Sylvie Perrinjaquet, présidente de la CECAR (Commission d'écoute, de conciliation d'arbitrage et de réparation)  | © Maurice Page
Suisse

Suisse romande: Création d'une commission indépendante pour les victimes d'abus sexuels commis par des prêtres

Les victimes d’abus sexuels commis par des prêtres ou des agents pastoraux pourront prochainement trouver une écoute neutre et bienveillante auprès de la Commission d’écoute, de conciliation d’arbitrage et de réparation (CECAR) nouvellement constituée en Suisse romande. Les grandes lignes de son action ont été présentées lors d’une conférence de presse, le 21 juin 2016, à Lausanne.

Les victimes d’abus sexuels sur mineurs, aujourd’hui prescrits, commis dans le cadre de la pastorale pourront dès septembre s’adresser directement à la CECAR. Un site internet permettra de prendre un premier contact. L’idée est d’abord d’obtenir une reconnaissance puis d’envisager une réparation a expliqué la présidente de la CECAR, Sylvie Perrinjaquet, ancienne conseillère d’Etat et conseillère nationale neuchâteloise. Il s’agit d’un point de départ important pour la prise de conscience de ces cas, parfois très anciens, mais qui ont marqué à vie les personnes.

Un fonctionnement sur le modèle belge

Le principe de la commission est inspiré de la démarche faite en Belgique. Elle est composée de manière tripartite par deux représentants des victimes, trois membres de la société civile et deux représentants de l’Eglise catholique. Concrètement les victimes seront auditionnées par un comité de trois conciliateurs encore à constituer. Il s’agira d’abord de vérifier la véracité des faits. La victime ne devra pas en apporter la preuve, mais en défendre la vraisemblance et surtout elle aura l’occasion de parler de sa situation actuelle. Le cas échéant, l’abuseur sera également confronté à ces faits. Ensuite le comité et la victime élaboreront une proposition de solution. Le cas sera ensuite transmis à la CECAR qui tranchera.

Possible compensation financière

La possibilité d’une compensation financière sera également examinée, mais pour Sylvie Perrinjaquet, il ne s’agit pas de l’essentiel de la démarche. La somme de 500’000 francs mise à disposition par la Conférence des évêques suisses (CES) pourra être adaptée si nécessaire, a expliqué Mgr Charles Morerod, évêque de Lausanne, Genève et Fribourg. (LGF). Il s’agit d’abord de démontrer la volonté des évêques et des congrégations religieuses de réparer le mal commis. En l’état, la CECAR se refuse à indiquer un chiffre du nombre des victimes. «800 cas ont été signalés à la commission belge, mais il est impossible d’extrapoler», estime Jaques Nuoffer, président du groupe SAPEC.

«On croit souvent que les abus sexuels commis par des prêtres touchent surtout les garçons, mais ce n’est probablement pas le cas. Les filles sont aussi concernées, même si elles témoignent moins. Peut-être portent-elles encore un complexe de culpabilité face à ces abus ?», ajoute Marie-Jo Aeby, membre du comité SAPEC

La distance n’abolit pas la souffrance

«A la rencontre des victimes, j’ai reconnu que la distance n’annule pas la souffrance même très longtemps après», a admis Mgr Morerod. «Cette souffrance est due aux abus commis, mais aussi à leur négation ou au silence de la hiérarchie.»

La Constitution de la CECAR est issue d’un long processus de gestation et de concertation, a expliqué, Jacques Nuoffer, président du groupe SAPEC (Soutien aux personnes abusées dans une relation d’autorité religieuse). En 2010, le SAPEC insatisfait de la manière des diocèses de traiter le problème, a lancé l’idée d’une commission neutre et indépendante. En 2012, Mgr Morerod s’est rallié à cette démarche et un groupe de travail s’est constitué pour élaborer la convention débouchant sur la création de la CECAR.

La CECAR constitue une première au niveau suisse. Pour l’instant elle s’est developpée en Suisse romande, mais rien n’empêche qu’elle s’étende à terme aussi à la Suisse alémanique si un intérêt se manifeste, explique sa présidente. (cath.ch-apic/mp)


Les membres de la CECAR

 

La CECAR est composée de sept membres :

Deux représentants de l’Église catholique :

Mgr Charles Morerod, Evêque  de Lausannne, Genève et Fribourg

M. Pascal Corminboeuf, ancienConseiller d’Etat – FR

Deux représentants du Groupe SAPEC ou d’une autre association défendant les

droits des victimes

M. Jacques Nuofffer, président du groupe SAPEC

Mme Monique Gauthey, médecin pédopsychiatre GE

Trois personnalités indépendantes, choisies d’un commun accord entre l’Église

catholique et le Groupe SAPEC

Mme Sylvie Perrinjaquet, ancienne conseillère d’Etat et ancienne conseillère nationale NE, présidente

Prof. Gérard Niveau, psychiatrie médico-légale, Centre Universitaire Romand de Médecine Légale, Genève

Mme Catherine Renaville, criminologue – sexologue, La Chaux-de-Fonds

 

 

 

Sylvie Perrinjaquet, présidente de la CECAR (Commission d'écoute, de conciliation d'arbitrage et de réparation) | © Maurice Page
22 juin 2016 | 14:05
par Maurice Page
Temps de lecture : env. 3  min.
Abus sexuels (1289), CECAR (21), Charles Morerod (273), SAPEC (34)
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