BMI/Inter-Agire et E-CHANGER «divorcent» à l'amiable

Après trois ans de ménage commun, Bethlehem Mission Immensee (BMI) et E-CHANGER divorcent. Les associations suisses de coopération au développement par l’échange de personnes ont signé un accord réglant les modalités de la dissolution de leur alliance au sein de COMUNDO. Une issue satisfaisante pour les deux parties, assure à cath.ch Gaspard Nordmann, secrétaire général d’E-CHANGER.

Il y a un an, l’alliance COMUNDO prenait la décision de cesser la collaboration entre BMI et E-CHANGER au 31 décembre 2016, rapportent les organisations dans un communiqué conjoint du 13 juillet 2016.

En 2013, les associations Bethlehem Mission Immensee (BMI), E-CHANGER et Inter-Agire (IA) se regroupaient en formant COMUNDO, afin de renforcer leur impact au niveau national dans le cadre de la coopération par l’échange de personnes. Dès cette date, la conduite opérationnelle des activités a été confiée à BMI. «Cependant, la vie associative étant caractérisée par une grande diversité et une richesse des points de vue, des désaccords quant aux perspectives du développement commun sont assez vite apparus», note le communiqué. D’où la rupture intervenue en 2015. Les associations BMI et ECHANGER sont donc parvenues, le 30 juin dernier, à un accord réglant les modalités de la dissolution de leur alliance.

Selon les termes de l’accord, la conduite opérationnelle de COMUNDO continuera d’être confiée à BMI et IA durant une phase de transition allant jusqu’au 31 décembre 2016. A partir du 1er juillet 2016, E-CHANGER reprend, en son nom, ses propres activités de sensibilisation, de recherches de fonds et de communication, principalement en Suisse romande. Gaspard Nordmann confirme que l’organisation ouvre un bureau à Lausanne. Il précise que l’organisation gardera un fort ancrage à Fribourg. C’est dans cette ville que le comité continuera à se réunir et E-CHANGER y possède une forte base de soutien.

Répartition des programmes

En 2017, BMI et Inter-Agire assureront ensemble, sous la marque COMUNDO, le volet opérationnel de leurs activités et resterons actives dans la coopération par l’échange de personnes. Les bureaux de Fribourg, Lucerne et Bellinzone permettront aux deux organisations d’être présentes sur tout le territoire suisse, indique le communiqué.

En 2017 également, E-CHANGER reprendra donc ses activités de coopération par l’échange de personnes. Elle reprendra le programme Burkina Faso de COMUNDO, ainsi que tous les contrats en cours qui lui sont liés. E-CHANGER compte également redevenir active au Brésil et reprendra les partenariats établis de longue date avec les organisations et les mouvements sociaux de ce pays. La fin du programme au Brésil ayant été décidée il y a déjà un certain temps par COMUNDO, tous les contrats des collaborateurs et coopér-acteurs/trices en insertion dans le pays prendront fin, comme prévu, avant le 30 septembre 2016. Tous les autres programmes au Sud resteront assurés par BMI et Inter-Agire, sous la marque COMUNDO.

Pas un ‘Röstigraben’

Les deux parties se déclarent satisfaites de l’accord, notamment par le fait qu’il assure une continuité dans les programmes et dans l’insertion des coopér-acteurs/trices au Sud et des collaborateurs/trices de COMUNDO en Suisse romande.

«Nous ne nous voyons de toute façon pas comme des concurrents»

La rupture entre les deux organisations d’aide au développement avait pourtant fait quelques vagues, comme cath.ch l’avait noté dans de précédents articles. Le «divorce» a été la conséquence d’une différence de culture institutionnelle, de valeurs, de vision socio-politique, a expliqué Martin Schreiber, responsable de la communication et des relations publiques pour Unité (association qui regroupe une vingtaine d’organisations suisses – dont E-Changer – qui ont pour principal objectif d’établir des liens de solidarité avec les populations défavorisées des pays du Sud). «E-Changer a une vision plutôt laïque, un fonctionnement associatif, horizontal, tandis que BMI a une vision plus verticale, hiérarchique…», constatait-il. Le fait qu’E-CHANGER soit plus orienté sur la Suisse romande et BMI sur la Suisse alémanique n’était pas non plus le cœur du problème. «La rupture n’est pas due à un ›Röstigraben’ entre Romands et Alémaniques, car il y a aussi des Alémaniques qui travaillent au sein d’E-Changer et en partagent son orientation», expliquait ainsi Martin Schreiber.

S’orienter vers l’avenir

«Il est vrai qu’il y a eu des tensions, mais depuis, l’eau a coulé sous les ponts», assure Gaspard Nordmann, qui se réjouit que BMI/IA et E-CHANGER aient finalement accordé leurs longueurs d’ondes. E-CHANGER va maintenant reprendre son indépendance et son engagement pour les valeurs sociales auxquelles elle est spécialement attachée, précise-t-il. Le secrétaire général assure que l’organisation souhaite maintenant s’orienter vers l’avenir et ne pas regretter le passé.

E-CHANGER devra partiellement repartir à zéro au niveau de sa structure opérationnelle, qui était complètement intégrée à COMUNDO. Gaspard Nordmann indique que l’organisation a pu récupérer une base financière suffisante pour redémarrer dans de bonnes conditions, un point qui a été discuté assez longuement par les deux parties. Mais le responsable se réjouit qu’E-CHANGER ait pu principalement récupérer les outils, les savoirs et les compétences développés au sein de COMUNDO.

Une opportunité?

Il considère en outre que le dégât d’image pour les organisations a été faible, notamment grâce au fait que les parties en désaccord ont finalement pu régler leurs différends, mettant en particulier en place une communication commune.

Il précise que son organisation continuera à collaborer, bien que de manière évidemment moins étroite, avec BMI/IA, qui garderont le contrôle de la marque COMUNDO. «Nous ne nous voyons de toute façon pas comme des concurrents, mais comme des acteurs complémentaires, dans l’objectif commun d’aider les populations du Sud, chacun à sa manière», assure-t-il. Le son de cloche est le même du côté de COMUNDO, dont la directrice administrative, Teres Steiger-Graf, affirme à kath.ch qu’il n’y aura pas de logique de compétition, du moment que les deux organisations se sont répartis les divers programmes d’activités. Elle assure en outre que COMUNDO restera active en Suisse romande.

Osant un avis personnel, Gaspard Nordmann estime que la fin de l’alliance avec COMUNDO est également «une opportunité pour E-CHANGER de redéfinir et renforcer les valeurs qui font son ADN et de redynamiser le mouvement». (cath.ch-apic/com/kath/arch/rz)