Mgr Emmanuel Lafont, évêque de Cayenne, en Guyane française | youtube
Vatican

Le synode pour l'Amazonie doit «rendre visibles» les autochtones

Mise au pied du mur par le synode pour l’Amazonie, l’Eglise doit «rendre visibles» les autochtones, ont expliqué plusieurs participants le 7 octobre 2019. Ceux-ci s’exprimaient au cours d’un point de presse tenu au Vatican après l’ouverture des travaux synodaux.

Pour ce premier briefing de cette 11e assemblée spéciale du synode des évêques, les différents membres ›amazoniens’ présents – deux évêques et une religieuse – ont souligné leur joie d’être présents à Rome. «Vous n’imaginez pas la joie si grande que j’ai dans le cœur de pouvoir être là», a ainsi lancé Sœur Alba Teresa Cediel Castillo, religieuse colombienne représentante de l’Union internationale des supérieures générales.

Trouver de nouveaux chemins

En convoquant cette assemblée, a souligné Mgr David Martínez De Aguirre Guinea, un des deux secrétaires spéciaux de ce synode, le pape François veut «rendre visibles» les indigènes et les habitants de l’Amazonie. Le chef de l’Eglise catholique a lui-même fait cette démarche en se rendant à Puerto Maldonado, au cœur de la forêt amazonienne, a considéré celui qui est aussi vicaire apostolique de cette ville péruvienne.

Pour le dominicain, l’évêque de Rome est ainsi venu écouter les autochtones, a entendu leur demande d’accompagnement et leur répond en leur demandant d’aider le synode à «trouver de nouveaux chemins».

Pour Mgr Emmanuel Lafont, évêque de Cayenne, en Guyane française, cette assemblée synodale met l’Eglise – «beaucoup trop absente» en Amazonie – au «pied du mur». Les Amazoniens, a insisté celui qui a affirmé se rendre chaque année dans chacun des villages les plus reculés de son diocèse aux dimensions gigantesques, attendent beaucoup de ce synode. Selon lui, ils sont en effet convaincus que l’Eglise catholique peut les accompagner et les soutenir sans la «tentation de prendre le pouvoir».

Des populations abandonnées par les institutions françaises

Cela est, pour ces populations autochtones, d’autant plus important qu’elles se sentent abandonnées par les institutions françaises, a poursuivi le représentant du seul territoire amazonien non indépendant. L’éducation imposée par l’Etat français, a-t-il notamment dénoncé, «détachent» les jeunes de leurs parents et un immense fossé se creuse tandis que les cultures amérindiennes ne sont plus transmises. Séparés de leurs racines mais aussi inadaptés à la vie urbaine, un nombre important de jeunes se suicident, a accusé Mgr Lafont.

Ce synode est également une chance pour la France et les catholiques du ‘nord’, a encore expliqué celui qui a également été missionnaire en Afrique du Sud. Pour la saisir, il faudra apprendre à changer de point de vue et à se mettre à l’écoute.

Le monde romain appelé à la modestie

«Le monde romain et européen apprendra que d’autres cultures savent aussi parler de la vie et de bien-être», a-t-il lancé tout en déplorant une théologie parfois à voix unique. L’important selon lui est d’apprendre à écouter la sagesse amérindienne.

Celle-ci doit être valorisée, a renchéri Mgr Martinez, pour que les autochtones s’approprient l’Evangile et apportent leur «couleur spécifique» à l’évangélisation. Ainsi, a-t-il détaillé, il ne suffit pas qu’un missionnaire adopte les signes et langages des peuples autochtones, il est plutôt nécessaire à ces derniers d’assumer eux-mêmes le message évangélique pour en être protagonistes.

Réalités féminines

Dans son intervention, Sœur Alba Teresa Cediel Castillo a également souligné la réalité très triste de la vie de nombreuses femmes amazoniennes, forcées à l’exil dans des grandes villes où la situation est très dure. Elle a donc confié espérer que cette assemblée spéciale du Synode des évêques permettra de montrer une Eglise proche de ces femmes.

Autre réalité féminine de l’Amazonie évoquée par la Colombienne: les religieuses. Celles-ci assurent une présence constante dans de très nombreuses communautés où les prêtres sont en revanche absents.

En l’absence de prêtres, les sœurs baptisent

Ainsi, a-t-elle développé, lorsque le prêtre n’est pas disponible, elles peuvent donner elles-mêmes le sacrement de baptême. Elle a également confié que les religieuses pouvaient aller jusqu’à écouter les confessions en cas de nécessité – par exemple celle d’un mourant – sans «bien sûr» donner pour autant l’absolution. Pour elle, ce synode doit aussi permettre de reconnaître cette présence.

Enfin, Paolo Ruffini, préfet du Dicastère pour la communication, a assuré que l’Instrumentum laboris – le document de travail du synode – était né des demandes des peuples amazoniens consultés en amont du synode.

«Ne pas écouter serait une erreur», a-t-il ainsi commenté en référence aux viri probati. De plus, cette question de l’ordination d’hommes mariés respectés d’âge mûr est «une des solutions» au manque de prêtres, mais «sûrement pas la seule». (cath.ch/imedia/pad/xln/be) 

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7 octobre 2019 | 17:10
par Jacques Berset
Temps de lecture : env. 3  min.
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