
Evangile de dimanche: à quelque chose malheur est bon!
Il y a quelques jours, le lectionnaire liturgie nous faisait lire dans l’évangile de Luc ce qu’on a coutume d’appeler les «malédictions» qui accompagnent les «béatitudes». La nouvelle traduction m’avait fait sursauter. J’étais habitué au fameux: «malheureux, vous les riches» et voici que j’entendais: «Quel malheur pour vous, les riches!». Vous saisissez la nuance? La malédiction n’est plus définitive; elle n’a rien d’une condamnation sans appel ni sursis. Elle n’est qu’un «malheur» passager dont les riches peuvent sortir, mais à des conditions bien précises.
Si l’argent accumulé est une source de malheur, il devient bénédiction quand il est partagé.
J’ai l’impression que la parabole de ce jour prolonge cette découverte littéraire et illustre à sa façon un proverbe qui court dans nos régions: «A quelque chose malheur est bon». Autrement dit, si le fait d’être riche peut être considéré comme un «malheur»- quel paradoxe pour nos oreilles modernes si peu franciscaines! – il est possible de transformer cette fatalité en bénédiction. C’est la conclusion que Jésus tire de l’histoire de ce gérant trop habile pour être correct en affaires: «Faites-vous des amis avec l’argent malhonnête; ils vous recevront le jour où vous serez vous-mêmes dans la dèche ou sur la paille». Qu’est-ce à dire? Ces amis sont assurément les pauvres, les paumés, les pouilleux de ce monde. Souvenez-vous du dénommé Lazare, évoqué dans le même évangile de Luc, disputant avec les chiens les miettes qui tombent de la table opulente du riche. Les miséreux accueilleront dans une autre vie les riches qui auront partagé quelques biens avec eux. Les pauvres les recevront à l’entrée des «demeures éternelles». Les riches auront donc part au bonheur réservé aux démunis, pour autant que des miettes substantielles tombent de leur table pour nourrir ceux qui gisent à leurs pieds. Si l’argent accumulé est une source de malheur, il devient bénédiction quand il est partagé. Donc, à quelque chose, malheur est bon!
Cet enseignement est conforme à la logique évangélique qui récompense celui qui donne. Il fait aussi de la pauvreté une valeur et même une vertu. C’est la «sobriété heureuse» comme on aime le dire de nos jours.
Et pour finir, un obstacle à éviter absolument. De grâce, n’interprétez pas à la lettre la phrase: «Faites-vous des amis avec l’argent malhonnête». Argent malhonnête ou mal acquis qui pourrait bien être recyclé grâce aux services d’une blanchisserie charitable. Il se pourrait que des philanthropes, des humanitaires et peut-être même de saintes personnes aient pu se laisser abuser ou séduire par ces procédés mafieux. Mais n’insultez pas la mémoire de Jésus en imaginant qu’il aurait pu recommander ces honteuses transactions. Jésus ne fait que louer l’habileté du gérant de sa parabole qui lui a permis de se relever d’un mauvais pas et il regrette que ses disciples ne déploient pas semblable débrouillardise quand il s’agit d’œuvrer pour le bien. Comparaison n’est pas raison!
Guy Musy | le 16.09.2016
Luc 16, 1-13
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