Abus sexuels: le pape convoque les évêques chiliens à Rome

Les évêques du Chili en exercice sont convoqués à Rome par le pape François entre le 14 et le 17 mai 2018, pour évoquer les réponses à apporter dans ce pays au scandale des abus sexuels.

Selon la presse chilienne, l’Eglise catholique au Chili est en pleine crise suite aux révélations sur les abus sexuels qui l’affectent. La trentaine d’évêques de la Conférence épiscopale du Chili (Cech) sont à moins d’une semaine de la rencontre avec le pape François au Vatican. Selon l’épiscopat, le pontife «a demandé qu’ils soient disponibles du 14 au 17 mai».

Des évêques remplacés ?

Le pape, entre autres choses, les informera des conclusions du rapport de 2’300 pages que l’archevêque de Malte, Charles Scicluna, a établi sur le cas de l’évêque d’Osorno, Juan Barros, sa proximité avec le Père Fernando Karadima et les dénonciations de possibles dissimulations par l’ancien curé d’El Bosque, une paroisse du quartier cossu de La Providencia, à Santiago. «Même d’éventuels changements de prélats sont prévus», peut-on lire sur le site internet d’Emol TV.

Adulé par les classes aisées, admiré par la hiérarchie ecclésiale, Karadima était même considéré par certains comme «un saint vivant», suscitant des dizaines de vocations sacerdotales, dont cinq prêtres sont devenus évêques.

Karadima, adulé par les classes aisées

Pour la quatrième fois en quinze mois, l’épiscopat chilien rencontrera prochainement le pape François – probablement le 15 mai, selon le site spécialisé italien Il Sismografo. Cette réunion a été voulue par le pontife par un courrier du 8 avril aux prélats du Chili, suite à un rapport sur la question des abus sexuels commis par des membres du clergé. L’objectif est de trouver des réponses concrètes, «sans verbiage», expliquait-il.

Suite à ce rapport, le pape François a déjà reçu du 27 au 29 avril trois victimes d’abus commis par un prêtre chilien, le Père Fernando Karadima. Par cette rencontre, le pontife voulait leur «demander pardon, partager leur douleur et sa honte pour ce dont ils ont souffert», avait expliqué le Saint-Siège. Devant ces victimes, le pape François avait souligné son manque d’informations sur la situation au Chili.

Un seul absent

Dans sa missive du 8 avril, le pape François déplorait déjà «un manque d’information vraie et équilibrée». A cause de cela, expliquait-il, il avait lui-même commis «de graves erreurs d’évaluation et de perception de la situation». Lors de son voyage au Chili en janvier dernier, il avait ainsi pris la défense d’évêques accusés d’avoir tu les abus commis par le Père Karadima, dont ils étaient proches dans leur jeunesse. Le pape avait affirmé n’avoir ni «preuve» ni «élément» sur leur éventuelle culpabilité.

Sur les 32 évêques chiliens en exercice, seul Mgr Andrés Arteaga, auxiliaire de Santiago et malade depuis plusieurs années, devrait être absent bien qu’il soit l’un des prélats mis en cause avec Mgr Juan Barros, évêque d’Osorno. Pour sa part, le cardinal Francisco Javier Errázuriz, archevêque émérite de Santiago et membre du Conseil des cardinaux (C9), devrait être présent.

La prise de position du pape François lors de son voyage avait suscité une vaste polémique. L’évêque de Rome avait alors demandé à Mgr Charles Scicluna, ›enquêteur de choc’ du Vatican sur la question des abus sexuels, de se rendre à Santiago. Celui-ci avait ensuite rendu un rapport de 2’300 pages. Dans sa missive, le pape soulignait y avoir lu des récits «crus, sans additifs ni édulcorants, de nombreuses vies crucifiées» par les abus commis par des membres du clergé.

Une mesure rare

La convocation à Rome de l’ensemble de l’épiscopat d’un pays est une mesure rare: la dernière fois, c’était en février 2010, sous Benoît XVI, avec l’épiscopat irlandais, là aussi pour des problèmes de gestion des abus sexuels. Cette mesure est d’autant plus exceptionnelle que les évêques chiliens se sont déjà réunis récemment trois fois autour du pape François: deux fois à Rome lors de leur visite ad limina en février 2017 puis une fois en janvier dernier à Santiago.

Au cours de leur séjour romain – payé sur leurs propres deniers (entre 80 et 90 euros par jour, selon la presse chilienne – les prélats logeront pour la plupart soit à la Résidence Sainte-Marthe au Vatican, soit dans l’une des deux résidences romaines dédiées aux prêtres de passage: la Maison romaine du clergé, à quelques pas de la place Saint-Pierre, et la Maison internationale du clergé, dans le centre. (cath.ch/imedia/com/be)