La démission du cardinal Wuerl, un nouveau chapitre pour l’Eglise américaine
La démission du cardinal Donald Wuerl de l’archevêché de Washington, acceptée le 12 octobre 2018 par le pape François, semble destinée à ouvrir un nouveau chapitre non seulement pour l’Eglise américaine, une nouvelle fois secouée par des abus, mais aussi plus globalement dans le processus de sélection des évêques.
Cette démission n’est pas en soi une surprise: le cardinal Wuerl, 78 ans, a dépassé depuis trois ans l’âge canonique de la retraite et avait déjà présenté sa renonciation au gouvernement pastoral, restant ensuite à son poste à la disposition du pape, jusqu’à ce que lui soit nommé un successeur.
Ce qui frappe toutefois, c’est que sa démission arrive sans nomination d’un successeur, bien que les procédures pour désigner un éventuel nouvel archevêque de Washington ont déjà commencé il y a quelques temps. Mais ce qui frappe encore plus, c’est la lettre par laquelle le pape a accepté la renonciation du haut prélat.
«Chercher avant tout la gloire de Dieu»
Cette missive représente une reconnaissance du travail réalisé par le cardinal Wuerl. La présentation répétée de sa démission, y compris lors de rencontres privées avec le pontife, est ainsi considérée par le Souverain pontife comme partie intégrante des «deux piliers qui ont marqué le ministère personnel du haut prélat américain». A savoir de «chercher avant tout la gloire de Dieu et procurer le bien» au peuple qui lui a été confié.
«Tu possèdes des éléments suffisants pour justifier ton action et faire la distinction entre ce que signifie couvrir des délits ou ne pas s’occuper des problèmes, et commettre quelques erreurs», écrit ainsi le pape au cardinal. «Ta noblesse t’a conduit à ne pas emprunter cette voie de défense». Ce sont des paroles pesées et pondérées. Elles témoignent de la nécessité d’affronter les problèmes, et en particulier le scandale des abus, mais également de définir la responsabilité, distinguer l’erreur d’évaluation des erreurs personnelles.
Ce n’est pas un argumentaire qui s’adresse uniquement au cardinal Wuerl. Cela s’adresse plus généralement à toute l’Eglise. Le scandale des abus a, de fait, provoqué une vague d’opinion qui a réclamé avec insistance la démission des pasteurs s’ils se considéraient dans l’erreur dans leur gestion les scandales.
Le premier témoignage de Mgr Carlo Maria Viganò, ancien nonce à Washington entre 2011 et 2016, en date du 22 août dernier, est même allé jusqu’à demander la démission du pape, en utilisant notamment le terme «démission», qui est impropre: on ne démissionne pas de la papauté. Et ceci un archevêque le sait.
Les responsabilités du nonce
À partir de ce moment-là, la nécessité de défendre l’institution était donc devenue évidente, car l’attaque n’était plus une critique du pape, mais de la papauté. La lettre ouverte du 7 octobre du cardinal Marc Ouellet, préfet de la Congrégation des évêques, doit également être lue dans ce sens. Une lettre divisée en trois parties: la première répondait directement à l’archevêque Carlo Maria Viganò, la seconde réfutait ses accusations, la troisième présentait une défense sincère et personnelle qui est en réalité une défense du travail de l’Eglise.
Dans la seconde partie de la lettre du cardinal Ouellet, il était indiqué que le cas de l’ancien cardinal archevêque de Washington Théodore McCarrick était «passible de nouvelles mesures disciplinaires si la nonciature de Washington ou toute autre source nous avait fourni des informations récentes et décisives sur son comportement». C’est-à-dire que s’il y avait eu négligence, le nonce, alors Mgr Viganò, avait aussi sa part de responsabilité. Et que s’il y avait un problème dans la sélection des évêques – y compris ce qui a conduit Theodore McCarrick au poste d’archevêque de Washington et au rang de cardinal malgré les rumeurs d’abus – ce problème concerne tout le monde.
Nouvelle forme de sélection des évêques?
La lettre du pape François au cardinal Wuerl reprend donc cette position. Il reconnaît la possibilité d’erreurs personnelles, mais refuse dans le même temps d’accuser l’institution à cause de ces mêmes erreurs personnelles.
Par ailleurs, il est significatif que le cardinal Wuerl soit invité à rester en tant qu’administrateur apostolique de l’archidiocèse. Le processus de sélection de son successeur recommence désormais, en essayant d’éviter les erreurs du passé. Cette nouvelle sélection fera donc probablement partie de la «réforme en chemin» menée par le pape François. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si le sujet de la sélection des évêques a été abordé à plusieurs reprises lors des réunions du Conseil des cardinaux. (cath.ch/imedia/ag/pp)