Le pape ne devrait pas prononcer le terme 'Rohingya' en Birmanie
Le cardinal Charles Maung Bo, archevêque de Rangoon (Birmanie), aurait demandé au pape François de ne pas prononcer le terme ›Rohingya’ pendant son séjour dans le pays. Selon le prélat, le pape aurait accepté sa demande. Cette requête était l’une des trois transmises directement au pape par l’Eglise en Birmanie, rapporte l’agence italienne ACI Stampa le 20 novembre 2017.
De passage à Rome à l’occasion de l’assemblée plénière du Conseil pontifical de la culture, dont il est membre, le cardinal Bo a rencontré le pape François le 18 novembre. Il lui a transmis trois requêtes formulées par le clergé birman: l’une d’elles concerne les Rohingyas, l’autre une audience avec le chef des armées, et la dernière consiste en une rencontre interreligieuse.
Un terme contesté
Selon ACI Stampa, Mgr Bo s’est réjoui que le pontife accède à chacune de ces requêtes. A travers la première, les évêques birmans prient le pape François de ne pas utiliser le terme ›Rohingya’ pendant son séjour dans le pays du 27 au 30 novembre. Le terme ‘Rohingya’, qui signifie en bengali ›habitant de l’Etat d’Arakan’ – du nom de la région du nord de la Birmanie où vit ce peuple– ne convient pas selon lui. Le fait que les Rohingyas représentent à eux seuls cet Etat de Birmanie est en effet très contesté.
Le cardinal a ainsi expliqué au chef de l’Eglise catholique que l’expression «musulmans de l’Etat d’Arakan» serait plus correcte. Ce terme a été utilisé par la commission guidée par l’ancien secrétaire général de l’ONU Kofi Annan, a expliqué le haut prélat. «Les extrémistes, a-t-il précisé, cherchent à mobiliser la population autour de ce terme». Cela peut selon lui provoquer «un conflit interreligieux», alors que de «nombreux autres musulmans vivent pacifiquement parmi la population birmane».
Les médias, a par ailleurs expliqué l’archevêque de Rangoon, se concentrent sur le cas des Rohingyas alors que tant d’autres minorités sont en conflit avec le gouvernement. Le cardinal estime qu’étant musulmans, les Rohingyas bénéficient d’une couverture médiatique forte, entretenue par des médias musulmans qui «font un grand bruit», tels que la chaîne qatarie Al Jazeera.
Rencontrer le responsable du dossier des Rohingyas
Seconde requête exprimée au pontife: accorder pendant son séjour une «entrevue privée discrète» au général de l’armée de Birmanie, Min Aung Hlaing. Le responsable militaire est accusé par les Nations unies d’épuration ethnique à l’encontre des Rohingyas. Une rencontre avec Min Aung Hlaing n’est pas inscrite pour l’heure au programme officiel du voyage du pape François.
Ces 60 dernières années, l’Eglise n’a eu aucun dialogue avec les forces armées, a souligné le cardinal Bo. Les prélats birmans espèrent que le pape puisse lui conseiller de «travailler pour la paix et d’avoir de la compréhension pour les minorités». A l’inverse, négliger l’armée lors de ce voyage pourrait, selon le cardinal Bo, «conduire à de plus grandes tensions dans le futur».
Dialogue interreligieux
Les évêques birmans réclament enfin au pape François d’ajouter à son programme une rencontre avec les responsables religieux investis dans le dialogue interreligieux. Il s’agit de 15 représentants, bouddhistes, hindous, chrétiens, mais aussi musulmans, dont des Rohingyas.
Le cardinal a suggéré au pape de les rencontrer avant la messe qu’il présidera le 29 novembre, pour les exhorter à travailler pour la paix dans les régions touchées par des conflits ethniques. Selon le prélat, ce groupe de religieux est incontournable car ils pourraient contribuer grandement à la paix dans le pays. (cath.ch/imedia/ah/rz)