Algérie: quatre églises fermées en quatre mois
Les chrétiens algériens sont confrontés à une vague de fermeture d’églises, affirme le 29 mars 2018 l’ONG de défense des chrétiens Portes Ouvertes. Le gouvernement nie et invoque un non-respect des normes de sécurité.
Le 2 mars 2018, dans le village d’Azaghar, au nord de l’Algérie, une petite église fonctionnant depuis plus de 6 ans a été contrainte de cesser toute activité. Il s’agit de la quatrième église à fermer ses portes au cours des 4 derniers mois, selon Portes Ouvertes. Les trois autres se trouvaient dans la ville d’Oran ou aux environs. Ses trois dernières sont affiliées à l’Eglise protestante d’Algérie (EPA), officiellement reconnue par le gouvernement depuis 1974.
Mohamed Aissa, ministre algérien des Affaires religieuses, a nié toute discrimination contre la minorité chrétienne du pays. Il a déclaré à la chaîne d’information Ennahar TV que les églises avaient été fermées parce qu’elles ne respectaient pas les normes de sécurité requises pour un lieu de culte. Un avis que ne partagent pas certains observateurs des droits humains. Ils estiment que ces fermetures font partie d’une campagne coordonnée d’action contre les églises par les autorités. Le fait que 25 des 45 églises affiliées à l’EPA aient reçu des notifications pour se conformer aux normes de sécurité au cours des derniers mois plaide en faveur de la thèse de la répression, note l’ONG protestante.
Les demandes des églises ignorées
D’après l’EPA, le gouvernement applique une loi sur la régularisation du culte non-musulman, qui précarise les minorités. Entrée en vigueur en 2006, cette loi stipule qu’une permission préalable doit être obtenue avant de pouvoir utiliser un bâtiment pour y célébrer des cultes non-musulmans, et que conjointement, le culte ne peut être conduit que dans des bâtiments spécifiquement désignés à cet effet. Un responsable de l’Eglise locale, qui souhaite garder l’anonymat, a déclaré que le gouvernement «ne fait absolument rien pour aider les communautés chrétiennes à s’offrir un lieu de culte adéquat».
Faute d’autorisation officielle, les chrétiens sont donc poussés à louer des locaux et informent les autorités dans un second temps. Qui plus est, les propriétaires qui louent un bâtiment à une église sont menacés et intimidés par les autorités, rendant encore plus difficile pour les communautés chrétiennes de trouver un endroit pour se rencontrer.
Contexte religieux tendu
Réélu pour un quatrième mandat en 2014, le président Abdelaziz Bouteflika gouverne un pays qui peine à retrouver sa stabilité, après les violentes insurrections islamistes qui ont marqué son histoire récente. L’islam est la religion officielle de cet Etat de 41 millions d’habitants, composé en grande majorité de musulmans sunnites. Si les chrétiens étrangers y jouissent de la liberté de culte, les chrétiens algériens d’arrière-plan musulman, représentant moins de 2% de la population, sont discriminés, harcelés et vivent dans la crainte d’être accusés de blasphème. La pratique de leur foi est considérablement restreinte par l’Etat et la société, comme le relève l’Index mondial de persécution édité chaque année par l’association Portes Ouvertes, qui lutte contre la discrimination religieuse. En 2018, l’Algérie se classe en effet au 42ème rang des pays où les chrétiens sont les plus persécutés. (cath.ch/com/rz)