Deux katchkars, des croix de pierre typiques de l'Arménie (Photo:Jacques Berset)
Vatican

Arménie: Le voyage du pape sous le signe de l’œcuménisme et des martyrs   

L’un des principaux objectifs du voyage du pape François en Arménie, du 24 au 26 juin 2016, est de renforcer les liens œcuméniques entre l’Eglise catholique et l’Eglise apostolique arménienne, développés à partir du Concile Vatican II. Avec un hommage particulier aux nombreux martyrs chrétiens du pays, la visite du pontife devrait volontairement prendre une tonalité spirituelle, pour échapper aux aspects politiques et diplomatiques du génocide arménien de 1915.

Tout au long de son séjour, le pape François sera ainsi l’hôte du patriarche de l’Eglise apostolique arménienne, Karékine II. Le chef de l’Eglise catholique romaine sera hébergé à Etchmiadzine, siège de l’Eglise apostolique arménienne, à quelques kilomètres de la capitale Erevan. Cette visite survient 15 ans après celle inédite de Jean Paul II, en septembre 2001, qui fut accueilli par le même patriarche Karékine II, toujours à Etchmiadzine.

Le premier Etat chrétien de l’histoire

«L’identité chrétienne» sera l’un des fils conducteurs de ce voyage du pape en Arménie, a expliqué deux jours plus tôt le cardinal suisse Kurt Koch dans L’Osservatore Romano. En effet, le chef de l’Eglise catholique se rend auprès de la première nation qui se convertit officiellement au christianisme, entre 301 et 313. Le pape François visitera ainsi, le 26 juin, le monastère de Khor Virap, où saint Grégoire l’Illuminateur, apôtre de l’Arménie, fut emprisonné durant 13 ans. Le pape y prononcera une prière. Puis il effectuera un lâcher de colombes, en signe de paix, en direction du mont Ararat, en Turquie, qui domine le monastère. Un geste symbolique alors que la frontière entre les deux pays est fermée depuis 1994.

La prière au centre

Toujours dans un objectif œcuménique, la prière aura une place importante dans ce voyage, assure encore le cardinal Koch. La première étape est ainsi consacrée à une «visite de prière», le 24 juin, dans la cathédrale apostolique d’Etchmiadzine, comme l’avait fait Jean Paul II en 2001. Un autre temps fort de ce voyage sera la rencontre œcuménique et la prière pour la paix, dans la soirée du 25 juin, sur la place de la République à Erevan. Des dizaines de milliers de personnes sont attendues à cet événement, selon le père Federico Lombardi, directeur du Bureau de presse du Saint-Siège. Le 26 juin, le pape François participera à la Divine liturgie dans la cathédrale apostolique, avant de participer à un déjeuner œcuménique. Une exception pour ce pape qui n’apprécie guère, d’ordinaire, les déjeuners officiels.

Le pape François se rendra aussi auprès des Arméniens catholiques, en minorité dans le pays, mais très présents dans la diaspora. Dans la matinée du 25 juin, il célébrera la messe à Gyumri, deuxième ville du pays, frappée par un séisme meurtrier en décembre 1988.

La messe sera célébrée sur la place Vartanants. C’est la première fois pour la communauté catholique d’Arménie que la célébration eucharistique se tiendra en extérieur, a indiqué le Père Lombardi. Après la célébration, le pontife déjeunera en privé dans le couvent des sœurs arméniennes de l’Immaculée Conception. Le lendemain, il rencontrera aussi 14 évêques arméniens catholiques et une douzaine de prêtres issus de tout le pays. Selon Radio Vatican, l’Eglise arménienne catholique compte près de 600’000 fidèles dans le monde entier.

Un pays de martyrs

Au cours de ce voyage, le pape François devrait aussi évoquer la douloureuse histoire arménienne, marquée par le martyre de nombreux chrétiens. «Le martyre est devenu un trait caractéristique de l’identité arménienne, affirme ainsi le cardinal Koch, visible concrètement aussi dans les splendides croix de pierre (katchkar) que l’on rencontre en tout lieu du pays».

C’est d’ailleurs sur cet aspect du martyre que le chef de l’Eglise catholique devrait particulièrement insister. Le pape argentin a lui-même préparé le terrain en appelant récemment à ne pas faire de «réductionnisme sociologique du mystère de la foi, du martyre» en parlant exclusivement de génocide des chrétiens au Moyen-Orient. «En vérité, a-t-il expliqué au collège universitaire ›Villa Nazareth’ une semaine avant son voyage, il s’agit d’une persécution qui conduit les chrétiens à la fidélité, à la cohérence de leur propre foi». En Arménie, le pape pourrait donc ne pas prononcer le mot de génocide. Un choix qui ménagerait les relations du Saint-Siège avec la Turquie, qui avait rappelé son ambassadeur à Ankara après que le pape François ait utilisé ce mot en avril 2015, lors d’une messe pour le centenaire du «martyre» arménien. Passage obligé, au lendemain de son arrivée, le pape François fera tout de même une étape attendue au mémorial de Tsitsernakaberd, dédié aux victimes du génocide arménien. (cath.ch-apic/imedia/bl/ak/rz)

Deux katchkars, des croix de pierre typiques de l'Arménie
22 juin 2016 | 13:59
par Raphaël Zbinden
Temps de lecture : env. 3  min.
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