Tourné à l'hospice du Simplon, le film «Fortuna» est primé à Berlin

Le film «Fortuna», du Lausannois Germinal Roaux, tourné essentiellement à l’hospice du Simplon (VS), a été primé deux fois, le 23 février 2018, à la Berlinale. Le prieur François Lamon raconte les coulisses d’un tournage qui s’est transformé en véritable «histoire d’amitiés».

Fortuna met en scène une jeune réfugiée éthiopienne hébergée par les chanoines de l’hospice du Simplon. L’acteur suisse Bruno Ganz y interprète un religieux.

L’œuvre a reçu L’Ours de Cristal pour le meilleur film et le Grand prix du jury international de Generation 14plus pour le meilleur film.

Collaboration enrichissante

«Cette rencontre a été un enrichissement mutuel», confie à cath.ch François Lamon, prieur de l’hospice du Simplon. «Il y a eu une très bonne collaboration entre l’équipe de tournage et les chanoines. Des liens d’amitié solides se sont tissés». Le responsable de la maison souligne en particulier que la jeune actrice éthiopienne Kidist Siyum Beza était «très, très sympathique».

L’arrivée des divers caméramans, maquilleurs et autres acteurs n’a pourtant pas été de tout repos, admet le prieur. L’occupation de certains lieux ont occasionné au début un certain dérangement pour les cinq religieux de la congrégation du Grand-saint-Bernard qui y résident. «Mais nous nous sommes vite pris au jeu». Les chanoines ont notamment prêté leurs habits aux acteurs. Le prieur a renseigné le metteur en scène sur la liturgie de la messe pour une scène du film, un logement a été mis à disposition des cuisiniers et des repas ont été servis aux figurants.

Le tournage, qui s’est déroulé du début avril à la fin mai 2016, a ainsi été une très bonne expérience pour les chanoines. «J’ai beaucoup appris de ce monde du cinéma, que je ne connaissais pas du tout. Et je pense qu’ils ont aussi appris de nous».

La fierté des chanoines

François Lamon n’a encore pas vu le film, mais il se réjouit de pouvoir admirer sur grand écran les lieux qui lui sont chers. «Nous sommes tous ici très fiers de voir le film primé. Germinal Roaux m’a téléphoné spécialement pour me l’annoncer».

Le prieur ne regrette pas d’avoir accepté d’accueillir le tournage du long-métrage coproduit par la RTS. Approché par le cinéaste et photographe lausannois, il avoue avoir beaucoup hésité avant de donner son accord. «La beauté et la justesse du scénario m’ont convaincu». Il relève que l’histoire de la jeune Fortuna est tout à fait réaliste, notamment quant aux problèmes que les réfugiés rencontrent dans les sites d’accueil. Il salue également le rôle positif que les chanoines jouent dans le scénario.

François Lamon n’est pas intéressé par la «publicité» que pourrait apporter le film à l’hospice, qui n’est «pas un hôtel» mais un lieu de ressourcement spirituel. Il avoue en revanche bien accepter l’idée que l’œuvre puisse inspirer des vocations pour sa congrégation. (cath.ch/ag/rz)

Un «récit de pureté et de survie»

Le jury de la Berlinale a attribué son prix à Fortuna pour ses «images fortes» et son «histoire à la fois contemporaine et intemporelle». Les jurés ont également relevé «la délicatesse de la représentation des personnages principaux».

Le jury international de Génération 14plus, une section du festival dédiée à la jeunesse, a salué un film qui «décrypte les dogmes religieux et politiques dans un récit de pureté et de survie merveilleusement réalisé».

Dans le quotidien romand Le Temps du 23 février 2018, le réalisateur Germinal Roaux décrit Fortuna comme un «cinéma d’auteur contemplatif». Il explique avoir d’abord voulu offrir une expérience émotionnelle de cinéma et de réflexion. «On doit pouvoir entrer dans le film comme on entre en méditation».

L’œuvre, filmée en noir-blanc, sortira en Suisse le 11 avril 2018. RZ