Une histoire de l’Eglise catholique au Bangladesh
Le pape François effectuera une visite pontificale au Bangladesh, du 30 novembre au 2 décembre 2017. A cette occasion, l’agence d’information catholique Eglises d’Asie (EdA) propose, en collaboration avec l’auteur bangladais Jerome D’Costa, de redécouvrir l’histoire de l’Eglise catholique dans ce pays.
Une tradition ancienne et solide considère que la première évangélisation du sous-continent indien serait l’œuvre de l’apôtre Saint Thomas en 52. Malgré cela, on sait que l’histoire de l’Eglise catholique au Bengale est étroitement liée à l’activité missionnaire portugaise. Raison pour laquelle, dans cette région influencée tour à tout par le bouddhisme, l’hindouisme puis l’islam, le christianisme a la réputation d›être une religion récente et étrangère.
Après la découverte de la route maritime vers l’Inde par Vasco de Gama, les commerçants portugais s’établirent à Cochin en 1506 et à Goa en 1510. Ils commencèrent leur incursion vers le Bengale en 1517 et établirent, en 1535, un port commercial à Chittagong, à l’est de l’actuel Bangladesh. La première communauté catholique locale s’y installa en 1537.
La bienveillance de l’empire moghol
Après la chute du Sultanat du Bengale (1352-1576), l’empereur moghol Akbar accorda la permission aux Portugais de construire des colonies permanentes au Bengale et de prêcher leur religion. En 1599, la première église catholique fut construite à Chandecan, dans l’actuel district de Satkhira (sud-est du pays), par le Père Francisco Fernandez, de la Compagnie de Jésus.
En 1608, Islam Khan, le souverain moghol du Bengale, décida de faire de Dacca la capitale du pays et accueillit les commerçants étrangers, notamment portugais. Dès 1612 les missionnaires augustiniens portugais introduisirent le christianisme dans cette ville. Ils construisirent notamment l’église du Saint Rosaire en 1677, qui est aujourd’hui la plus vieille église de Dacca.
Les premiers convertis, essentiellement des hindous, se virent donner un nom portugais par les missionnaires, afin qu’ils puissent être identifiés comme chrétiens. Les autres missionnaires ne perpétuèrent pas cette pratique. On comptait 27’000 catholiques romains au Bengale en 1682, dont 14’120 au Bengale oriental.
De la politique britannique à l’égard des religions
Pendant la période coloniale (1765-1947), les autorités britanniques adoptèrent d’abord une politique de non-ingérence dans les religions des peuples sous leur domination. Encouragé par les missionnaires protestants, le parlement de Londres favorisa à partir de 1813 le développement du christianisme sur le territoire de l’Empire. Les sociétés missionnaires protestantes devinrent plus nombreuses et rejoignirent William Carey, le plus grand missionnaire protestant arrivé à Serampore, au Bengale occidental, en 1793. Les protestants furent les premiers à traduire la Bible en bengali.
Alors que l’influence du Portugal prenait fin, le vicariat apostolique du Bengale fut créé en 1834, puis subdivisé en 1850 en vicariats apostoliques du Bengale occidental et du Bengale oriental.
En 1886, le pape Léon XIII donna à Dacca le statut de diocèse, le premier au Bengale oriental. Mais ce n’est qu’après la partition des Indes en 1947, le Bengal oriental devenant le Pakistan oriental, que le premier évêque local, Mgr Theotonius Amal Ganguly, fut nommé, en 1968.
Une Eglise locale à la veille de la guerre d’indépendance
A la veille de la guerre d’indépendance qui sépara le Bangladesh (Pakistan oriental) du Pakistan, les quatre diocèses du pays étaient administrés par des évêques locaux. Durant le conflit, ceux-ci demeurèrent discrets et évitèrent de s’impliquer publiquement. Et, si des chrétiens et des musulmans s’engagèrent dans la Mukti Bahani, l’armée de libération, les chrétiens prodiguèrent des soins aux partisans des deux camps.
La Conférence des évêques catholiques du Bangladesh fut créée l’année de l’obtention de l’indépendance, en 1971. A cette époque, la liberté religieuse fut reconnue. Un pro-nonce apostolique, Mgr Edward Idris Cassidy, fut nommé en avril 1973. Et dès 1975, un grand séminaire national ouvrit ses portes à Dacca.
Les catholiques, utlra-minoritaires mais actifs
Depuis le putsch de 1975 qui a renversé Bangabandhu Sheikh Mujib Ur-Rahman, le pays s’est enfoncé dans une instabilité politique dominée par les coups d’Etats et l’alternance au pouvoir des deux partis rivaux, l’Awami League (AL) dirigé par Sheikh Hasina, et le Bangladesh Nationalist Party (BNP) mené par Khaleda Zia, veuve du général Zia Ur-Rahman. Si le BNP se présente comme un parti conservateur et nationaliste prônant les valeurs de l’islam, la Ligue Awami se définit comme défendant des valeurs laïques et socialistes.
A partir du début des années 1980 se sont multipliées les madrasas, écoles coraniques, diffusant un nationalisme islamique. Depuis le 11 mai 1988, l’islam est devenu religion d’Etat. Actuellement, la population du Bangladesh est à 89% musulmane et les chrétiens ne représentent qu’une petite minorité de 0,5%.
Dans ce pays confronté à de catastrophes naturelles récurrentes et marqué par un taux élevé d’analphabétisme, l’Eglise catholique se distingue par son implication dans les domaines éducatifs, médicaux, sanitaires ou encore juridiques, en prenant la défense des droits, notamment fonciers, des aborigènes, assure EdA. (cath.ch/eda/rz)