Géorgie: Minorité catholique enthousiaste et encouragée par le pape François
Au cours de cérémonies très familières et joyeuses, présidées par le pape François samedi 1er octobre à Tbilissi, ce dernier a tenu à encourager les catholiques géorgiens, malgré «leurs difficultés».
Après la messe au stade Meshki de Tbilissi, le pape François a rencontré samedi le clergé et les fidèles catholiques de Géorgie, en deux endroits distincts: d’abord à l’église de l’Assomption de Tbilissi, la capitale, puis au centre des Camilliens, à la fois patronage et aide pour les plus démunis.
Confisqué à l’époque du régime communiste
Accueilli par l’administrateur apostolique de l’Eglise catholique en Géorgie, Mgr Guiseppe Pasotto, et accompagné notamment des cardinaux Kurt Koch, en charge de l’Unité des chrétiens au Vatican, et Leonardo Sandri, responsable des Eglises orientales, le pape s’est d’abord rendu en procession dans l’église de l’Assomption. L’édifice religieux, confisqué à l’époque du régime communiste, n’a pu être récupéré par les catholiques qu’en 1999.
Dès son arrivée, le successeur de Pierre s’est agenouillé longuement devant le Saint-Sacrement, parmi une foule d’environ 300 personnes, composée d’une petite dizaine de prêtres – sur les 28 que compte le pays – de religieuses et religieux, ainsi que de laïcs et de représentants du Conseil pastoral qui regroupe les différentes dénominations catholiques en Géorgie: latins, arméniens et assyro-chaldéens.
Une «guerre» pour détruire le mariage
Dans son allocution de bienvenue, Mgr Pasotto a voulu souligner combien était parfois difficile la condition de minorité de la petite Eglise catholique, au point de constituer une «croix». Même si cela permet aussi, a-t-il précisé, une liberté intérieure sans beaucoup de biens à défendre, et la possibilité d’aller directement à «l’essentiel».
Puis quatre interventions ont été prononcées devant le pape, assis au milieu du chœur, devant l’autel. Parmi elles, un jeune, Kacha, 23 ans, a notamment exprimé les tentations du doute et du découragement, et la sensation d’être seul, en butte au «mur de «l’incompréhension». Une mère de famille, Irina, a également fait part au souverain pontife des difficultés des familles, confrontées aux séparations, et aux «forces qui luttent contre la famille», en particulier la globalisation et la théorie du «gender».
«Pas une journée sans faire la paix !»
Le pape François a ensuite pris la parole librement, sans texte préparé, pour répondre de manière très paternelle. A tous les catholiques géorgiens présents, il a affirmé la nécessité d’être fiers de leur foi et de leurs racines, redisant l’importance de la mémoire pour que la foi soit «joyeuse et forte». La mémoire de l’amour de Dieu est «comme une caresse que Dieu t’a faite», a-t-il insisté.
Aux religieux et prêtres, le pape a encore demandé de ne pas se replier sur eux-mêmes face aux difficultés. Puis il s’est adressé plus spécifiquement aux familles, affirmant qu’il existe aujourd’hui une «guerre pour détruire le mariage», une «colonisation idéologique à travers le gender». «Il faut tout faire pour sauver les mariages», a-t-il ajouté, donnant à nouveau ses conseils très concrets aux couples. «Pas une journée sans faire la paix !», a-t-il lancé.
La charité, «fruit d’une Eglise qui sert»
Le pape François s’est ensuite rendu au Centre des religieux camilliens (fondés par saint Camille de Lellis au XVIIe siècle), pour une rencontre très joyeuse avec les personnes aidées et les agents des différentes œuvres de charité de l’Eglise catholique. Au sein de ce complexe, à la fois patronage et centre d’aide qui assure des services médicaux aux plus pauvres, le pape a encouragé les acteurs dans leur mission, qui est «grande», car «les initiatives de la charité sont le fruit mûr d’une Eglise qui sert». Elle offre l’espérance ainsi que «la miséricorde de Dieu».
Le successeur de Pierre a également encouragé ces acteurs de la charité sur le chemin de l’unité entre chrétiens de différentes confessions. Car, leur a-t-il indiqué, «votre activité est un chemin de collaboration entre les chrétiens et entre les fidèles des différents rites». «C’est une route exigeante», mais «féconde», a ajouté le pape François, car les personnes pauvres et faibles sont la «chair du Christ». Aux personnes handicapées présentes, le pape François a aussi assuré que Dieu ne les abandonne jamais et qu’ils sont même les «préférés de Jésus». La rencontre a été conclue par des danses traditionnelles, incluant des personnes handicapées.
Des fidèles orthodoxes manifestent
L’activité pastorale de l’Eglise catholique regroupe 112’000 personnes et se caractérise par 32 paroisses réparties dans tout le pays, ainsi qu’une université créée en 2010. Les catholiques latins sont régis par une administration apostolique créée en 1993, dont l’actuel responsable est depuis 1996 Mgr Giuseppe Pasotto. Il existe aussi un évêque pour les Arméniens du Caucase, Mgr Raphaël Minassian.
A l’entrée du Centre pastoral des Camilliens, quelques poignées de fidèles orthodoxes emmenés par des popes ont à nouveau brandi des banderoles hostiles au pape.
Le pape médite sur la sainte Tunique du Christ, «mystère d’unité»
Dernière étape de son voyage en Géorgie, le pape François s’est rendu en fin de journée, le 1er octobre 2016, à l’antique cathédrale patriarcale Svetitskhoveli – «Pilier Vivant» – de la ville de Mtsketa, une des plus anciennes localités de Géorgie, située à une vingtaine de kilomètres de Tbilissi. Lors de ce point culminant de son pèlerinage dans ce pays du Caucase, le pape a délivré une méditation sur l’unité entre chrétiens à partir de la «sainte Tunique du Christ», retrouvée un temps sur le territoire de cette église.
Dans ce ›poumon spirituel’ de la Géorgie, le pape François a centré sa méditation sur le «mystère de la tunique sacrée», sans couture et «tissée tout d’une pièce de haut en bas», selon l’Evangile (Jn19, 23). Le pontife s’est appuyé dans son intervention sur un Père de l’Eglise, saint Cyprien de Carthage, pour qui la tunique indivise de Jésus est un signe «d’unité qui vient d’en haut».
Divisions entre chrétiens: lacérations dans la chair du Seigneur
Ainsi cette tunique, «mystère d’unité», a affirmé le pape, «nous exhorte à éprouver une grande souffrance pour les divisions consommées entre les chrétiens au cours de l’histoire: ce sont de vraies et réelles lacérations infligées à la chair du Seigneur».
Mais en même temps, a poursuivi le successeur de Pierre, l’amour du Christ pousse à ne pas se résigner aux divisions. Il existe ainsi, a précisé le pape, des occasions de rencontre et de dialogue, comme «la Commission Mixte Internationale». Cet exemple, choisi volontairement par le pontife, fait référence à une déclaration commune signée en septembre dernier entre catholiques et orthodoxes, que l’Eglise orthodoxe géorgienne n’a pas ratifiée.
«La chute d’un peuple commence là où finit la mémoire du passé»
Le pape François a ensuite élargi sa méditation à cette «grandiose cathédrale», qui «nous invite à faire mémoire du passé». Et c’est d’autant plus nécessaire, a-t-il poursuivi, citant un auteur géorgien, que «la chute d’un peuple commence là où finit la mémoire du passé».
Pour le pape, «l’identité chrétienne (…) se maintient telle quelle lorsqu’elle reste bien fondée dans la foi», tout en étant «toujours ouverte et disponible, jamais rigide ni fermée». C’est ce message qui est rappelé par ce lieu sacré, a souligné le souverain pontife, et qui a apporté à la Géorgie la «stabilité au milieu de tant de bouleversements». «Le Seigneur n’a jamais abandonné la terre bien-aimée de Géorgie», a conclu le pape.
Splendeur de l’architecture géorgienne au XIe siècle, inscrite au patrimoine de l’Unesco et centre spirituel de l’Eglise orthodoxe en Géorgie, la cathédrale Svetitskhoveli de Mtsketa a abrité, selon la tradition, la sainte Tunique du Christ. Célébrée chaque année le 1er octobre dans cette ville, la Tunique du Christ aurait été enterrée ici dès le 1er siècle. (cath.ch-apic/imedia/ap/be)