouvriers venant pour beaucoup de régions catholiques, le quartier a fait la part belle, au fil du temps, aux banques et aux bureaux. «Il s’agit toujours d’un quartier plutôt populaire, mais ces dernières décennies, beaucoup de nouveaux habitants sont arrivés, notamment des familles, qui travaillent dans les entreprises du secteur», souligne l’abbé Passera. Des changements démographiques qui influencent la vie paroissiale, créant de nouveaux types de liens, d’engagements, parfois plus souples que par le passé», note-t-il. Saint-Joseph, plus qu’une église spécifiquement «de communauté», fait aujourd’hui office de «lieu de culte pratique», où les fidèles viennent de toute la ville pour assister aux messes qui y sont célébrées avec une grande régularité.
Lieu de silence
Car Saint-Joseph se veut également une église «ouverte», au sens propre comme au figuré. Ses portes ne ferment en effet que très rarement. «Il y a même des personnes qui dorment dans l’église», relève le curé. Elle n’est en tout cas pratiquement jamais vide et des gens y viennent à tout moment de la journée pour prier, se recueillir ou simplement trouver un moment de calme. C’est ce qu’offre le lieu, assisté en cela par une architecture «simple, accueillante et cohérente», salue l’abbé Passera. L’intérieur de l’édifice de style néogothique dans sa conception initiale a notamment bénéficié des apports du collectif d’artistes du Groupe St-Luc après son agrandissement. Grâce au soutien de Mgr Marius Besson, évêque de Lausanne, Genève et Fribourg, le Groupe va collaborer à la restauration de plus d’une centaine d’églises sur le territoire du diocèse entre 1920 et 1945. Si les vitraux sont les éléments les plus visibles, on peut également y admirer de très belles mosaïques et la «Tapisserie de saint Victor» de l’artiste genevoise Alice Basset.
Selon le curé, le souvenir de la consécration d’une église est utile pour «relire l’histoire d’un bâtiment et d’une communauté au sein de laquelle l’Esprit de Dieu a agi». Il a notamment en tête les chaleureuses rencontres ainsi que les remarquables actes de solidarité et de générosité vécus dans la vie de la communauté tout au long de ce siècle et demi. Par sa situation urbaine, et grâce à sa beauté, l’édifice constitue aussi un «point de repère», une «oasis spirituelle», relève Marc-Louis Passera. «Lieu de silence dans des journées souvent marquées par le stress, Saint-Joseph permet à tous de se retrouver en cœur à cœur avec le Seigneur», assure le prêtre. (cath.ch/rz)
Le livre «Une église au coeur des Eaux-Vives est disponible au secrétariat de la paroisse Saint-Joseph