Le prêtre français Guy de Lachaux (Photo:Pascal Tissier)
Suisse

Un prêtre pour exorciser le divorce

Du 8 au 11 juillet, le Père Guy de Lachaux était à Delémont où il a animé une session «Trois jours pour choisir la vie» afin d’aider des hommes et des femmes à surmonter «l’enfer» d’une séparation ou d’un divorce. Prêtre dans le diocèse d’Evry, en France, le Père de Lachaux défend depuis plus de vingt ans la cause des divorcés dans l’Eglise.

Sur internet, il suffit de libeller son nom dans le champ de recherche de Google pour constater que la quasi-totalité des articles proposés sur le Père Guy de Lachaux évoque la problématique de la séparation et du divorce. C’est que depuis le début des années 90, le curé de la paroisse de Gif-sur-Yvette, dans l’Essonne, au sud de Paris, anime régulièrement des sessions pour aider des hommes et femmes à faire le deuil d’une séparation difficile. Au soir du 7 juillet, le Père Guy de Lachaux a déposé ses valises au Centre Saint-François, à Delémont où, une fois de plus, il va tenter d’aider plusieurs personnes à regarder leur histoire en face pour qu’elles trouvent la sérénité et un sens à ce qui leur est arrivé: «Je prends les gens où ils en sont, je les écoute et les accompagne spirituellement. Je ne suis pas un psychothérapeute, mais j’ai deux atouts. Le premier est qu’en Eglise on apprend à se réunir et à s’écouter. Prendre le temps d’écouter l’autre est primordial. Le deuxième atout c’est la force de la Parole… une Parole qui révèle».

Un processus de deuil

Le lendemain, sur la terrasse ensoleillée du Centre Saint-François, quelques heures avant d’accueillir les huit personnes avec qui il va passer le week-end, le prêtre français résume le programme de ces «Trois jours pour choisir la vie»: «En général, la première journée permet de faire connaissance et chacun raconte son histoire, sa séparation… ce sont souvent des moments forts d’émotion. Le lendemain, à travers la Parole, chacun choisit un chemin, c’est-à-dire le processus de deuil qui va l’aider à assumer l’échec. Le troisième jour doit permettre de transformer le sentiment de culpabilité en pardon, le seul ‘chemin’ vers la libération». Le Père de Lachaux regrette que beaucoup de divorcés, hommes ou femmes, sortent de l’Eglise en pensant qu’ils en sont automatiquement exclus: «C’est le contraire et j’insiste sur le fait que cette ‘grande épreuve’ de séparation leur offre justement une nouvelle place dans l’Eglise. Vivre c’est aimer!»

Accueillir avant tout

Plus besoin de poser de question, le Père de Lachaux anime à lui seul l’entretien en revenant sur Amoris laetitia, l’exhortation apostolique du pape François sur l’amour dans la famille: «Le chapitre 8 intitulé ‘Accompagner, discerner et intégrer la fragilité’ donne de la chair à ce que l’on préconisait, chacun est libre. Cependant, une question demeure que le pape n’a pas abordée concernant le sacrement de mariage. Les choses ont tellement changé… On ne s’en sortira pas tant que l’on ne changera pas la théologie du mariage. Il y a toujours deux camps: ceux qui prônent la loi divine et ceux qui prônent la miséricorde. Je suis d’avis qu’il n’y a pas d’actes qui méritent une condamnation à vie de l’Eglise… elle doit accueillir avant tout! On doit passer de la théologie de l’idéal à celle du chemin. Il faut écouter les gens, cheminer avec eux».

A l’entendre, le Père de Lachaux ne cherche pas à garder le contact avec les participants à ses sessions: «Ils viennent me voir en espérant tourner une page douloureuse. Je les accompagne quelques jours avec eux pour qu’ils entament un nouveau cheminement, après j’espère qu’ils retrouvent la sérénité, mais c’est leur vie. Pas de nouvelles, bonnes nouvelles, comme dit l’adage».

Le pouvoir de l’écoute

Quand on lui demande ce qui l’a amené à être reconnu comme «un spécialiste du divorce», Guy de Lachaux sourit: «c’est un pur hasard. En 1990, alors que j’étais prêtre à Paris, j’ai soutenu un groupe de jeunes adultes qui n’acceptait pas la position de l’Eglise face aux divorcés. Ils ont mis sur pied – dans l’église – une exposition sur ce thème qui a aussitôt été vandalisée, mais qui est finalement restée en place pendant quatre mois. Du coup, les gens ont pensé que j’étais un spécialiste de cette problématique et venaient me voir. On a créé un groupe de parole qui a très vite compté une quarantaine de membres. Sincèrement, je ne savais pas quoi leur dire, mais je prenais le temps de les écouter et je m’inspirais de la Parole pour tenter de les aider. Tout est parti de là… il y a maintenant plus de 25 ans. Pour l’anecdote, je suis issu d’une famille de cinq enfants et j’ai aujourd’hui beaucoup de neveux et nièces et presque autant de petits-neveux ou petites-nièces… et pas un seul divorce dans la famille… c’est peut-être un signe!»

Prêtre retraité actif

Ancien rédacteur en chef du journal Chrétiens divorcés, chemins d’espérance, le Père Guy de Lachaux a participé à l’organisation de deux colloques nationaux avec l’association Groupe relais chrétiens divorcés. Il a également signé de nombreux ouvrages, dont Divorcés remariés: de la loi à la miséricorde (2014) ; Divorcés remariés, sortir de l’impasse (2014) ; ou Chrétienne, divorcée, remariée: une faim d’eucharistie (2015), pour ne citer que les plus récents.

A 78 ans, le Père Guy de Lachaux semble en pleine forme et revendique sereinement son statut de prêtre retraité: «Je suis toujours actif et je célèbre des eucharisties en semaine. Je suis dans une paroisse qui a été longtemps sans prêtre et dans laquelle les paroissiens s’occupaient de tout. C’est toujours un peu comme ça et c’est très bien». (cath.ch-apic/pt/rz)

Le prêtre français Guy de Lachaux
12 juillet 2016 | 17:44
par Raphaël Zbinden
Temps de lecture : env. 4  min.
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