Brésil: les évêques dénoncent les violences contre le peuple indigène Gamela
La Conférence nationale des évêques du Brésil (CNBB) dénonce la violente attaque, le 30 avril 2017, d’indigènes du peuple Gamela, au nord-est du Brésil. Un groupe d’hommes armés a agressé les Gamela, faisant fait quinze blessés, dont cinq graves, dans la municipalité de Viana (Etat du Maranhão).
Dans son édition du 3 mai 2017, le quotidien Folha de S.Paulo écrit que les récents épisodes d’extrême violence dans la campagne «expose à nouveau l’échec chronique du gouvernement du Brésil à promouvoir la régularisation du régime foncier dans le pays». Le journal dénonce le fait que le gouvernement de Michel Temer tend à favoriser les intérêts du groupe parlementaire interpartis de la «bancada ruralista», un front parlementaire qui agit pour la défense des intérêts des propriétaires terriens expansionnistes, aux dépens des indigènes.
Les Gamela ont commencé à s’organiser pour récupérer leurs terres occupées illégalement et qui sont en voie de démarcation. Ce sont vraisemblablement des milices privées de grands propriétaires qui ont mené l’embuscade. Tant la CNBB que Mgr Sebastião Lima Duarte, évêque de Viana, ont exprimé leur colère et leur inquiétude face à cette nouvelle agression.
La situation s’aggrave dans les campagnes
Le 30 avril dernier, des indigènes du peuple Gamela ont été attaqués par un groupe d’hommes armés, alors qu’ils quittaient une zone traditionnelle qu’ils occupent dans la municipalité de Viana. Ils ont été brutalement attaqués par une bande d’hommes armés de machettes, de bâtons et d’armes à feu. Bilan: quinze blessés, dont cinq gravement qui ont dû être hospitalisés d’urgence.
Cette violente agression et la situation du peuple indigène Gamela ont été l’objet d’une dénonciation publique, lundi 1er mai, au Sanctuaire national d’Aparecida, dans l’Etat de Sao Paulo. A cette occasion, Mgr Sebastião Lima Duarte souligne que la situation s’est aggravée après que le peuple Gamela ait commencé à s’organiser pour récupérer ses terres.
Propriété prouvée
«Ce peuple a été considéré comme disparu, après la perte des traces de leur culture et de leur langue, a expliqué le prélat. Mais il y a trois ans, après un processus d’organisation populaire accompagné par différentes entités comme le Conseil Indigéniste Missionnaire (Cimi) et d’autres organismes, les indigènes ont décidé d’assumer leur identité et de s’organiser pour récupérer leurs terres».
D’après Mgr Sebastião Lima Duarte, il existe des documents et des registres, y compris à l’Université Fédérale du Maranhão, qui prouvent que ces terres ont été données aux indigènes, au moment où le Brésil était encore un empire (1822-1889).
«Le problème est que le processus de régularisation des terres indigènes est gelé, tant par les autorités de Brasilia, que par les responsables de l’Institut National de la Colonisation et de la Réforme Agraire (Incra), a déploré Mgr Lima Duarte. Ces terres abritent également des campements de paysans sans-terre».
La police passive
De fait, cette zone a été illégalement occupée pendant des années par des grands propriétaires terriens, parmi lesquels figurent une juge fédérale et le premier adjoint au maire de Viana. A l’époque du lancement du processus de récupération des terres, un agent des pastorales sociales du diocèse de Viana a été désigné par l’évêque pour se rendre sur place et fournir aux occupants illégaux des informations détaillées sur ce cas. Sans grand succès, car, faute d’homologation des terres, ces dernières sont restées convoitées par les propriétaires illégaux qui n’hésitent donc pas à utiliser des milices privées pour intimider et agresser les indigènes.
Mais il y a pire: selon de nombreux indigènes présents lors de l’attaque, la Police militaire était en effet présente sur place lors des violences perpétrées le 30 avril, mais elle n’est pas intervenue.
Mgr Sebastião Lima Duarte dénonce «l’absence de l’Etat»
D’où le courroux de Mgr Sebastião Lima Duarte, qui a dénoncé le manque de volonté des autorités à résoudre le problème et même «l’absence de l’Etat».
Lors de la conférence de presse, le prélat a d’ailleurs demandé une plus grande présence du Secrétariat des Droits Humains de l’Etat de Maranhão et l’intervention du gouverneur de l’Etat pour résoudre définitivement le problème.
L’Eglise aux côtés des indigènes
L’évêque a souligné que «les indigènes n’ont même pas le droit de cueillir des fruits sur leurs propres terres». Mais la résistance s’organise, car de plus en plus de peuples indigènes et de quilombolas (n.d.l.r. communautés composées de descendants d’esclaves afro-brésiliens) s’organisent pour récupérer leurs terres, souvent illégalement occupées et réaffirmer leurs cultures.
Mgr Sebastião Lima Duarte a assuré que l’Eglise se tenait «aux côtés de ces peuples dans leur lutte pour plus de dignité». Et pour montrer qu’il ne s’agit pas là de simples paroles, il a rappelé que lors de la Semaine Sainte, il avait célébré Pâques dans cette communauté indigène. (cath.ch/fsp/jcg/be)