Les indigènes d'Amazonie péruvienne sont confrontés à de nombreux problèmes (Photo:Pierre Pouliquin/Flickr/CC BY-NC 2.0)
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Au Pérou, l’Eglise reste l’une des institutions «les plus crédibles», estime Mgr Vizcarra

Le Pérou accueillera le pape François du 18 au 21 janvier 2018. Au cours de cette visite apostolique, le pontife se rendra à Lima, la capitale, à Puerto Maldonado, dans la forêt amazonienne, et à Trujillo, importante ville portuaire. A l’approche de ce voyage, I.MEDIA a interrogé Mgr Alfredo Vizcarra, vicaire apostolique de Jaén, dans la région nord-amazonienne. Il relève que l’Eglise reste une des institutions les plus crédibles dans le pays.

Quelle est la situation de l’Eglise au Pérou?
Mgr Alfredo Vizcarra: De manière générale, le sentiment religieux est profond dans les consciences  péruviennes: toute la réalité est habitée par un Dieu bon et prévoyant, qui se soucie des nécessiteux et qui fait justice. L’identification à l’Église, elle, s’effrite: non par tant pour le nombre de baptisés, qui ne décline pas, que concernant la pratique des autres sacrements. Ainsi, le nombre de mariages a considérablement diminué, tout comme la participation à l’eucharistie dominicale. Le nombre de prêtres est insuffisant, notamment dans les territoires très reculés. Situation aggravée par la diminution des vocations – vie consacrée et prêtrise. Mais nous ne sommes pas pour autant confrontés à un phénomène de laïcisation. La plupart des Péruviens restent religieux, avec une certaine persistance des croyances ancestrales précoloniales, à côté du christianisme des missionnaires espagnols. Cela dit, ces pratiques de religiosité populaire subissent aussi l’influence de la modernité. La mentalité commerciale les envahit, elles deviennent des activités plus folkloriques.

Quelle est perception de l’Eglise par la société péruvienne?
L’Eglise continue d’être l’une des institutions les plus crédibles, pour sa présence au milieu des gens, accompagnant leurs difficultés, la vulnérabilité. Sa présence dans l’éducation continue notamment d’être très appréciée, ainsi que dans de nombreux projets de développement. Bien que nous ayons également été touchés par certains scandales, ceux-ci n’ont pas affecté la reconnaissance envers l’Eglise. Toutefois, les progrès économiques du Pérou au cours des dernières décennies, la mondialisation et le consumérisme extrême, ont affaibli l’esprit communautaire et la solidarité.

Quels sont les défis de l’Eglise au Pérou?
Les laïcs, qui ont un rôle plus important à jouer, tant dans l’évangélisation que dans la vie socio-économique et culturelle: éducation, développement, santé et autres. Il est aussi urgent d’accompagner les mariages et les familles, car c’est l’espace privilégié de la croissance humaine, au sein d’une société marquée par le consumérisme et l’individualisme. Cette logique est déjà présente même dans les endroits les plus reculés de notre pays. Les jeunes se forment pour affronter la compétition du monde du travail, et atteindre l’amélioration matérielle tant désirée. Mais en négligeant les valeurs qui nous rendent humains. Par ailleurs, le souci de la nature et la défense des peuples autochtones, victimes de ce système, sont également une priorité dans un pays où un tiers de notre territoire est amazonien.

Quel message attendez-vous du pape François?
Le pays a besoin d’entendre un mot clair sur le nécessaire changement de paradigme. Le Saint-Père a choisi deux lieux touchés par le changement climatique : la côte nord du Pérou, fortement affectée par El Niño – particulièrement agressif cette année – et Puerto Maldonado, où ont été déboisés plus de trente mille hectares. L’exploitation de l’or y a contaminé les rivières et les terres au mercure. Cette activité a également développé le trafic de personnes à des fins de prostitution. Et tout cela fonctionne avec une corruption qui a envahi tous les niveaux de la société, y compris celui des autorités. C’est la vie dans son ensemble qui est menacée, dans ce système qui a pour seul principe la croissance économique, rapide et à bas coût. Dans un pays où la classe politique a perdu toute crédibilité pour faire face à ces problèmes, nous avons besoin d’une parole forte qui nous invite à rendre la dignité de la politique, la plus haute expression de la charité. (cath.ch/imedia/mp)

Les indigènes d'Amazonie péruvienne sont confrontés à de nombreux problèmes
11 janvier 2018 | 14:38
par Maurice Page
Temps de lecture : env. 3  min.
Pérou (101), voyage du pape (432)
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