Le taux de suicide des femmes a fortement augmenté depuis 20 ans, aux Etats-Unis (Photo:Pixabay.com)
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Etats-Unis: Les catholiques pratiquantes protégées contre le suicide?

D’après une récente étude américaine, les femmes catholiques qui participent régulièrement à des services religieux ont cinq fois moins de risques de se suicider que la moyenne de la population féminine. Ces résultats renforcent, dans la communauté scientifique, l’idée d’une corrélation positive entre pratique religieuse et santé mentale.

L’étude a été publiée le 29 juin 2016 par le journal JAMA Psychiatry, de l’Association médicale américaine, sur fond d’une inquiétante hausse du taux de suicide chez les femmes américaines. Les recherches ont été menées de 1996 à 2010, sur 89’078 femmes vivant aux Etats-Unis et âgées de 30 à 55 ans. Au cours des 15 ans d’observation, 36 femmes de ce panel ont mis fin à leurs jours, rapporte le quotidien Los Angeles Times. Le groupe était constitué principalement d’infirmières avec une majorité se déclarant de confession protestante ou catholique. Le taux de suicide au sein de cet échantillon de population a été deux fois moins élevé que la moyenne des femmes américaines. Les participantes catégorisées comme «catholiques pratiquantes», c’est-à-dire assistant à un service religieux au moins une fois par semaine, se sont particulièrement distinguées, en affichant un taux de suicide cinq fois moins important que les autres.

Sur fond noir

Les protestantes pratiquantes ont également été beaucoup moins enclines à se suicider que les femmes n’assistant pas ou peu aux services religieux. Ces premières ont tout de même eu 7 fois plus de risque de passer à l’acte que les catholiques dévotes. Aucun cas de suicide n’a ainsi été enregistré parmi les 6’999 catholiques assistant à plus d’un service religieux par semaine.

L’effet préventif de la religion n’a pas uniquement été une affaire de confession, relève l’étude, puisque les catholiques non pratiquantes ont commis presque autant de suicides que les non-pratiquantes des autres religions.

«La religion et la spiritualité sont peut-être des ressources sous-estimées par les psychiatres»

L’étude survient deux mois après que le Centre américain pour le contrôle et la prévention des maladies ait fait part d’une forte hausse des suicides dans le pays entre 1994 et 2014. Le taux a augmenté aussi bien chez les femmes que les hommes et dans tous les groupes d’âges. Bien que les femmes restent bien moins concernées, l’écart avec le taux de la population masculine se réduit néanmoins progressivement.

La pratique religieuse contre la solitude

Pour les auteurs de l’étude, le fait que le suicide soit considéré comme un péché mortel dans la religion catholique joue certainement un rôle dans les résultats. Cet élément n’explique cependant pas la très grande variation du taux de suicide entre les pratiquantes et les non-pratiquantes. Les auteurs estiment ainsi que le fait d’assister aux services religieux constitue une «forme de participation sociale particulièrement significative», qui protège les femmes de la solitude et de l’isolement, deux facteurs fortement impliqués dans la dépression et le suicide.

«La religion et la spiritualité sont peut-être des ressources sous-estimées par les psychiatres et les médecins», note à ce propos une équipe de chercheurs de l’Ecole de santé publique de Harvard, dans le Massachusetts.

Sigmund Freud, le père de la psychanalyse, avait défini la croyance religieuse comme une «névrose universelle obsessionnelle de l’humanité». Mais les dernières recherchent en la matière montrent plutôt que la religiosité est ancrée dans la biologie humaine et qu’elle est potentiellement bénéfique pour le psychisme, note le Los Angeles Times.

Le docteur Aaron Kheriaty, professeur de psychiatrie à l’Université de Californie, souligne que la nouvelle étude renforce l’hypothèse d’un lien entre pratique religieuse et santé mentale. L’auteur de l’ouvrage Le Guide catholique de la dépression (The Catholic Guide to Depression) reconnaît le pouvoir des interdits religieux dans la prévention du suicide. Il relève toutefois que la religion peut également protéger contre le désespoir.»Les convictions religieuses peuvent aider les gens à se forger une mentalité d’espérance, même au milieu des crises et de l’adversité». Le psychiatre précise pour autant que «ce n’est pas notre rôle de ‘prescrire’ la religion… ou de faire du prosélytisme envers nos patients», relevant que les convictions doivent être profondes et sincères pour pouvoir en bénéficier au niveau de sa santé physique et mentale, comme plusieurs études le montrent. Mais si les patients sont enclins à explorer la religion ou la spiritualité, affirme Aaron Kheriaty, les médecins peuvent les encourager, assumant la probabilité que ces activités ne leur feront pas de mal et pourront même les aider. (cath.ch-apic/lat/rz)

Le taux de suicide des femmes a fortement augmenté depuis 20 ans, aux Etats-Unis
30 juin 2016 | 11:26
par Raphaël Zbinden
Temps de lecture : env. 3  min.
Etats-Unis (540), Suicide (36)
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