Père Cantalamessa: «Il faut renouer avec l'intériorité»

Face à toutes les formes d’idolâtries, et notamment l’hypocrisie, les chrétiens doivent opérer une conversion personnelle par un retour vers le fond de l’âme, a pointé le Père Raniero Cantalamessa, prédicateur de la Maison pontificale au cours de ses méditations de Carême au Vatican. Celles-ci ont été prêchées dans la chapelle Redemptoris Mater au Vatican entre le 15 mars et le 12 avril.

Cette année, le capucin italien a choisi de mener une réflexion autour d’un passage tiré de saint Augustin (354-430), issu de son traité La vraie religion : «Rentre en toi-même. La vérité habite à l’intérieur de l’homme. Publié vers 390, peu avant que le saint ne s’achemine vers le sacerdoce, cet appel garde toute son actualité malgré les siècles qui ont suivi sa rédaction, a estimé le Père Cantalamessa.

Point de départ de la réflexion du prédicateur de la Maison pontificale: la pureté de cœur, condition essentielle requise pour voir Dieu. Cette disposition englobe la rectitude des intentions et la pureté des mœurs qui s’opposent à l’hypocrisie pour la première et à l’abus de la sexualité pour la seconde, a-t-il indiqué. L’hypocrisie est un mensonge, a-t-il martelé, qui relègue Dieu à la deuxième place comme une forme d’idolâtrie.

Or, l’idolâtrie ne s’est pas achevée avec la fin du paganisme historique, expliquera-t-il au cours de sa troisième prédication. «Au fond de chaque idolâtrie, il y a le culte de soi, l’amour propre, le fait de se placer au centre et à la première place dans l’univers», a ainsi souligné le prédicateur. En résulte toujours selon lui l’impiété, c’est-à-dire le fait de ne pas glorifier Dieu.

«Nous vivons comme dans une centrifugeuse à plein régime»

Pour vaincre l’hypocrisie, le capucin propose de cultiver la simplicité, vertu opposée au mensonge. Il s’agit pour lui de l’une des conquêtes les plus ardues et les plus belles du chemin spirituel. Mais ce chemin de conversion personnelle ne peut s’opérer que par un retour vers le fond de l’âme, a-t-il plaidé au cours d’une méditation entièrement dédiée à l’intériorité. La vie intérieure est une valeur en crise – et même pour l’Eglise – en raison notamment du phénomène de sécularisation.

C’est pourquoi les chrétiens sont invités à se retirer dans leur cellule intérieure, a recommandé le Père Cantalamessa. Ce dernier a soulevé un paradoxe: l’homme sait désormais en temps réel ce qui se passe à l’autre bout du monde tout en ignorant ce qui se passe au plus profond de son cœur. «Nous vivons comme dans une centrifugeuse à plein régime», a-t-il déduit.

Chacun porte pourtant en lui cette cellule dans laquelle il est toujours possible de se retirer en pensée, pour renouer un contact vivant avec la Vérité qui habite en nous. A condition, d’après lui, de savoir s’adonner au silence et à l’adoration, le devoir de tout chrétien.

«Le coup d’audace de la vie chrétienne»

«Ne laissons pas passer Pâques sans avoir fait, ou renouvelé, le coup d’audace de la vie chrétienne», a finalement exhorté le Père Cantalamessa lors de sa dernière prédication: ce que l’on ne trouve pas en soi, il faut le «prendre avec confiance dans les entrailles du Sauveur, parce qu’elles sont toutes pleines d’amour». Bien plus qu’abandonner les vices et acquérir les vertus, il y a tout «une opération à faire par la foi», a-t-il suggéré. «On se place devant le crucifix et, par un acte de foi, on lui donne tous ses péchés, sa misère passée et présente, comme celui qui se dépouille de ses guenilles sales et les jette au feu».

Depuis 1980, le Père Cantalamessa est le prédicateur de la Maison pontificale. C’est donc à lui que revient la mission de prêcher devant le pape et les membres de la Curie romaine notamment pendant l’Avent et le Carême, avec un rendez-vous hebdomadaire chaque vendredi dans la chapelle du palais apostolique Redemptoris Mater. (cath.ch/imedia/pad/mp)

Père Raniero Cantalamessa, prédicateur de la Maison pontificale
12 avril 2019 | 15:44
par Maurice Page
Temps de lecture : env. 3  min.
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