Mgr Charles Morerod: «Rencontrer le Christ, cela change quelque chose»
«Rencontrer ou non le Christ, cela change quelque chose», estime Mgr Charles Morerod, en citant le pape François. Invité vendredi soir 14 octobre 2016 dans le cadre du 8e Forum «Eglise dans le monde» à l’Université de Fribourg pour parler de la mission des Frères prêcheurs et du dialogue interreligieux dans l’esprit dominicain, il a souligné que la révélation chrétienne est une bonne nouvelle, «destinée à tous!»
L’évêque de Lausanne, Genève et Fribourg (LGF) a rappelé que «l’on ne naît pas chrétien, on le devient; et on ne le devient que si l’on peut consciemment accepter la foi chrétienne», en faisant référence à saint Thomas d’Aquin (1225-1274), un des principaux maîtres de la philosophie scolastique. «Puisque l’on ne peut croire que si la foi a été proposée, il faut des prêcheurs… Dieu n’a pas voulu nous laisser avancer à tâtons dans notre recherche de Lui, mais quand il se révèle, il nous associe à son œuvre: Jésus envoie des disciples qui en envoient d’autres, jusqu’à la fin des temps», souligne le dominicain fribourgeois. L’Ordre des prêcheurs, en effet, a été dès le début de sa fondation, en 1216, conçu comme une congrégation missionnaire.
«Il est beau de connaître Dieu!»
Mais, insiste Mgr Morerod, l’annonce ne suffit pas: «Il faut accepter de croire! Cela implique la grâce, mais elle nous donne la possibilité d’un choix libre (…) Avec saint Augustin, saint Thomas peut donc dire qu’on ne peut croire qu’en le voulant. Dans ces conditions, s’il est normal pour un croyant de désirer faire partager sa foi, vouloir l’imposer à qui ne la veut pas irait contre la nature même de l’acte de foi, qui est nécessairement libre. Et cela convient bien à une foi qui doit mener à l’amour de Dieu, qui est le but de l’annonce: on ne peut aimer que ce qu’on connaît, et il est beau de connaître Dieu!».
Mgr Morerod participait à ce Forum organisé du 13 au 15 octobre par la Faculté de théologie de Fribourg, qui avait pour thème «800 ans de mission et dialogue interreligieux dans la tradition dominicaine». Ce colloque, organisé à l’occasion du VIIIe centenaire de l’Ordre des frères prêcheurs, joue un rôle actif à la Faculté de théologie. Il a permis de dégager, durant ces trois jours, les principales étapes de la fondation et de l’évolution des dominicains, du XIIIe siècle à nos jours.
Une centaine de personnes – agents pastoraux de toute la Suisse, étudiants et professeurs de l’Université – s’étaient inscrites pour ce Forum, sans compter les auditeurs venus écouter telle ou telle conférence, précise Mariano Delgado, directeur de l’Institut pour les religions et le dialogue interreligieux (IRD). L’IRD était co-organisateur de l’évènement avec le Centre d’études pastorales comparées (CEPC) et la Chaire d’Histoire de l’Eglise.
Une vingtaine d’historiens, de spécialistes de l’Ordre des dominicains et de théologiens de la pastorale et de la missiologie venus de divers pays, appartenant ou non à la tradition dominicaine, ont traité, lors de conférences et débats en allemand, en français et en anglais, des divers engagements de l’Ordre de saint Dominique.
L’Ordre des prêcheurs, conçu comme une congrégation missionnaire
Les dominicains ont été, dès le début de la fondation de l’Ordre, des missionnaires. En effet, leur tâche principale consiste dans la prédication de l’Evangile, ce qu’ils firent déjà auprès des cathares, qui étaient considérés comme un mouvement hérétique. A partir du XIIIe siècle, les juifs et les musulmans appartenaient aussi aux destinataires de la prédication des fils de saint Dominique.
Antonio de Montesinos et Bartolomé de las Casas
Avec la découverte du Nouveau Monde, les frères prêcheurs connurent leur sommet missionnaire. Les dominicains furent les premiers défenseurs en chaire des Indiens, notamment avec Antonio de Montesinos en 1511, à Saint Domingue, et les fondateurs de l’école de Salamanque qui s’occupa des questions de la mission et des droits des peuples. Ses disciples œuvrèrent en Amérique latine, aux Philippines et en Chine.
Le grand avocat de la liberté des Indiens et de l’évangélisation pacifique était également un dominicain, Bartolomé de las Casas, qui lutta pour la reconnaissance des valeurs des diverses cultures et religions. Le XXe siècle constitue aussi un moment clé pour la mission et le dialogue interreligieux dans la tradition dominicaine, relèvent les organisateurs du Forum. Pour développer les relations avec le judaïsme et l’islam, l’Ordre s’occupe de centres de recherches de première importance à Jérusalem et au Caire.
Le Forum Fribourg Eglise dans le Monde se range dans la tradition des «Semaines de Fribourg pour l’Eglise dans le monde», qui se sont déroulées à Fribourg jusqu’en 1973. Le Forum est consacré aux questions touchant à l’Eglise dans le monde, la mondialisation, la mission et la rencontre entre les religions. Il a pour but de contribuer à ce que les questions concernant l’unification du monde, dont parle le Concile Vatican II, soient discutées dans un climat ouvert. (cath.ch-apic/be)