Nigeria: Enquête religieuse internationale sur Boko-Haram
Boko Haram recrute principalement ses combattants par le biais de connaissances, tels qu’amis, voisins ou membres de la famille. Tel est l’un des résultats d’une récente enquête menée conjointement par l’ONU et des organisations religieuses internationales sur la secte islamiste au Nigeria.
Le «Centre international pour le dialogue interreligieux et interculturel Roi Abdallah Ben Abdelaziz» (KAICIID), une organisation basée à Vienne et financée notamment par l’Arabie Saoudite, a participé à l’enquête. Selon son site internet, les résultats de l’étude ont été publiés début octobre 2016. Les recherches ont été conduites à la fin de 2015 dans les Etat d’Adamawa et de Borno, à l’est et au nord-est du Nigeria. Les chercheurs ont interrogé 119 anciens combattants de Boko Haram, 60 travailleurs de la paix, et 1’607 citoyens ordinaires, ayant été confrontés à la secte . L’étude portait sur leurs perceptions, ainsi que sur les raisons et la manière dont Boko Haram recrute.
Pas de recrutement dans les mosquées
Les entretiens avec les ex-combattants de Boko Haram ont été menés dans des camps de détention, et de personnes déplacées à l’intérieur du pays. Ils ont permis d’aboutir à des résultats importants pour la recherche fondamentale, concernant les motivations des personnes qui rejoignent le groupe armé, assure le KAICIID.
27% des personnes interrogées ont ainsi déclaré que le mouvement terroriste ne recrutait pas dans les mosquées, madrasas (école d’apprentissage du Coran) ou autres lieux de rassemblements religieux. La grande majorité des personnes interrogées a indiqué que les combattants de Boko Haram étaient recrutés par les communautés locales, non par les chefs religieux. Elle a révélé que l’organisation terroriste manipulait la religion pour l’utiliser comme moyen de recrutement.
Beaucoup d’anciens combattants du groupe ont reconnu avoir découvert que la secte dénaturait les enseignements de l’Islam. Les individus rejoignant les djihadistes pour des raisons religieuses, ont souvent plus de connaissance du Coran et sont plus facilement utilisés dans des actions de manipulation.
58% des personnes interrogées ont exprimé leur confiance dans les chefs religieux, considérés comme des bâtisseurs de paix et de réconciliation.
Le rôle clé des chefs religieux
«Cette recherche au Nigeria prouve le rôle clé que les chefs religieux peuvent jouer pour désamorcer les tensions et pour la prévention de la radicalisation», note Fahad Abualnasr, directeur général de KAICIID, dans une déclaration accompagnant les résultats de l’enquête. Il a ajouté que les leaders religieux qui sont formés dans le dialogue interconfessionnel peuvent empêcher la religion d’être instrumentalisée par des extrémistes violents. Ils peuvent également aider à sensibiliser les communautés locales contre la radicalisation.
«Pour toutes ces raisons, nous croyons qu’il est essentiel que les chefs religieux puissent être formés dans le dialogue et la compréhension entre les religions», a poursuivi le directeur du KAICIID.
Il a rappelé que dans plusieurs pays et régions du monde, tels qu’au Nigeria et en République centrafricaine, le KAICIID collabore avec les chefs religieux et les décideurs pour les aider à résister à l’extrémisme au sein de leurs communautés. Cela implique la création de plates-formes durables et inclusives, dans lesquelles les chefs religieux peuvent partager leurs préoccupations et leurs questions, ainsi que développer leur coopération. (cath.ch-apic/ibc/rz)